Je récupère les assiettes vides sur les tables abandonnées par les récents clients, tandis que mon frère ne me lâche pas d'une semelle.
— Essaie au moins de lui parler. Écoute ce qu'il a à t'dire, insiste-t-il.
— À quoi tu joues, Thomas ? Tu le défends maintenant ?
— Je sais reconnaître quand j'ai tort et puis... Bordel! Tu marches trop vite, ralentis.
J'accélère encore le pas, dans le but d'essouffler mon jumeau et de lui faire abandonner sa tentative de recoller les morceaux avec son menteur de pote.
— Morales est un gars sérieux.
— Estéban, articulé-je.
— Je... je t'ai fait croire le contraire et je m'en excuse.
— On ne s'excuse pas tout seul, tu devrais le savoir. Il sait que tu es là ? demandé-je soudain inquiète qu'il ne débarque ici.
— Non, je suis ici de ma propre initiative. Il bosse.
— Le pompier qui venait de m'inviter était mignon et tu m'as cassé mon coup !
— Tu aurais bégayé pendant dix minutes avant de lui dire que tu es désolée, mais que tu as quelqu'un. Tu es flippée et c'est de ma faute. Je t'ai rendu service avec l'autre gars, réitère-t-il.
Thomas a raison. Je ne suis pas à l'aise avec les hommes en général. C'est pour ça que l'expérience était parfaite pour moi. Même si j'appréhendais la première rencontre, je sais que nous aurions déjà passé l'étape de la connaissance et c'était plus rassurant. Ce que je ne savais pas c'est que mon interlocuteur n'était autre que le mec que j'ai dragué ouvertement pour le faire virer par mon frère. Oh ! Il a dû bien rire, Morales.
— Merci Thomas d'être passé, mais tu diras à Estéban que je ne compte pas le revoir. Jamais. C'est clair ?
— J'vais pisser, mais notre conversation n'est pas terminée, Sis'.
Sur ces mots, mon jumeau disparaît dans les toilettes. De mon côté, je décide d'aller me cacher en cuisine. Colette a peut-être besoin d'aide.
Je pousse les portes battantes et prends une grande inspiration. Une odeur de souffre embaume la pièce. Colette s'arme de son chalumeau à crème anglaise.
— Colette, non !
Mais la mamie, à moitié sourde, n'arrête pas son geste et presse le bouton. L'explosion qui en résulte me projette violemment à plusieurs mètres, écrasant mon corps contre le mur. La force dévastatrice de l'explosion pulvérise tout sur son passage, envoie des débris volants dans toutes les directions. La fuite de gaz s'est transformée en un cataclysme imprévisible et le bruit assourdissant de l'explosion emplit mes oreilles : je suis désorientée et étourdie.
En quelques secondes à peine, le chaos règne. Les flammes jaillissent, engloutissent tout dans leur sillage. La chaleur intense de l'incendie brûle ma peau et m'empêche de respirer aisément. La pression de l'explosion a également provoqué des dégâts structurels : quelques parties du bâtiment s'effondrent.
Les sirènes retentissent et le temps s'étire alors que je lutte pour reprendre mes esprits. Je tente de me relever, mais réalise que ma jambe droite est paralysée ; un bout de la charpente écrase mon membre. Je pousse le morceau de bois de toutes mes forces, mais il ne bouge pas d'un poil. Je suis épuisée. Dans un état de panique, je jette un œil autour de moi, à la recherche de Colette, mais aucune réponse ne me parvient.
Je commence à suffoquer alors je me couche pour récupérer un peu d'air respirable. Mes yeux brûlent, j'ai chaud, terriblement chaud. Je ferme mes paupières. J'ai beau pleurer, mes larmes s'évaporent instantanément dans cette fournaise. Je ne sais pas combien de temps je reste ainsi, allongée sur le sol, entourée par les flammes ardentes. J'espère que je vais mourir étouffée et non brûlée vive : ma plus grande peur.
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The science of love
Romance♥️🧪📱🇨🇵 Parisienne et pâtissière hors pair, Juliette n'aime pas les fioritures et encore moins se mettre en avant. Sa vie se résume à lire dans son canapé, à regarder des films romantiques et à manger avec son jumeau, Thomas. Cependant il lui ma...