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Ce matin, alors qu'elle ouvre son café, Maryline est particulièrement surexcitée. Non pas qu'il y ait des clients, son établissement est désespérément vide. À part deux ou trois personnes qui commandent rapidement un café à emporter et ne restent donc que quelques minutes... Ce n'est pas du tout ce qu'elle avait imaginé. Dans son esprit, le café Cat's Eye devait être un lieu où chacun voudrait prendre son temps, s'asseoir, discuter, se sentir bien dans ce décor de manga. Elle ne comprend pas ce qui ne fonctionne pas. Ce n'est pas faute de publicité. Elle a même eu droit à des articles dans les journaux et des passages à la radio. Mais aucun de ces éléments de communication n'a réussi à attirer une véritable clientèle, fidèle. Le vieux café qui n'est qu'à quelques mètres et qui n'a pas été rénové depuis les années soixante a lui, au moins, ses piliers de bar. Ce n'est pas très reluisant, mais il y a de la vie, et des entrées d'argent. Elle était presque désespérée, jusqu'à aujourd'hui.

– Quentin ! Oh quel joli costume.

– Je, euh...

– Allez, on entre dans la peau de nos personnages. Quand tu travailles ici, tu m'appelles Tam.

David en a déjà marre, mais sans doute qu'il y a pire comme job.

– À part la coiffure, je dois dire que c'est pas mal.

– Tes cheveux vont vite repousser. Viens, je vais te montrer comment préparer le café à la façon Cat's Eye.

David observe les deux globes en verre de la cafetière à dépression.

– Au centre, c'est le filtre. La partie basse, c'est la boule, la haute la tulipe.

– D'accord.

– D'abord tu remplis la boule avec de l'eau. Tu déposes le filtre et au-dessus le café. Je l'achète dans une boutique qui n'est pas très loin, j'adore y passer du temps, c'est tellement bon l'odeur de café torréfié.

– Où tu places la flamme ?

– Ah, je sais, je sais, j'aurais dû pousser l'exactitude jusqu'à utiliser un brûleur à gaz, comme dans le manga. Mais aujourd'hui, ces cafetières sont aussi en version électrique. Je préfère, j'ai un peu peur des incendies.

– Je comprends.

– Mais ça n'enlève rien au goût.

David en doute, il a déjà expérimenté le breuvage.

– Quand ça chauffe, l'eau monte. Il faut tout couper quand il ne reste plus qu'un fond dans la boule et ensuite, tu as juste à laisser le café redescendre. Tu ôtes la tulipe et tu sers.

– C'est rapide ?

– Une dizaine de minutes.

Ensemble, ils regardent l'eau monter lentement. Maryline coupe le courant et ils observent le café redescendre.

– Tu as souvent des compliments sur ton café ?

– Non, pas vraiment, pourtant j'ai reproduit la technique que l'on voit dans le manga. Si on excepte l'utilisation de l'électricité à la place du gaz.

– Si je me souviens bien, on voit toujours la cafetière en action, il n'y a pas de scène dans laquelle l'une des trois sœurs montre la préparation.

– C'est vrai. Mais j'ai fait venir cette petite machine du Japon et je suis les recommandations à la lettre, les gens ne peuvent qu'adorer.

– Ils en redemandent ?

– La plupart des clients, je ne les vois qu'une fois.

– D'accord, Mary... Tam. Ne prends pas mal ce que je vais te dire, mais ton café est à gerber.

Près de minuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant