Chapitre 31

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Élisa s'échappa des griffes de ce grand monsieur qui lui faisait des avances même pas cachées avec ses gros yeux de nounours.

Elle n'était pas venue ici pour trouver l'amour, mais pour retrouver sa famille.

Elle ne détestait pas Li. Loin de là. Elle l'appréciait énormément. Le problème, c'était qu'elle n'était pas bonne pour lui. Ni pour personne d'autre, d'ailleurs. Elle ne voyait juste pas comment une relation amoureuse pourrait fonctionner avec quelqu'un. Elle était trop bizarre.

« Lui aussi il est trop bizarre, tu sais ! Dit la petite voix dans ta tête qui craque pour lui et qui n'est absolument pas une intrusion télépathique. »

Élisa faillit faire une rupture d'anévrisme. Quel genre de mec pouvait blaguer sur son râteau deux minutes après ?

— Va-t'en sinon je bouillis mon cerveau pour interrompre les interférences.

« Si tu veux, mais même ça ne t'aidera pas. »

— T'es pas censé être en réunion, là, à discuter de crimes sérieux ?

« Ouais, mais c'est pas pareil quand t'es pas là. En plus, je t'entends penser aussi clairement que si tu jouais du violon dans un amphithéâtre vide. Donc c'est beaucoup plus simple qu'en haut, avec tout l'immeuble qui fait du bruit. »

— Je vois. C'est pour ça que tu me harcèles depuis le début.

— C'est ça. Mais avoue que tu apprécies l'attention !

Élisa profita qu'elle fût seule dans les couloirs pour laisser libre cours au volume donné par son agacement :

— Ce que t'es casse-pieds ! Qu'est-ce que tu veux ? Que je m'agenouille tous les jours pour vénérer ta beauté ? Je suis sûre qu'en vrai, t'as juste besoin d'un Albert bis pour prendre soin de tes petits sentiments. Et puis, qui tombe amoureux d'une fille qui lui a dit deux ou trois trucs gentils, il y a quelques dizaines d'heures ?

« C'est absolument pas que pour ça que je t'aime, et en plus, c'est plus un crush qu'autre chose et je l'assume ! Et puis... »

La voix dans sa tête se tut. Ça faisait le même effet que si quelqu'un avec qui l'on discutait raccrochait tout d'un coup.

— Euh... Li ?

Sa voix se nouait à mesure qu'elle parlait. Elle eut du mal à réaliser ce qu'il venait de lui dire.

Et lui aussi devait venir de s'en rendre compte, bien trop tard.

Élisa trotta vers la chambre de sa future maman : l'heure était grave.

Elle ouvrit la porte en grand, et la surprit en train de ricaner toute seule.

— Oh ? Péri, rentre !

— Il vient de dire qu'il m'aime.

Anne-Claude prit un peu de temps avant de comprendre l'ampleur de la nouvelle et de paniquer également.

— Oh mon Dieu, oh mon Dieu ! Viens là, mais qu'est-ce que tu attends ?

Mue par l'intuitive envie d'obéir à sa mère, elle ferma la porte et se précipita sur le lit d'Anne-Claude.

— Alors alors ? Raconte ! Comment est-ce possible qu'après tout ce temps, ce n'est que maintenant qu'il te sort la grande déclaration ? Je veux tout savoir, détail après détail.

C'était assez marrant de se jouer d'Anne-Claude. Enfin, du personnage en papier carton qui jouait son rôle. Elle n'avait aucune idée qu'elle s'immisçait non pas dans la romance de sa cousine de son amoureux, mais dans celui de sa fille, quinze années dans le futur et d'un médium télépathe aux mœurs bizarres.

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