Chapitre 08

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Élisa jeta un coup d'œil aux feuilles de papier. Ils s'agissaient de notes manuscrites. Une écriture délicate et propre, à l'encre de plume, sillonnait les pages qu'il lui avait données.

La première phrase commençait par la mention : « Cher journal ». La configuration de la pile de papier s'apparentait donc à un journal intime.

— C'est... son journal intime. Tu as retrouvé son journal intime ?

— On peut dire ça, oui. Les affaires non élucidées et les meurtres de familles riches sont populaires parmi les amateurs de crimes. Le massacre des Duveyrier titille ces deux tendances : normal qu'il soit l'objet d'obsession de la part de ces dégénérés. Tu savais qu'ils se revendaient ce genre d'objet sur le marché noir ? Et pour un paquet de billets, en plus.

— Qui est assez fou pour acheter ce genre de chose ?

Li but une gorgée de son chocolat chaud, puis lui offrit un sourire qui fit pulser son aura colorée par l'excitation.

Elle n'arrivait pas à comprendre exactement ce que cela signifiait. Si Li souriait de joie, ou s'il préparait quelques farces machiavéliques. Elle aurait bien voulu acquérir les pouvoirs de son interlocuteur, afin de le prendre à son propre piège.

— Comment réagirais-tu si je te disais que c'est ainsi que je me suis offert cette pièce ? Est-ce que tu prendrais les jambes à ton cou ?

Ah...

C'était donc ça. C'était pour ça que Li ne se renfermait pas sur lui-même. Bien que son chez lui était une bulle de positivité, comme elle, il n'avait pas peur de plonger dans la foule humaine. Si ça ne le dérangeait pas, il s'en délectait sans problème. Ça l'amusait de voir ses congénères se torturer sous le poids de ses questions indiscrètes sans que même le silence ne puisse les protéger.

C'était peut-être pour ça qu'il avait tout ce chemin et tous ses efforts : il ne devait rien avoir de plus divertissant pour un télépathe.

— Je ne te donnerai pas satisfaction. Je ne m'enfuirais pas. Je ne tremblerai pas. Je ne pleurerai pas. Si tu m'as menti pour ma mère, il vaut mieux que je ne gaspille pas mon temps ici.

— Je n'ai pas menti pour ta mère. En fait, tout dépend de toi. Si j'avais été capable de découvrir la vérité par moi-même, je l'aurais fait, parce que je suis autant rongé par la curiosité que toi. Cependant, j'ai une limite ; je ne suis pas un être créatif. J'entends les pensées des autres aussi clairement que s'ils les avaient énoncés avec la bouche. C'est tout.

« C'est tout ? » C'était déjà énorme !

— Toi tu peux absorber les auras émotionnelles des autres, mais pas seulement. Tu te mets tellement dans les baskets des autres que tu es capable de simuler mentalement des interactions sociales avec plusieurs sujets. Quand j'ai lu ton interprétation des personnages dans Harriet Pommier, j'ai compris que tu faisais bien plus que de comprendre l'histoire de l'autrice originale : c'était comme si tu t'étais immergée dans leur monde, et que tu avais pris possession d'eux.

Élisa sursauta.

— Je ne m'attendais pas à ce que tu sois au courant pour ça aussi.

Elle sentit ses joues se charger de pourpre.

— Quand je fais quelque chose, j'aime aller jusqu'au bout. Quoi qu'il en soit, c'est de cette capacité que j'ai besoin. Tu vois où je veux venir, n'est-ce pas ?

Euh... Non ? Elle ne voyait pas de quoi il parlait.

Li se frappa la figure.

— À ton avis, qu'est-ce que tu as entre les mains ? Qu'un simple journal intime ? Ça ne serait pas intéressant pour les fans morbides du marché noir. Ce que tu as entre les mains, c'est la raison pour laquelle ta mère est entre les barreaux aujourd'hui : c'est son témoignage, celui qui accuse ta mère d'être l'instigatrice derrière les meurtres. Derrière ce récit se trouve la vérité de la question dont tu as toujours souhaité la réponse...

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