Chapitre 8

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Il est là.

Je ne peux expliquer comment je le sais. Je suis encore à quelques kilomètres du supermarché, pourtant j'ai la certitude qu'il sera là, planté sur son trottoir et sa pancarte de travers.

A mesure que la voiture avance, l'appréhension grimpe dans mon ventre. Maintenant que nous avons renoué contact, je doute qu'il accepte un sac de course, si petit soit-il. Même en sachant cela, j'ai hâte de le revoir.

Je n'aurais jamais pensé dire ça, mais cette semaine sans nouvelle de Théo fut incroyablement longue. A chaque repas, je me demandais s'il avait de quoi manger. A chaque douche, je me demandais s'il avait l'occasion de se laver. Et chaque soir, je priais pour qu'il ait un toit au-dessus de sa tête, au moins pour la nuit. Chaque jour, mes pensées n'ont cessé de dériver vers lui. D'ailleurs, je n'ai jamais autant surveillé la météo que durant ces dernières semaines.

Je m'engage sur le pont qui m'offre une vue directe sur le parking du supermarché. Je jette un œil au rond-point situé juste avant. Pour l'instant, aucune trace de lui. Je ne m'en fais pas, je fais confiance à mon instinct. Je sais qu'il est là.

Aujourd'hui, les voitures se bousculent pour se rendre au magasin. Le rond-point est bondé et je peine à m'y engager. Lorsque j'y arrive enfin, je lâche un soupir qui, me semble-t-il, est rester bloquer en mois durant une semaine.

Droit comme un piquet, Théo se tient un peu plus loin que la dernière fois. Il s'est rapproché du magasin, sans pour autant dépasser la limite du parking. Il est vêtu de la même façon que lors de notre café. Soudain, mon cœur s'emballe comme si je venais de passer la ligne d'arrivée du marathon de Paris et je ne peux refréner le sourire qui s'affiche sur mes lèvres. Lorsque je le dépasse avec ma voiture, je comprends qu'il ne m'a pas remarqué. En même temps, difficile pour lui d'y arriver alors qu'il se trouve de l'autre côté de la chaussée.

Je tourne un moment sur le parking du magasin, ce qui commence à m'énerver. Je soupire et me mords la lèvre. Hors de question qu'il soit déjà parti lorsque nous aurons fini nos courses. Il faut qu'il soit toujours là. J'ai besoin de savoir qu'il va bien.

Je trouve enfin une place et me dépêche de m'y insérer. Je défais rapidement ma ceinture et pose un pied à terre en demandant à Théa de sortir de la voiture. Ma fille semble trifouiller quelque chose à côté d'elle et je fronce les sourcils en me demandant ce qu'elle fabrique.

— Allez Théa, dépêche-toi !

Je sais que je ne devrais pas la brusquer, mais c'est plus fort que moi. Les minutes défilent.

— Deux minutes maman, dit-elle en fourrant quelque chose dans son sac à dos panda.

— On peut savoir ce que tu faisais ? Je lui demande lorsqu'elle daigne enfin ouvrir sa portière.

— Rien.

Je la connais par cœur. J'esquisse un sourire, sachant pertinemment que ce n'est pas vrai.

Les rayons du magasin sont bondés. C'est à croire que la ville entière à décider de se rendre au magasin maintenant. L'idée même que je vais patienter un moment aux caisses me donne le tournis. Il y a tellement de monde que je peine parfois à zigzaguer dans les rayons avec mon caddie.

En revanche, ça ne dérange absolument pas Théa. Au contraire, je dois la stopper à plusieurs reprises pour éviter qu'elle ne bouscule des gens. J'essaie de la freiner, mais elle trop excitée à l'idée d'aller chercher ses gâteaux dinosaures pour « le monsieur du rond-point ».

Quelques allées plus loin, Théa me demande si elle peut lui prendre aussi des chips. Je n'ai pas le cœur à lui refuser, alors je hoche la tête, en précisant qu'elle ne prenne qu'un paquet.

De l'autre côté de la rueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant