Rentrées bredouilles de leur exploration, Eleanor et Clementine étaient assises dans un des salons du zeppelin. La Chercheuse regardait fixement les fragments de cercle qu'elle avait dessiné, comme si elle pouvait soutirer des réponses avec la seule force de son regard. Elle poussa un long soupir, se rendant compte qu'elle essayait encore de faire face à un problème qui la dépassait de loin.
— On va rentrer à Copperhelm, soupira Eleanor. On a rien d'autre à faire de toute manière.
— Je pensais que tu voulais mettre autant de distance que possible entre toi et Scarlett, objecta Clementine.
— Ça fait une semaine. Elle doit certainement être partie, contra Eleanor, qui ne semblait même pas croire à ses propres paroles. Je veux juste pouvoir dormir et étudier ça à tête reposée. Et puis il faut bien que je gagne ma vie. C'est pas en restant à côté de ruines que mon porte-monnaie va se remplir...
— Tu marques un point... Rentrons alors. Eleanor se leva pour aller rejoindre le poste de pilotage, Clementine et Gyere sur ses talons.
Même si la présence de la mécanicienne lui plaisait plus qu'à leur rencontre, elle n'aimait pas confier le co-pilotage de son zeppelin à une autre personne qu'à Gyere. Le droïde, malgré son ancienneté, restait une entité digne de confiance et Eleanor s'appuyait sur lui depuis longtemps. Elle aimait beaucoup Clementine et si elle avait eu une petite sœur, elle la traiterait exactement de la même manière qu'elle. Son cœur s'était très certainement attendri, mais elle avait réussi à se convaincre que c'était pour le meilleur. Apprendre à s'appuyer sur les autres, apprendre à accepter ses erreurs, c'était aussi une preuve de force et surtout de courage. De longues heures de trajet silencieux plus tard, le zeppelin atterrit sur une plateforme de Copperhelm, qui avait stoppé son déplacement. Une ville qui s'arrêtait pouvait signifier deux choses ; un problème technique ou la prise en charge par l'armée. Eleanor avait de suite compris la raison pour laquelle Copperhelm s'était arrêtée. L'unité de la générale Ambrose était toujours en stationnement. Deux semaines avaient passé depuis que la Chercheuse et Clementine avaient fui précipitamment la ville. Quoi que Scarlett était venue chercher, elle ne l'avait pas trouvé La dirigeante de la section de la police alchimique l'armée était pourtant réputée pour être une espionne hors par. Ici, son apparent échec faisait tâche à sa réputation. Mais quand Eleanor posa un pied dans le centre-ville de Copperhelm, elle en comprit la raison. D'ordinaire, les rues étaient animées, éclats de rire et de voix résonnaient entre les bâtiments. Les marchands présentaient leurs produits aux passants, pendant que les épices dégageaient leur exquis parfums qui se perdaient parmi les délicates senteurs de la nature environnante. L'animation avait laissé place à un ténébreux silence et seuls les grincements des bâtisses coupaient ce calme trop plat. Comme si toute la vie de la ville avait été aspirée. Il n'y avait pas âme qui vive.
Une main gantée de noir se posa brutalement sur l'épaule d'Eleanor, qui sursauta violemment. Quand elle se retourna, elle découvrit une femme portant l'uniforme caractéristique de l'escouade de Scarlett. Son visage était caché par une capuche mais Eleanor sentait tout de même le menaçant regard de la soldate.
— Eleanor Pennington je présume ? Vous allez venir avec moi. N'essayez pas de résister, vous ne fera pas le poids de toute manière.Eleanor voulait rétorquer mais en sentant la poigne se resserrer, elle préféra faire profil bas.
— Vous êtes qui au juste ? grinça Clementine en faisant sursauter Eleanor qui avait oublié sa présence.
— Je suis au service de la générale Ambrose. Pour l'instant, c'est tout ce que vous devez savoir.
— Qu'est-ce qui s'est passé ici ? questionna Eleanor, voulant en savoir plus sur l'accalmie qui avait touché sa ville.
La soldate posa sur elle un visage aux émotions indéfinissables. Le vent souffla dans la fine rue, faisant flotter un instant la capuche de la jeune femme. Eleanor croisa quelques secondes un œil gris pâle qui scintillait d'une lueur mi-chagrinée, mi-courroucée.
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Engrenages Sanglants I : Soldats De Cuivre
Science-FictionChalkos, 1964. Depuis de nombreux siècles maintenant, les villes sillonnent les terres, montées sur leurs roues ou leurs ailes. L'ancien si puissant Royaume-Uni n'est plus que quatre contrées où proies et prédateurs se poursuivent. Devenue une dicta...