Prologue

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Prologue

Millie

— T'es pas sérieuse Kaylee, tu vas pas faire ça ?

En voyant ma sœur jumelle fermer sa valise et se diriger vers la porte de notre chambre, je déchante. Je me précipite vers l'entrée et barre le passage avec mes bras écartés. Ma jumelle, celle avec qui j'ai tout partagé depuis dix-huit ans, s'apprête à m'abandonner pour partir avec le connard qui klaxonne sous notre fenêtre.

— Laisse-moi passer Millie, m'ordonne-t-elle tout en essayant d'atteindre la poignée.

— Si tu pars avec lui t'es morte à mes yeux, je ferais comme si t'avais jamais existé.

— Parfait. Au moins j'aurais plus à vivre dans l'ombre de miss parfaite, j'aurais plus à m'écraser face à toi. T'as toujours tout décidé pour tout le monde, surtout pour moi. Mais là tu ne me contrôleras pas, je l'aime et il m'aime, fais-toi une raison, va à la fac et laisse-moi sortir de cette maison !

J'arrive à peine à croire que ces mots puissent sortir de sa bouche. Kay a toujours été la plus douce, la plus calme de nous deux. Nous sommes le yin et le yang, le feu et la glace, la pluie et le beau temps... Mais là, face à moi, c'est l'orage qui gronde et qui emporte tout sur son passage. Mon copain, ma famille, mon cœur.

— Peter est à moi, il ne t'aime pas, tu ne peux pas tout plaquer et te barrer avec MON mec ! crié-je de désespoir.

— Je vais te le dire une dernière fois, il m'a choisi moi. Accepte-le.

Sous la fenêtre, les coups de klaxons se font de plus en plus pressants. Ce traitre va finir par ameuter tout le quartier s'il continue ! En furie, je m'approche de la vitre dans le but de hurler pour le faire cesser, mais à la seconde où je le vois, mon cœur tombe dans mes talons.

Il ne faut pas que les larmes qui me brûlent les yeux sortent, je refuse de lui faire ce plaisir. Ma sœur jumelle sait déjà que ce qu'elle est en train de me faire est la pire des trahisons, elle est même censée sentir ma souffrance. Pourtant, elle s'en contrefiche. Ce constat accentue un peu plus ma douleur.

— J'ai libéré la porte... Pars si c'est ce que tu veux, mais surtout ne reviens jamais, lâché-je résignée.

Le temps qu'elle empoigne ses bagages et que j'entende ses pas dans les escaliers, je tiens encore. Une inspiration, une expiration, la voiture qui s'éloigne et mon souffle qui se coupe.

L'homme que je pensais être le bon, celui pour qui j'aurais tout donné vient de partir, emmenant avec lui l'autre moitié de moi. Ma sœur, ma meilleure amie, mon âme jumelle. Ensemble, les deux personnes que j'aime le plus sur cette terre viennent de me briser et enfin, le torrent que je retenais jusque-là est libéré.

Pendant ce qui me semble être une éternité, je pleure d'un flot ininterrompu. Dans une semaine je serai à l'UNC, à Charlotte, seule.

Une heure, ou peut-être deux plus tard, mes yeux se sont asséchés mais je n'ai toujours pas bougé. Je suis encore là. Sous la fenêtre par laquelle j'ai vu les deux personnes les plus importantes de ma vie partir, les genoux ramenés contre ma poitrine. Le bruit caractéristique de la porte d'entrée me sort de ma torpeur. Sans attendre et malgré mes jambes endolories, je dévale les escaliers et me jette dans les bras de ma mère.

— Maman, elle est partie, ils sont partis ensemble, pleuré-je à nouveau.

— Je sais ma chérie, me console-t-elle en me caressant les cheveux.

— J'ai mal... C'est la pire trahison du monde.

Les mots meurent dans ma gorge, j'aimerais pouvoir exprimer ce que je ressens, lui dire que j'ai l'impression que la moitié de mon âme vient de prendre feu, mais je n'y arrive pas. Je me contente de pleurer, encore et encore.

— Je suis là, pleure autant que tu en as besoin. Mais sache une chose, tu t'apprêtes à vivre les plus belles années de ta vie. Tu vas rencontrer des gens, t'ouvrir à de nouveaux horizons, la douleur partira. D'ailleurs, j'ai une bonne nouvelle pour toi.

— Ah oui ? Je suis pas sûre que tu arrives à me remonter le moral là.

— J'ai croisé la mère de Nathan, il a choisi UNC, comme toi. Il doit t'appeler pour te le dire donc fais semblant d'être surprise. Mais tu vas être dans la même université que ton meilleur ami ! Et ne t'en fais pas, ajoute-t-elle, je compte bien avoir une conversation avec ta sœur, elle ne va pas s'en tirer comme ça.

On continue de parler pendant un long moment, jusqu'à ce que je me sente un peu mieux. Ce n'est pas encore le top, et ce ne le sera pas de suite, mais il est clair que j'ai sous-estimé le pouvoir d'une maman. Ces mots m'ont réchauffé le cœur, au moins un peu. Et finalement, je ne serai pas seule. Tout ce que j'ai à vivre est devant moi. Ces études, ce campus, c'est un de mes rêves qui se réalise. J'irai de l'avant, je ne peux pas échouer et comme je l'ai déjà dit, la plus forte, c'est moi.

Que ces deux traîtres brûlent en enfer, moi, je vais vivre !  


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