Les joues de Li étaient enflées. Enfin, celle de Henri-Charles. Le corps de Li, lui, devait se trouver intact, au chaud et en sécurité dans le confort du salon richement orné.
Élisa s'était vengée sur ses pauvres joues, et ça avait fonctionné. L'effet de catharsis eut l'effet escompté. Parfois, la violence était la solution.
— Eh bien, tu es plutôt gentille envers quelqu'un qui a fait du mal à ta famille. Tu es sûre que tu n'as pas besoin de plus de coups sur ma personne ? Tu peux y aller, tu sais. Je suis solide.
— Je ne le ferais pas. Premièrement, j'ai besoin de toi vivant. Tu es dans le corps de l'avocat, ce qui est super important pour naviguer dans le monde des adultes en étant légitimes. Si tu venais à disparaître de nouveau, je recommencerais à avoir les mêmes types d'incarnations qu'au début. Je mourrais sans vraiment savoir pourquoi.
La présence, ou plutôt le retour, de l'avocat signifiait que le jeu pouvait se dérouler « normalement ». Elle découvrirait probablement des éléments dont elle ne pouvait pas avoir connaissance jusqu'à maintenant. Preuve en est avec l'affaire Verr'Indus et la mort d'un de leurs salariés. Comment aurait-elle pu obtenir cette pièce du puzzle sans la connaissance de son Li ?
— Et puis, je crois que je te comprends. Moi je chouine alors que ma mère est bien au chaud, entre ses barreaux. Ton père, en revanche... Toi, tu l'as perdu pour de bon. Je pense que je serais devenue un peu folle moi-même si j'étais dans ta situation. Bien que je ressente de la rancœur envers toi pour m'avoir fait subir ce que tu m'as fait subir, je ne peux pas dire que je ne comprends pas ton geste. Attention, je ne l'excuse pas.
Li se releva, puis épousseta son derrière.
— Je te l'avais bien dit, que tu étais anormalement empathique.
— Tu te rends compte que c'est comme si je te disais que tu étais « anormalement télépathique », lui répondit-elle en croisant les bras.
— Pas faux ! D'ailleurs, maintenant que nous avons pu en parler, est-ce que tu te sens prête à écouter mes bobards ?
— Élisa lui fit signe de continuer de parler. Elle se sentait fin prête.
— Ce soir-là, quand j'ai fait ce que j'ai fait, c'était parce que j'ai réalisé quelque chose d'important.
— À quel sujet ?
— Au sujet du coupable. Tu sais, grâce à la télépathie, j'ai pu avoir le privilège de vivre l'évènement à travers toi sans être toi. Ça permet de réfléchir avec recul sur les meurtriers potentiels, le mobile, et sur le mode opératoire. Tu te souviens de tes suspects potentiels ? Tu les as basés sur le fait qu'ils survivent ou non aux massacres.
— Oui, c'est comme ça que j'ai réfléchi. Après tout, une victime ne peut pas tuer, n'est-ce pas ? J'ai donc utilisé la technique des survivants. Comme je ne te voyais jamais, je me suis mis à penser que c'était toi. Mais ce n'est plus possible. J'ai cru que ça devait être Virginie parce que je n'avais jamais vu son corps dans la première incarnation. Mais elle s'est fait tuer à la seconde. Olivier a été suspect tout le long de mon séjour, mais j'ai vu son corps de mes propres yeux.
— Tu n'as donc aucune piste. Aucune preuve sur laquelle te baser, aucune personne qui serait capable de commettre le crime.
Élisa secoua la tête.
— C'est trop dur. Je ne sais pas si je vais y arriver. Est-ce possible que l'assassin change à chaque fois ? Et que ce qu'il s'est passé en 2007 dans notre monde n'est que le résultat de cette roulette russe mortelle ? Dans ce cas, je n'ai aucune manière de savoir l'ordre des meurtres à ce moment-là. Il n'y a que Maman qui pourrait nous éclairer dessus. Mais elle refuse catégoriquement de parler de ce qu'il s'est passé ce jour-là. À ce rythme, elle va... Elle va...
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Nos dernières heures
Mistero / ThrillerSuite à l'accusation de sa mère pour le meurtre sanglant et impuni de toute sa famille, une empathe de 15 ans enquête en incarnant l'une des victimes. Elle obtient ainsi son témoignage perdu et ressent tout des dernières heures de son existence : se...