Un Pion, qui n'avait pas entendu Louise entrer, ne put s'empêcher de tressaillir lorsqu'il tourna la tête et qu'il l'a vit, immobile, le regard si noir qu'il se demanda comment il pouvait être encore en vie, lorsqu'elle détourna ses yeux des siens. La seconde après s'être remis de sa surprise, elle fut à cinq centimètres de son visage, les yeux à nouveau plantés au plus profond de son regard. Il n'eut pas le temps de dégainer son épée, la brune fut bien trop rapide.
Un poignard, surgit de nulle part, caressa sa clavicule. Un geyser de sang s'échappa de la blessure hideuse, et éclaboussa la joue de Louise. Elle n'en prit pas compte et tournoya dans les airs, une jambe fléchie, et l'autre tendue. Son pied percuta de plein fouet le deuxième Pion, qui avait sortit son épée. La puissance du coup le tua instantanément.
Le Cavalier noir, qui avait entendu les gémissements, le son d'une épée qu'on sort de son fourreau et une grande inspiration mesurée, ne s'était pas retourné. Mais, lorsqu'il entendit un deuxième bruit sourd résonner à ses pieds, il tourna la tête.
-Louise... chuchota Mathieu, l'inquiétude perçant dans sa voix.
Louise, à à peine un mètre de son ennemi, s'étonna de pouvoir voir le visage du Cavalier. La dernière fois, il portait un casque qui couvrait l'intégralité de son visage. Elle détailla avec curiosité le profil du Cavalier, sans aucune discrétion. Il avait la peau hâlée, une barbe de plusieurs jours, un nez droit, des yeux bleus glacials et un bordel capillaire noir. Le désordre de ses cheveux bouclés pourrait sembler enfantin, mais son visage contrastait trop avec le sérieux et les traits durs de son visage. Louise lui donna une vingtaine d'années, à peine.
Le Cavalier, qui n'adressa pas un regard à la personne qui avait tuée ses deux Pions, sourit. Il savait parfaitement de qui il s'agissait.
-Comme on se retrouve ! Je t'ai manqué ? railla-t-il.
Louise ne répondit pas, mais avança d'un pas. La réaction du Cavalier fut immédiate. Plus vif qu'un cobra, il fut derrière Mathieu en un rien de temps, un poignard appuyé contre la gorge de ce dernier.
-À ta place, je n'avancerais pas plus.
Mathieu, qui avait la tête renversée en arrière, était dans l'incapacité totale de bouger. L'humiliation de s'être fait prendre ainsi au dépourvu devant sa sœur lui fit monter le rouge aux joues. Il serra les dents et regarda au loin, incapable de regarder sa sœur.
Mais Louise ne le regardait pas. Ses yeux noirs rivés aux yeux bleus du Cavalier, elle ricana avec mépris.
-Tu n'as pas changé, à ce que je vois. Toujours aussi lâche. Tu continues à te cacher lorsque tu te retrouves face à un adversaire, persifla-t-elle.
Les mâchoires du Cavalier se serrèrent. Il poussa Mathieu sans ménagement, de telle sorte que le jeune homme trébucha sur quelques mètres avant de retrouver son équilibre.
Malgré la souffrance à l'abdomen qu'éprouvait Mathieu, il n'y prêta pas attention et attrapa le tisonnier qui se trouvait à coter de la cheminée devant laquelle il avait atterris. Il attaqua le Cavalier, mais ce dernier ne se laissa pas prendre par surprise et esquiva le coup pourtant parfait de Mathieu.
Louise regarda son frère attaquer une nouvelle fois sans broncher. Mais, lorsqu'elle vit une large tâche foncée sur le t-shirt gris de Mathieu, elle cria :
-Stop ! Mathieu !
Le Cavalier, qui s'était contenté d'esquiver jusqu'à présent, ne profita pas du lâchement d'attention de Mathieu, mais s'arrêta de bouger lorsqu'il vit le jeune homme baisser son tisonnier. Les deux garçons tournèrent les yeux vers Louise en même temps, l'un d'un regard inquiet, et l'autre d'un regard las. Mathieu, souffrant atrocement, vit le sol tourner brusquement. Ses paupières s'affaissèrent, et il tomba à terre.
Louise voulut se précipiter vers lui, mais le Cavalier se plaça devant le corps du brun.
Louise leva les yeux vers celui-ci, et articula distinctement :
-Vous me cherchiez, non ? Laissez mon frère en dehors de tout ça.
-C'est lui qui a attaqué le premier, rétorqua le Cavalier.
-Vous l'avez cherché.
Le Cavalier ferma la bouche. Il soutint le regard de la jeune brune sans effort, et haussa finalement les épaules.
-Je dois vous amener au Roi, dit-il finalement.
Louise sourit avec arrogance.
-Vous n'imaginez quand même pas qu'on va vous y suivre bien gentiment ?
-Oh, non, pas du tout. Je n'avais jamais pensé pouvoir vous embarquer avec la soi disant "aide" de ces pitoyables Pions, cracha le Cavalier en regardant les corps de ses soldats.
Le sourire de Louise s'évanouit aussitôt. Un souvenir, que le combat lui avait permis d'oublier l'espace d'un instant, refit surface.
-C'est vous qui donnez les ordres à ces Pions, n'est-ce pas ?
Le Cavalier fronça les sourcils en voyant Louise avancer d'un pas menaçant.
-En effet. Où veux-tu en venir ?
-J'ai vu l'un de vos soldats dehors. Il s'est attaqué à une femme. Une femme qui ne cherchait qu'à fuir avec son enfant. Il l'a fait tomber. L'enfant, qu'elle avait pourtant protégé du mieux qu'elle le pouvait, s'est tapé la tête contre une pierre. Il est mort. Le Pion a attaqué ces gens innocents sous vos ordres. Alors, qui est le plus pitoyable ? Vous, ou vos Pions ?
Louise était si près du Cavalier qu'elle pouvait sentir son odeur de cuir mélangée à la fumée. Le Cavalier, imperturbable, ne cilla pas, malgré la flamme inquiétante qui valsait dans les yeux de la sauvage.
Il n'avait jamais ordonné à ses Pions de tuer des villageois. Trouver la brune, par tous les moyens possible. C'était cela, son ordre. Ces imbéciles l'avaient-ils mal interprété ? Les mâchoires du Cavalier se serrèrent.
-Vous avez tué cet enfant. Vous avez tué cette femme, en tuant son enfant. Vous avez détruit ce village ! Vous êtes responsable de tout ! hurla Louise, qui termina sa phrase d'une voix suraiguë, à cause du tumulte de ses émotions.
Un Pion était entré dans la maison à pas de loup en entendant la voix de Louise. Celle-ci aurait pu l'entendre, si elle n'avait pas été aussi assourdie par son cœur qui battait à ses oreilles. Il battait si fort qu'elle était quasiment sûre que le Cavalier pouvait l'entendre.
-Vous êtes un monstre ! Un monstre ! reprit Louise en pointant un doigt accusateur sur le torse du Cavalier. Vous n'êtes qu'un pauvre chien qui obéit à son maître les yeux fermés !
Ce fut la phrase de trop. Les yeux bleus jusque là calme du Cavalier s'incendièrent brusquement, et il empoigna le bras de Louise avec force. Le Pion, qui avait été rejoint pas un de ses compagnons, attrapa l'autre bras de Louise, l'empêchant de faire le moindre mouvement. La jeune fille leva sa jambe, mais son geste fut stoppé par l'autre Pion, qui se jeta à terre pour entourer ses jambes à l'aide de ses puissants bras.
Louise poussa un grognement en tentant de se libérer, mais rien n'y fit. Si les Pions n'étaient pas des as au combat, ils étaient indubitablement forts.
Le Cavalier noir attrapa le menton de Louise d'une main, et l'obligea à lever la tête.
-Ne dis plus jamais ça, siffla-t-il entre ses dents. Je ne suis sous les ordres de personne, et encore moins un chien. J'emmerde ce Royaume et son Roi ! Alors, petite idiote, lorsqu'on ne sait rien, on se tait. Pigé ?
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Condamnée.
Teen FictionQue feriez-vous, si l'on vous reprochait d'être venu au monde ? Si la société dans laquelle vous viviez vous privait de votre liberté ? Si votre vie ne se résumait qu'à une fuite perpétuelle ? "-Et toi, qu'est-ce qu'on te reproche ? La jeune fille j...