De retour dans ma voiture, il me faut près de 10 minutes avant de pouvoir allumer le contact. Mon esprit est embrumé comme lorsque l'on se réveille d'un cauchemar. Mais là, c'est bien réel. Je n'aurais jamais pensé qu'il irait si loin. Bon sang, qui peut faire une chose pareille ?!
Quand je suis sortie de l'appartement, c'est là que la douleur fut la plus forte. Je m'étais imaginé que ce serait au contraire le plus beau moment de la matinée, celui où je dirais enfin au revoir à ce pan de ma vie. Au lieu de ça, ce fut un des plus horribles. Sur l'échelle des crasses que l'univers m'as faites, il s'est hissé directement à la seconde place. Il ne dépasse pas le père de Théa car, disons-le franchement, c'est LA plus horrible des choses qui me soit arrivée. Se faire abandonner en pleine grossesse, je ne le souhaite même pas à mon pire ennemi.
La nervosité est si forte qu'un puissant rire sort de ma bouche. C'est si grotesque ! Moi qui voulais simplement reprendre ma vie en main en quittant Jérôme... Eh bien, c'est une sacrée remise à zéro que l'on m'a offerte. Au sens littéral. Je m'en serais volontiers passé.
Je n'ai donc plus de vêtements hormis ceux que je porte. Plus de livres et plus aucun album photos non plus. J'espère que le karma s'occupera bien de lui. La lèpre, une invasion de rats dans son appartement ou tiens, une attaque d'alien qui vient pour le kidnapper ! Oui je sais, je suis bizarre. Mais putain, cette enflure le mérite !
Colleen est partie avec les affaires que j'ai pu récupérer pour Théa. Finalement, une seule voiture suffit... Je crois qu'elle a compris que j'ai besoin de temps avant de rentrer chez elle. Je tape du poing plusieurs fois sur mon volant, la rage au ventre. Comment est-ce que j'ai pu tomber amoureuse d'un homme comme Jérôme ? Et encore, je ne pense pas qu'on puisse appeler cela de l'amour.
Moi qui pensais avoir enfin découvert ce que c'était... Je secoue la tête en me pinçant les lèvres tout en essayant de réprimer mon envie de frapper mon volant de nouveau. De toute évidence, l'amour ne veut pas de moi !
L'heure sur le tableau de bord m'indique que la matinée est déjà terminée. Le déjeuner approche et j'ai une faim de loup. Avant de démarrer, j'envoie un message à Colleen qui s'est déjà insérée dans la circulation parisienne :
Pauline : Je vais aller me chercher un truc à manger. Ne m'attends pas, je rejoins Théo juste après à la boulangerie du centre commercial. Enfin j'espère, toujours aucune réponse. Bisous
L'idée même que je puisse revoir Théo dans quelques heures me réchauffe instantanément le cœur. Depuis que l'on s'est retrouvée, je commence à réaliser que sa présence dans ma vie me manquer cruellement. La vie nous offre une deuxième chance en nous remettons chacun sur le chemin de l'autre. Et cette fois-ci, je ne compte pas le laisser filer.
De nouveau, je consulte mon téléphone sans espoir. J'ouvre la conversation avec Théo qui ne contient que mon message. Et là, je découvre que la petite pastille où se trouve sa photo de profil est en dessous de mon message. Autrement dit, il l'a lu ! Je n'en reviens pas, si bien que je reste bloqué sur l'écran de mon téléphone une ou deux minutes.
Je ne me formalise pas du fait qu'il ne m'est pas donné de réponse, il n'a peut-être pas eu le temps. De toute façon, ce n'est pas le plus important. Un franc sourire étire mes lèvres alors que je braque pour sortir de mon créneau, impatiente d'être de nouveau avec lui. J'occulte volontairement de mon esprit le fait qu'il décide de ne pas me rejoindre. C'est la seule chose qui m'empêchera de m'effondrer aujourd'hui.
Après une salade plus que douteuse acheter au centre commercial, je me dépêche de l'engloutir assise dans ma voiture. J'ai hésité à déjeuner directement à la boulangerie, mais je ne voudrais pas que Théo arrive alors que je suis en train de dévorer un repas. Je serais trop mal à l'aise.
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De l'autre côté de la rue
RomanceAprès un retour de course, Pauline est bouleversée en rentrant chez elle. Elle n'arrive pas à le croire : Théo, son meilleur ami du lycée, est SDF. Elle l'a reconnu devant le magasin, en train de mendier. Même 15 ans après, elle n'a pas oublié comme...