Chapitre 11

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Nathan

Encore raté.

C'est le troisième lancé franc que je loupe depuis que je suis arrivé sur le terrain en bas de chez moi et ça commence à me gonfler. En fait tout me gonfle. Je n'arrive pas à décolérer depuis mon tête-à-tête avec Eva et mon jeu en souffre. C'est toujours le cas lorsque je laisse mes émotions me dominer, c'est d'ailleurs pour éviter ça que je m'inflige cette discipline de fer. Le préparateur mental de l'équipe est presque devenu mon meilleur pote à force. Mais là, j'ai beau appliquer toutes les méthodes que Warren m'a apprises, rien n'y fait, j'enchaîne les échecs. Têtu, je prends mon élan... et manque mon dunk. Emporté par la rage que je ressens, je balance mon ballon contre le sol et le rebond le fait atterrir sur le capot de ma voiture. S'en est trop. Dépité, je récupère mon ballon et abandonne avant de casser quelque chose ou de me blesser. Il ne manquerait plus que ça, j'ai fait suffisamment de dégâts comme ça pour aujourd'hui. Avec ma carrière, avec ma voiture, avec mon mental...

Avec Kaylee.

Son visage triste me revient en mémoire. Une image que, même en passant mon visage sous le jet de la douche, je ne parviens pas à effacer. Je me suis comporté comme un con. Petite K... La pauvre. Elle a d'abord dû essuyer le rejet de sa sœur, et voilà que je m'en prends à elle juste parce que je suis incapable de gérer mon ex. Ou mes états d'âme. Ou ma vie. Quand l'eau devient froide, je suis encore en train de penser à elle. À ses yeux brillants, à son air à la fois déterminé et apeuré quand j'ai haussé le ton. À sa tenue simple, mais qui la mettait tellement en valeur, à sa silhouette fine et menue. À sa poitrine qui... Foutu téléphone.

Cette interruption me fait reprendre mes esprits et je constate qu'une partie de mon anatomie a été un peu trop réceptive aux images que mon cerveau lui a envoyées. La sonnerie s'arrête, me donnant l'occasion de faire redescendre tout ça sous l'eau désormais gelée.

Après avoir enroulé une serviette autour de ma taille, j'attrape mon téléphone. Deux appels en absence. Ah, je n'ai pas entendu celui de ma mère, mais je n'ai pas la foi de la rappeler maintenant. Je sais que mon père va en profiter pour me parler des sélections pour être titulaire et je ne suis pas encore prêt à lui expliquer que je me suis fait un sale nom auprès d'un recruteur. Par contre Ollis qui m'appelle un vendredi soir après l'entraînement... Ça ne sent pas bon. Ce géant irlandais a obtenu une bourse complète pour venir jouer avec nous, un mec sympa bien qu'un peu chauvin. Curieux de savoir ce qui a pu lui arriver pour qu'il ait besoin de me contacter, je le rappelle.

— Yo Mac, lancé-je quand il décroche à la troisième tonalité. Qu'est-ce qui se passe, tu t'es encore fait kidnapper par un leprechaun ?

— Ahah quel humour mon yankee, c'est arrivé qu'une fois je te signale.

Pas faux. C'était pendant son bizutage. Je sais que techniquement c'est une pratique interdite. Mais les coutumes ont la peau dure, puis pour notre défense, on ne fait jamais rien de méchant ni de dangereux. Enfin rien qui pourrait nous tuer, seulement nous amocher un peu. Dans le cas d'Ollis, le plus petit de l'équipe, c'est-à-dire moi, avait été désigné pour se déguiser en lutin de la Saint-Patrick avant d'enlever le pauvre Irlandais en plein milieu d'un date. Les autres s'étaient chargés de le peindre en vert et de le faire parader sur le campus couvert d'une feuille de trèfle en papier. Puéril ? Oui, mais super drôle par ailleurs.

— Tu veux qu'on parle de ton cas ? réplique-t-il pendant que je me marre en repensant à ce jour.

— Hum.. Non merci ça ira. Bon, si t'es vert du coup qu'est-ce qu'il se passe ?

— Je suis à une fête et y a une fille..

Sautant sur l'occasion de me foutre encore un peu de sa gueule je le coupe.

Broken SistersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant