Chapitre 13 - ETHANN

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Pour ce chapitre, je vous conseille de lire en écoutant eyes dont lie d'Isabel LaRosa :)
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Tout est en place.

Je recule de deux pas en arrière, suffisamment pour pouvoir étudier la pièce dans son ensemble. Ma mère m'étriperait sur-le-champ si elle savait pour la fête qui va se tenir ici dans quelques heures.

  Par chance, elle n'est pas censée être de retour avant lundi, ce qui me laisse largement le temps de flanquer à la porte les dernières marmottes et de passer un bon gros coup de ménage une fois la fête terminée.

Je me demande si elle saluerait ma stratégie : après tout, l'idée de cette fête n'est qu'un prétexte pour approcher Jody. Elle me réprimanderait certainement sur la manière de le faire, mais bon, il n'y a pas de plaisir en la rigueur d'un plan. Une victoire sans jeu, c'est un peu comme un yaourt sans fruits : on s'en satisfait, mais on en est jamais pleinement comblé.

  Or, moi, je compte bien m'amuser.

Je me demande comment elle agira face à moi, une fois ici. Après tout, elle vient chez moi ; elle devra forcément faire preuve d'une fausse politesse gratifiant mon hospitalité. Elle me signifiera d'un simple hochement de tête qu'elle me remercie de l'invitation, ou elle cherchera à m'éviter par tous les moyens. Je te ferais davantage pour la seconde option, la connaissant. En revanche, moi, je ne chercherais pas à l'éviter.

  Un sourire mesquin vient se coller sur mes lèvres. Avec toute cette foule, elle ne pourra pas me mettre du spray au poivre dans les yeux, cette fois-ci.

Les tables sont dressées, surplombées de nappes en plastique et de dizaines de gobelets et de saladiers. Bonbons, jus de fruits, bières, chips, il y a de tout. Personne ne se douterait qu'il s'agit uniquement d'un subterfuge, d'une amorce dans mon plan. Je me suis donné du mal, j'ai fait vivre la comédie : j'espère que ces efforts porteront leurs fruits.

Remontant à l'étage, je sors plusieurs tee-shirts de mon armoire avant de débattre pour lequel opter. L'occasion n'est pas digne d'une soirée mondaine, mais il ne s'agit pas d'une soirée en petit comité, alors autant faire simple et élégant.

  Après être resté immobile durant cinq bonnes minutes, j'opte finalement pour un jean noir foncé et un teeshirt noir. Tout ça pour ça.

Je jette un bref coup d'œil dans le miroir, et la remarque de Thompson me revient brusquement en mémoire.

  « La couleur, c'est visiblement pas trop ton truc. »

  Elle avait visé juste. Je n'ai jamais été du genre carnaval. J'ai toujours éprouvé une grande dilection pour la couleur noir.

Je crois que, pour aimer les couleurs, il faut être capable de les voir, de les ressentir. Si les couleurs froides font souvent écho à un état d'esprit morose, triste, anxieux, renfermé, les couleurs chaudes, elles, inspirent la joie, la vie, l'éclat, la bienveillance. Le noir est un peu le paroxysme de cette première catégorie. Il exprime l'obscurité, la solitude, la mort, le vide. Je ne crois pas avoir beaucoup expérimenté la première catégorie d'émotions. Il est très rare que je ressente de la joie, tout comme il est très rare que je porte autre chose que du noir.

Dit comme ça, on dirait que je cherche à faire une caricature des couleurs, mais il y a une part de vérité dans cette catégorisation. C'est ainsi : on pourrait être surpris par les informations que de simples préférences vestimentaires traduisent.

  Revenant à la réalité, je romps le contact visuel avec ma propre personne pour me diriger dans ma chambre.

  Il est presque vingt heures. Les gens ne devraient pas tarder à arriver. Il faut compter une bonne heure depuis l'heure donnée pour obtenir une estimation : la majorité des gens ne débarqueront jamais à l'heure indiquée, mais bien plus tard.

Buried in liesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant