Chapitre 18

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— Je sais...

Ces quelques mots franchirent la barrière de ses lèvres craquelées en un souffle à peine audible, mais qui parvint tout de même aux oreilles de Karl qui la dévisagea les sourcils froncés. Un nouveau rictus amer lui répondit avant que les paupières lourdes d'Isabelle ne se ferment en raison de la fatigue qui envahissait son corps au fur et à mesure que le poison se frayait un chemin dans son sang. Le souffle de la jeune femme se faisait de plus en plus court, alarmant le tueur à gage qui héla son ami. Ce dernier se hâta de rappeler les troupes et de ramener le médecin auprès de la jeune femme. Tout se fit en silence sans pour autant être fait dans le calme. La tension qui se trouvait dans la pièce était insoutenable.

Le médecin observa attentivement la patiente avant de jeter un regard navré vers les deux hommes qui comprirent immédiatement. Avec retenue, David sortit de sa poche un drap et prit soin de recouvrir partiellement le corps de plus en plus froid d'Isabelle. Il regarda Karl d'un air neutre puis fit signe aux hommes de le suivre en remarquant que son ami ne semblait pas dans son assiette. Il s'approcha de lui tandis que la femme était transportée avec soin vers les véhicules.

— Ce n'est pas de ta faute, mais de la sienne. Si elle n'avait pas tant voulu n'en faire qu'à sa tête, elle serait toujours en vie. Bien qu'elle ne soit pas encore décédée.

Les paroles de David étaient dépourvues de compassion et d'émotions, elles ne faisaient qu'exprimer la réalité de la situation dans laquelle ils se trouvaient. Seulement, Karl ne s'en contentait pas. Il ne parvenait pas à l'accepter. Pourtant, lui qui côtoyait la mort de très près, il était touché de ne pas avoir pu empêcher ce destin fatal de se produire. Il voyait néanmoins un point positif à sa situation. Il avait reconnu la signature de l'individu qui était responsable de ce kidnapping. Un de ses anciens camarades de l'armée. Cela avait été un de ses nombreux jeux dans l'exécution des Juifs. Leur faire croire qu'ils avaient une porte de sortie. Karl avait toujours détesté cette manière de faire, mais n'avait pu y mettre fin puisque leur ordre était de faire leur travail le plus rapidement possible. Il secoua la tête en retirant ses idées de son esprit, il y repensera plus tard.

— Je pense bien au contraire que cela est en partie ma faute, commença-t-il en observant la civière disparaître dans une des voitures. J'aurais dû être plus convaincant, être moins certain qu'elle finirait par apprendre de ses erreurs.

David émit un petit rire sarcastique en repensant aux éléments qu'il avait trouvés la concernant.

— Je ne pense pas que c'était son genre, Karl, répondit-il en plaçant ses mains derrière son dos en se remémorant le caractère bien trempé de la jeune femme.

Soucieux, Karl entra dans la voiture en compagnie de son ami, toujours avec la même expression fermée.

— Saurais-tu par le plus grand des hasards ce que cachait Isabelle ? demanda l'homme en dardant un regard pesant sur son associé qui se trémoussait soudainement à l'énonciation de cette question.

— Hum... J'ai en effet eu accès à quelques détails la concernant, débuta David, la voix tremblante. Depuis que nous la connaissions, elle était à la recherche d'un groupe de personnes qui semble-t-il ont été responsables de l'assassinat de son petit frère lors de la Seconde Guerre mondiale en Pologne. D'après ce que j'ai compris des autorités qui m'ont renseignées, elle a fait plusieurs demandes afin d'obtenir le nom des personnes enrôlées dans ce groupe. Je pense d'ailleurs qu'elle a obtenu gain de cause puisque son enlèvement ne doit pas être le fruit du hasard. Elle a sûrement dû fouiner un peu trop loin, ce qui a fait venir les ennuis à elle.

Le petit monologue de David confirma ses doutes sur la courte phrase qu'Isabelle avait prononcée juste avant de tomber dans l'inconscient. Elle savait. Un pincement lui prit le cœur quand il pensa à son expression lorsqu'elle lui avait dit ces quelques mots avant de sombrer. Il ne pouvait pourtant pas lui en vouloir. Il aurait réagi pareillement. Une voix interrompit ses pensées, s'adressant à David dans la radio.

Un Soleil brisé Où les histoires vivent. Découvrez maintenant