Chapitre 8 : Sombre secret

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 Sur le chemin qui séparait la cabane du camping-car, Sidney se remémorait cette soirée. Pour la toute première fois, elle avait laissé sa carapace se fissurer. Juste un petit peu. Et, même si elle ne l'avouera jamais, ce contact réconfortant lui avait fait le plus grand bien.

Elle n'était pas habituée aux contacts physiques délicats. Sa mère était partie depuis bien longtemps et elle ne parvenait pas à se souvenir de la dernière fois où son père l'avait prise tendrement dans ses bras.

Elle aperçut au loin la lumière du camping-car et, plus elle s'en approchait, plus l'envie de faire demi-tour lui plaisait. Elle s'imaginait courir à en perdre haleine pour se blottir à nouveau contre son ami. Peut-être même qu'il pourrait lui jouer un morceau de guitare en guise de berceuse. Ou alors tout simplement il lui tiendrait la main le temps qu'elle s'endorme à nouveau. Quoi qu'il en soit, il serait là pour éloigner les mauvais rêves.

Mais elle ne pouvait pas faire demi-tour, elle ne pouvait pas faire peser sur les épaules d'Eddie ce trop lourd fardeau. Elle ne pouvait pas lui confier son sombre secret.

Il ne lui restait que deux mois à tenir, deux mois avant qu'Eddie ne parte vivre sa vie. Il méritait de partir l'esprit léger.

— Pourvu qu'il ne soit pas là, pensa Sidney en poussant la porte du camping-car.

Son père n'était pas là. Elle se dirigea directement vers sa chambre, enfila une tenue plus confortable et se plongea dans son lit.

Une heure ou deux s'étaient écoulées quand Sid fut réveillée en sursaut. Son père était rentré et le faisait savoir au monde entier.

— Sidney?! Sidney, tu es réapparue ?

Sidney se leva et avança vers la cuisine. Elle y trouva son père, totalement ivre.
— Je suis là papa. Ne crie pas s'il te plait.

— Sidney, ma fille chérie. Celle qui préfère passer sa journée d'anniversaire seule dans la forêt plutôt que chez elle avec son père.

— Papa...

— A moins que tu n'étais pas seule. Bien sûr que tu n'étais pas seule ! Tu es bien comme ta salope de mère.

Sidney n'eut pas le temps de répondre que son père lui asséna une gifle si violente qu'elle fut projetée sur le sol.

— Allez lève-toi ! Ne recommence pas ton cinéma.

Daniel releva sa fille en la tirant par le bras et lui agrippa le visage, lui enfonçant ses doigts, à l'odeur de tabac froid, dans les joues :

— Quand je te regarde c'est elle que je vois. Tu as les mêmes yeux qu'elle, putain.

— Papa, je t'en prie, lâche-moi, tu me fais mal !

Son père commença par relâcher la pression de ses doigts, laissant Sidney faire un pas en arrière.

— Je ne suis pas le méchant, Sidney ! C'est toi qui est partie !

— Tu m'as demandé de partir. Tu disais que tu n'avais pas besoin de moi.

— Tu as raison, je n'ai pas besoin de toi.

Daniel se rapprocha de sa fille à nouveau et la saisit par les cheveux.

— Personne n'aura jamais besoin de toi, Sidney Brown. Tu n'es qu'une traînée sans importance. C'est pour ça que personne ne pourra t'aimer.

Sidney avait beau avoir déjà entendu ces mots, elle ressentait toujours la même chose quand son père les prononçait : d'abord la sensation d'un poignard enfoncé sans ménagement dans son abdomen, puis celle de son coeur qui se brisait en des milliers d'éclats, et enfin celle d'une boule grandissante dans sa gorge lui coupant totalement le souffle.

Un flot de larmes coula de manière incontrôlable le long de ses joues. Des larmes de tristesse, des larmes de frustration, des larmes de douleur intense.

— Ne pleure pas Sid, tout ça c'est de ta faute ! Lança Daniel en resserrant le poing sur la chevelure de sa propre fille.

Il la dévisagea avec dégoût et, dans un mouvement d'une extrême violence, explosa le visage de sa fille contre le plan de travail. 

The Freak and I, ou fan-fiction sur Eddie MunsonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant