Les prunelles émeraude de Scarlett s'écarquillèrent en voyant celui qui se trouvait devant elle. Ses vêtements étaient tachés de sang et de nombreuses ecchymoses étaient apparues çà et là sur son corps. Cependant, même si elle en était inquiète, il était en vie. Et c'était la seule chose qui comptait à ses yeux.
— Theodor... souffla-t-elle, au bord des larmes.
Elle avait beau avoir une confiance absolue en lui, le laisser seul en compagnie de ceux qui faisaient partie des plus forts de l'organisation terroriste lui avait fait énormément de mal.
— Je... tu...
Un léger sourire naquit sur les lèvres du lieutenant-colonel.
— Je suis là. Tout va bien maintenant.
Il s'approcha d'elle et posa une main sur ses cheveux. Scarlett essuya rapidement les larmes qui avaient coulé, une expression de joie sur son visage.
— Tu m'as retrouvée...
Elle alla poser son front contre son épaule. La petite dizaine de soldats qui l'accompagnait était dans son dos, mais elle ne voulait pas s'en préoccuper. Pas maintenant.
— Je te retrouverai toujours, Scarlett.
La générale ne répondit rien, et se contenta simplement de passer ses bras dans le dos de celui qu'elle aimait tant. Jamais elle ne lui serait assez reconnaissante de tout ce qu'il avait fait pour elle. Jamais elle ne le remercierait assez pour toutes les fois où il l'avait sauvée. Cependant à cet instant, un seul mot franchit la barrière de ses lèvres :
— Merci...
— Je n'ai pas envie de perdre ou d'abandonner la seule personne qui a su se frayer un chemin jusqu'à mon cœur. Si c'était à refaire, je n'hésiterai pas une seule seconde.
Scarlett plongea son visage dans le creux de l'épaule de Theodor, tentant de cacher les larmes qui étaient apparues dans ses yeux. La peur de le perdre, la joie de le retrouver, le bonheur que ses mots avaient fait naître, toutes ces émotions fortes avaient finalement eu raison d'elle. Ils restèrent un instant ainsi, savourant chacun la présence de l'autre.
— Je suis heureuse que tu sois là, murmura Scarlett en s'écartant.
La réponse de Theodor se lisait dans son regard : ses yeux avaient pris une lueur de douceur et de tendresse. Un sourire apaisé et aimant était né sur ses lèvres.
— Bon retour parmi nous, lieutenant-colonel.
Il répondit par un rapide hochement de la tête.
— Je ne pouvais pas désobéir aux ordres de ma générale.
Même si leur relation avait reprit leur aspect professionnel, la manière dont ils se regardaient en disait long sur la véritable nature de leur lien. Scarlett eut un sourire. Elle se retourna pour faire face aux soldats qui l'attendaient derrière elle.
— Vous êtes prêts ?
— Toujours, ma générale !
— Parfait. Allons-y.
Ils se mirent à marcher, tandis que Scarlett et Theodor échangeaient à voix basse.
— ‹‹ Quand les éléments seront rassemblés, la Purge sera ›› ?
— Je suppose que cette Purge fait référence à une transmutation. Rassembler les éléments... c'est le rôle d'un alchimiste...
— Les renégats ?
— Très probable. C'est les seuls alchimistes directement sous la direction du gouvernement.
— Une Purge... le but d'une purge est de purifier. Mais de purifier qui de quoi ?
— Je l'ignore, mais connaissant les agissements du gouvernement, c'est certain que ça concerne la population.
— Vous pensez donc que le rôle des alchimistes est de réaliser une transmutation pour purifier le peuple ?
— Si on suit le fil logique de notre réflexion... oui, c'est à peu près ça.
Theodor poussa un long soupir.
— J'ai comme le sentiment que les problèmes qui nous accaparent viennent de s'aggraver d'un coup...
— C'est partagé...
— Vous avez découvert autre chose ? A part l'homoncule et la phrase.
— Pour l'instant, non, rien du tout. J'espère que tout ce mystère autour de la phrase va s'éclaircir rapidement, car j'ai l'impression que c'est le début de quelque chose de bien plus grave. Oser réaliser une transmutation sur tout un peuple... C'est une prouesse que même l'alchimiste le plus téméraire ne tenterait même pas...
— Je suis du même avis. La transmutation humaine est tellement dangereuse qu'elle en a été prohibée...
— Et si ce n'était pas dangereux ?
— Comment ça ?
— Je me demandais si les transmutations humaines n'avaient été interdites pour pouvoir permettre aux renégats d'être justement hors la loi. Si ce n'était pas un coup monté...
Si Theodor parut surpris au début, son regard s'assombrit presque aussitôt.
— Je vois ce que vous voulez dire... Je ne sais quoi penser...
Scarlett poussa un long soupir et posa une main sur l'épaule du lieutenant-colonel, plus se rassurer elle-même que lui. Il la regarda, une lueur de compassion dans les yeux.
— Nous y arriverons. Nous devons y arriver.
Theodor hocha la tête en silence. Le visage de Scarlett était peint de plusieurs émotions, mais la plus présente était la détermination. Certes, elle vivait dans la peur constante de perdre ses hommes, son espoir, sa propre vie. Néanmoins, s'il y avait bien une chose qui lui permettait de s'accrocher chaque jour, c'était bien l'amour. Qu'il vienne de celui qu'elle avait pour sa défunte sœur, qu'il vienne de celui que Theodor avait pour elle, pour Scarlett, ça revenait au même. Elle avait besoin de ressentir ces émotions pour avancer. Elle avait besoin de savoir que quoi qu'il arrive, il y avait quelqu'un près d'elle pour la soutenir dans sa quête. Elle aimait à dire qu'elle n'avait besoin de personne pour faire tout ce qu'elle faisait, mais... la réalité était tout autre. Sans Alizarine, sans Theodor, sans Juliet, elle aurait certainement déjà abandonné cette course si endurante.
— La route est encore longue, mais la lumière au fond du tunnel n'est pas loin.
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Engrenages Sanglants I : Soldats De Cuivre
Science FictionChalkos, 1964. Depuis de nombreux siècles maintenant, les villes sillonnent les terres, montées sur leurs roues ou leurs ailes. L'ancien si puissant Royaume-Uni n'est plus que quatre contrées où proies et prédateurs se poursuivent. Devenue une dicta...