Chapitre 37

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Élisa se réveilla, secouée par l'homme à la voix grave qu'elle avait entendue dans la falaise.

Ses mèches claires, rebondissant dans tous les sens dans un coin de sa vision, lui permirent de reconnaître qu'elle se trouvait bien dans son corps originel.

— On se réveille ! Merde, mais vous prenez quoi pour être autant shooté ?

Sa tête tournait et lui faisait mal. Au moins, maintenant, elle savait comment arrêter ce tour de manège non sollicité.

— Arrêtez, je vous en prie, je suis réveillée, bon sang ! Qu'est-ce qui vous prend d'employer une telle violence ?

Les secouements s'arrêtèrent.

— La vache, elle parle vraiment comme une riche. C'est un monde complètement différent, pas vrai ?

Élisa prit un peu de temps pour se remettre de son réveil brutal, et accrocha son regard sur des points de repère pour mieux s'y retrouver et comprendre la situation étrange dans laquelle elle s'était retrouvée.

Li était éveillé lui aussi, mais il ne paraissait pas affolé par la présence de l'inconnu dans le salon. Il soufflait en la regardant, et ses épaules détendirent. Depuis combien de temps attendait-il son réveil ?

Bien que celui-ci l'ait méchamment secoué, cela signifiait qu'il ne s'agissait pas d'un fou furieux venu pour lui faire du mal. L'homme la fixait d'un air curieux, les pupilles illuminées par le même éclat qu'avaient les enfants en voyant un animal exotique dans un zoo. Des boucles brunes lui couvraient en partie le visage, et les mains serrant avec tant de force ses épaules scintillaient d'un éclat argenté. Une autre couleur lui tapa l'œil, mais elle n'osa pas bouger ses pupilles pour vérifier : elle avait peur de voir de quoi était constituée cette couleur d'un rouge profond qui accompagnait l'argent des doigts de cet inconnu.

— T'as l'air encore sonnée, petite.

Normal, avec la force employée !

— Enchantée de te rencontrer, Élisa Duveyrier. Je ne pensais pas faire la connaissance d'une gosse, mais je dois admettre que c'est la seule solution qui fait sens. Je comprends tout, maintenant. Enfin, je ne comprends toujours pas ce que vous faisiez inconscient dans le salon, mais hey, chacun sa vie privée.

— Et... Vous ? À qui ai-je l'honneur ?

— À Benoît Lombard. J'ai remué ciel et Terre pour te retrouver. Quelqu'un voulait absolument savoir là où tu te trouvais. En tant que détective privé, je n'ai fait que mon devoir en te retrouvant.

— Élisa ! cria Li. Tu nous es revenu. Dieu soit loué.

Il bouscula l'homme d'un âge moyen pour la prendre par les épaules. Élisa fut prise de court aussi, et court-circuita. Il y avait trop d'informations. Elle ne pouvait pas tous les emmagasiner.

— Li, tu vas bien. Je suis heureuse...

— Tu prenais un temps infini pour revenir. Je pensais t'avoir perdu à jamais. Je m'en suis tellement voulu, tu sais. Désolé de n'avoir pas pu t'accompagner jusqu'à la fin. Qu'est-ce que tu as vu ?

« Qu'est-ce que tu as vu ? »

« Qu'est-ce que tu as vu ? »

« Qu'est-ce que tu as vu ? »

La question était posée avec innocence. Mais la simple formulation de celle-ci la projeta dans des souvenirs de flammes léchant les membres exposés de son corps, des souvenirs de ses jambes pissant le sang alors qu'elle courait pour sa vie. De souvenirs d'une arme fumante, et de la personne qui l'avait en main.

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