Chapitre 14

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Eleanor fixa d'un air peu convaincu la cathédrale.

— Donc c'est là dedans qu'on va ?

— En effet, sourit Juliet en ouvrant la porte.

— Puis-je poser une question, ma chère colonel ?

— Mais avec grand plaisir, jeune Chasseuse.

— J'ai le droit de dire que cet endroit est vachement inquiétant quand même et que j'ai que moyenemment confiance ?

— Tu viens de le dire, Eleanor.

Juliet soupira.

— Désolée, chérie, mais tu n'auras pas d'autres choix que de venir.

— Vous m'en voyez ravie, colonel.

Elle sourit et entra dans la cathétrale. Elle fit exactement le même trajet que quelques jours plus tôt et s'accroupit devant l'autel. Elle laissa glisser ses doigts sur la pierre, et un passage s'ouvrit quelques secondes plus tard, dévoilant des escaliers s'enfonçant dans l'obscurité.

— Oh génial. Oh j'adore. Franchement vous me régalez.

— Pennington, tu ferais mieux de te dépêcher. Je crains le pire.

Quelque chose dans l'expression et le ton de Juliet acheva de convaincre Eleanor. Elle n'ajouta rien, et prit son courage à deux mains et commença à descendre prudemment les marches derrière Juliet et Clementine. Tout le trajet se fit dans un silence pesant, où transpirait la peur.

— Colonel, qu'avez-vous découvert ? murmura Clementine, en rompant le silence.

— Ce que j'imaginais s'est finalement produit. Nous pensions tous que c'était impossible, étant donné l'absence d'indices, mais les faits sont là. Les indices sont là. Je ne préfère pas vous en parler maintenant. Disons que la mission vient de se compliquer d'un coup. Cependant, rassurez-vous. Tout est sous contrôle. Tout est sous contrôle...

Quelque chose dans le ton de Juliet fit penser qu'elle essayait de se convaincre elle-même plutôt que Clementine. Cette dernière ne souleva pas sa remarque, comprenant que la colonel avait raisonné de la même façon.

— Quoi qu'il en soit, il est hors de question que nous abandonnions pour de simples problèmes. Enfin, celui-ci est loin d'être petit mais je suppose que je me suis faite comprendre.

Clementine hocha la tête. Son regard passa au-dessus de son épaule pour accrocher celui d'Eleanor. La Chasseuse était que très peu à l'aise dans un endroit aussi sombre et renfermé.

— Tout va bien, Pennington ?

— Disons qu'être sous terre n'est pas mon activité favorite. C'est... oppressant.

Juliet poussa un petit soupir.

— Tu ferais mieux de t'y habituer dès maintenant. C'est exactement le mot qui définit tout ce que nous allons affronter lors de cette mission. Oppressant.

— Vous m'en voyez ravie, colonel.

— Tout le plaisir est pour moi, Pennington.

Eleanor leva les yeux aux ciel pendant que Clementine ricanait silencieusement. Elle s'attira le regard noir de Juliet qui l'observait avec un air exaspéré.

— Un problème, colonel ?

— Si vous pouviez vous comporter correctement, je suppose qu'il n'y aurait pas de problème, marmonna l'intéressée.

Malgré son ton sec, Clementine sentit que la colonel s'était attachée à elles. Un regard en direction d'Eleanor lui apprit que la Chasseuse pensait la même chose. Son visage était teinté de chagrin et de nostalgie. Ses yeux reflétaient un sentiment d'espoir qu'elle effaça aussitôt en voyant que Clementine l'observait.

— Quoi ? lâcha Eleanor d'un ton plus bourru qu'elle ne l'aurait voulu.

— Rien, rien.

La Chasseuse eut un air peu convaincu, mais n'insista pas. Son regard quitta le visage malicieux de Clementine pour aller se poser sur Juliet. La présence de la jeune femme lui faisait étonnamment chaud au cœur, comme si elle l'apaisait, la rassurait. Bien qu'elle sentait que l'armée ne lui disait pas l'entière vérité, elle croyait en Juliet et elle faisait sincèrement et profondément confiance à la colonel. C'était une étrange sensation qui avait fait sa place dans son cœur, comme un baume, une caresse. Elle avait la sensation d'avoir découvert un nouveau sentiment ; celui d'avoir une sœur. Et c'était un sentiment loin d'être désagréable. Elle sentit ses épaules se détendre et son dos se relâcher. Une léger sourire naquit sur ses lèvres pendant qu'elle continuait à descendre les marches.

— Bon ça va encore durer longtemps ? ronchonna Clementine dont la patience commençait à atteindre ses limites.

— Si j'avais été au courant, je me serais faite une joie de te le dire, Hazard. Malheureusement, je ne possède pas cette information. Alors si tu pouvais arrêter de te plaindre, ça nous ferait du bien à tous.

Le malicieux regard de Juliet tranchait avec la dureté de ses mots, même si sa mâchoire crispée et ses lèvres serrées démontraient un véritable agacement.

Quelques minutes plus tard, elles atteignirent enfin le bas des escaliers, et heureusement. La bougie que tenait Juliet commençait à faiblir, comme si l'espoir de vaincre s'amenuisait, en même temps que le reflet d'hilarité dans les yeux de Juliet.

— La première qui fait qulque chose de stupide, je la brûle vive, prévint la colonel.

— Je suis trop effrayée, là...

— Plus sérieusement, reprit Juliet. La réussite de cette mission est capitale. Même si elle n'est pas complètement menée à bien, tant que nous pouvons obtenir un minimum d'informations tout en restant vivantes, c'est une victoire.

Juliet ouvrit d'un coup la porte en pierre avant de se stopper net en voyant le spectacle qui s'ouvrait à ses yeux.

Engrenages Sanglants I : Soldats De CuivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant