Chapitre 28

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Eleanor se figea en aperçevant les chimères juste devant elle.

— Juste pour être certaine. On peut pas fuir, on est d'accord ?

— On doit se battre, murmura Clementine. On ne peut pas y échapper maintenant.

— Tu m'en vois ravie.

Eleanor dégaina son fusil, pendant que Clementine sortait ses pistolets. Elles s'approchèrent. Se mirent dos à dos. Les chimères les encerclèrent en grondant et en montrant leurs crocs acérés. La Chasseuse déglutit avec difficulté et raffermit sa prise sur son arme. Pourtant, les chimères n'attaquaient pas. Elles restaient à un distance respectueuse. Clementine plissa les yeux.

— Il y a des alchimistes, murmura la mécanicienne.

Elle promena son regard dans le couloir, mais était incapable de distinguer quoi que ce soit dans la semi-obscurité derrière les chimères.

— Reculez, résonna une voix.

Il eut un instant de silence, et les créatures obéirent, tandis que leurs mouvements faisaient craquer leurs os et crisser leurs griffes sur le sol en un bruit désagréable. Trois silhouettes encapuchonnées de noir traversèrent la marée de chimères qui s'écartait au fur et à mesure qu'elles approchaient.

— Je suis surpris que vous n'avez pas attaqué... Venant de soldats, j'aurais pensé que serez les premiers à engager le combat.

— Ça tombe bien, parce qu'on n'est pas soldates.

— Ah non ? Je ne pense pas que c'est pour enfiler des perles que vous traînez avec l'armée.

Son ton était méprisant et son aversion pour l'armée y transparaissait clairement. Eleanor leva un sourcil amusé.

— Venant de quelqu'un qui travaille pour le gouvernement, c'est culotté.

— Nous ne sommes pas à la solde de ces chiens de guerre.

— Ce n'est pas les corps des opposants politiques qui se balancent dans vos caves qui vont vous donner raison, rétorqua Clementine.

Eleanor frémit en repensant à ce souvenir encore trop frais dans son esprit. Le silence qui suivit la déclaration de la mécanicienne fut sans équivoque.

— Comment vous...

— Comme quoi être à la solde de ces « chiens de guerre » comme vous dites peut être utile.

Eleanor releva son fusil pour le pointer sur le petit groupe d'alchimistes, qui paraissaient livides, même dans l'obscurité. Ils reculèrent et firent un léger mouvement de la main pour appeler leurs chimères. Cette fois, ce fut Eleanor qui fit quelques pas en arrière.

— Occupe-toi des chimères. Je me charge des alchimistes.

Ces derniers commençaient à se glisser derrière leurs créatures pour se protéger. Eleanor remit son fusil sur son épaule pour dégainer des poignards et des poings américains. Une violente flamme sortit soudain du bracelet de plomb de Clementine. Comme hypnotisées, les chimères s'approchèrent du feu.

— Des chimères de feu... Vous devez être bien inquiets pour en créer...

— On n'est jamais trop prudents...

Eleanor ne comprenait absolument rien de l'échange et ce qu'il venait de se passer. Néanmoins, s'il y avait bien une chose dont elle était certaine, c'était que les alchimistes devant elle devraient être neutralisés. Ils n'avait pas l'air de grands guerriers, mais mieux valait de pas se fier aux apparences. Et à juste titre, car l'instant d'après, une lame passa en sifflant près de son oreille. Elle grimaça en sentant une brûlure au niveau de son hélix. Lorsqu'elle toucha la zone sensible, elle sentit un liquide chaud sur ses doigts. Eleanor lança à son tour son arme, qui vint se ficher dans le bras d'un des alchimistes. Elle profita d'un instant d'inattention pour se ruer sur lui et chercha à l'assommer à l'aide de ses poings américains.

Du sang giclait autour d'elle, mais elle s'en fichait.

Son adversaire hurlait, mais elle s'en fichait.

Deux mains l'écartèrent soudain de son ennemi. Elle se débattit en hurlant. Son coude cogna quelque chose de mou et un liquide poisseux coula sur ses vêtements. Un cri de douleur accompagna son action et l'étau autour d'elle se resserra. Eleanor sentait ses forces la quitter petit à petit. Bientôt, une seule pensée occupa son esprit.

Elle allait mourir.

— Non, murmura-t-elle dans un souffle. Pas maintenant... non...

Elle ne voulait pas mourir.

Elle ne voulait pas faire face à la terrifiante mort.

Quand elle fermait les yeux, elle pouvait la voir, elle, juste devant elle. La Mort, habillée de haillons noirs, tenant une faux entre ses mains. Elle ne voyait pas son visage, mais imaginait son maléfique sourire.

— Eleanor ! hurla soudain Clementine en se débattant parmi les chimères.

Elle brandit le dernier morceau brûlant de son bracelet qui commençait à fondre et le lança sur l'alchimiste qui tenait fermement Eleanor. À l'instant même où le métal le heurta, l'alchimiste relâcha la Chasseuse en hurlant et s'enfuit dans les couloirs, en maudissant Clementine entre plusieurs cris. Ses chimères, en voyant leur maître quitter les lieux, firent de même, en poussant des cris perçants et dissonants.

Eleanor se releva doucement, touchant avec prudence les ecchymoses sur son corps. Le troisième et dernier alchimiste la regardait avec une expression indéfinissable, dans laquelle se mêlait haine, colère, peur et dégoût.

— Amène-toi, souffla-t-elle en lui jetant un regard empli de défi.

Engrenages Sanglants I : Soldats De CuivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant