Lexa - Chapitre 7

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LEXA


Mon corps las se faisait ballotter de gauche à droite au fil des pas de mon destrier, qui suivait le même rythme que la roulotte d'Héloyse. Depuis notre départ de la ville, un silence s'était installé entre nous. Ma joie retombée avait fait place à l'appréhension. Cette femme acceptait de nous apporter son aide, en dépit du long voyage que cela représentait.

— Tu as sauvé la vie de cette petite fille aujourd'hui. Et tu leur as permis d'entrevoir un avenir plus lumineux.

— Je n'ai rien changé à leur situation, je les ai simplement obligés de divulguer leur plus lourd secret, la rectifiai-je.

— Justement, si tu n'avais pas obligé cette femme à me parler, sa fille n'aurait pas survécu plus de quelques années et je n'aurais pas pu les aider à partir de cette exploitation.

— Elle travaille donc dans une exploitation agricole...mais en quoi cela a-t-il un lien avec leur maltraitance ?

— Cette femme a perdu son mari il y a quelques mois, soupira-t-elle, emporté par la maladie. Il travaillait dans une banque prestigieuse à Midown, lui assurant un bon salaire et une vie confortable pour sa famille. Seulement à sa disparition, sa femme s'est aperçue qu'il n'avait rien mis de côté, et qu'ils vivaient à crédit. Ils sont donc venus tout reprendre, et elles se sont retrouvées à la rue.

— Personne ne les a aidés ?

— Qu'auraient-ils eu à gagner en retour ? Elles n'avaient plus un sou, la mère n'avait jamais travaillé de sa vie et impossible de se remarier avec une fillette de dix ans.

— C'est horrible, murmurai-je en revoyant leur visage triste et fatigué.

— Seulement elles n'étaient pas au bout de leur calvaire, tout s'est empiré quand elles ont fait la rencontre de Monsieur Otis, le maitre de l'exploitation agricole. Il leur a promis un travail, un toit et le couvert. C'est quelques semaines suivant leur embauche qu'elles sont venus me voir. En cherchant ce qui arrivait à la petite, j'ai appris tout ce qui leur était arrivé. J'ai d'abord pensé que c'était le traumatisme d'avoir perdu son père, puis sa maison. Mais en réalité, c'était à cause de cet homme-là. J'avais déjà remarqué les marques sur la mère, elle m'avait expliqué que c'était à cause de son nouveau travail. Sans son accord pour l'ausculter, j'avais dû renoncé, mais j'ai toujours eu de gros doutes les concernant.

— Pourquoi ne sont-elles pas parties ?

— Comment auraient-elles pu ? soupira Héloyse en se frottant la joue. Vivre dans la rue est parfois bien plus dangereux, surtout pour nous, que de vivre sous un toit avec les coups d'un seul homme à supporter.

— Et vous pensez pourvoir les aider à partir ? Comment allez-vous faire ? Il ne m'a pas semblé que vous ayez les moyens de leur offrir un toit...

— Nous serions effectivement trop à l'étroit dans ma roulotte, me lança-t-elle avec une pointe d'humour. Un ancien patient a une blanchisserie et il me doit un service, je vais lui demander de les employer. Ce n'est pas le plus reposant des boulots, mais je suis certaine qu'il a besoin de petites mains pour les lessives et le ménage. C'est un homme convenable, très doux avec sa famille. En plus de ça, il loue quelques chambres à l'étage du bâtiment, peut-être pourra-t-il leur trouver une place.

Je hochais la tête, rassurée. Tout semblait enfin s'arranger pour elles, si l'on imaginait cela possible de se remettre d'un tel traumatisme. Je leur souhaitai de pouvoir se reconstruire après tout ça.

L'ombre d'un loupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant