Épisode 24 - L'effet miroir

9 1 0
                                    


Valentina retira délicatement sa main de la poignée de la porte du salon  qu'elle  venait de refermer. Puis elle se tourna à demi de manière à  épier leur  conversation. Elle n'avait pas remarqué la présence de  Vladimir. Le  vampire était adossé au mur mitoyen.

— Ce n'est pas bien d'écouter des conversations auxquelles tu n'es pas conviée.

Elle sursauta et rougit honteusement. Il s'approcha d'elle et elle sentit immédiatement son cœur s'emballer dans sa poitrine.

— Alors comme ça, tu ne veux plus rien avoir à faire avec moi, chuchota-t-il en la sondant.

Elle leva ses yeux vers les siens. Ils étaient gris et ombrageux comme un  ciel d'orage.  Ils se dévisagèrent silencieusement, observant l'ambivalence des émotions qui les traversait l'un l'autre. Valentina le détestait pour  tout ce que le vampire lui avait fait subir et en même temps, elle était  irrésistiblement attirée par lui.

Pourtant, elle se rendait  compte que la nature de son trouble avait déjà changé. Ce n'était plus  aussi franc que les premières fois qu'elle l'avait croisé.  S'habituait-elle déjà au pouvoir d'emprise que le vampire exerçait sur  elle ? Le combat entre sa raison et ses émotions s'équilibrait et n'en  devenait paradoxalement que plus violent.

Contrairement à ce que  Vladimir semblait penser, elle résistait de mieux en mieux à son charme.  Alors qu'elle se faisait ces réflexions à elle-même, approfondissant  encore le regard qu'elle posait sur lui, elle sentit un espace se  déployer en elle, tel un miroir.

Intriguée par cette apparition,  elle se concentra dessus et se rendit compte que les yeux du vampire s'y  reflétaient. Les nuages qui les ombrageaient une minute auparavant se  dispersèrent et elle se retrouva propulsée dans une séquence  étourdissantes d'images appartenant visiblement au passé.

Elle se  retrouva d'abord dans un château fortifié cantonné de tours en  encorbellement. Une femme d'un âge avancé, aux traits durs, montait un  escalier en colimaçon modestement éclairé.

Elle portait une robe  de velours rouge-bordeaux, surplombée d'un long voile à guimpe maintenu  par une couronne dorée sertie de joyaux rouges et verts indiquant qu'il  s'agissait peut-être d'une reine.

Dans l'une des quatre tours du  château, une salle de torture séquestrait une dizaine de personnes de  tout âge et sexe. Les pauvres gens hurlaient de douleur sous le joug  d'appareillages tous plus abjects les uns que les autres lesquels  étaient activés par un homme grand et tout gringalet qui n'était autre  que l'amant de la reine.

La reine avait un petit atelier attenant  dans lequel elle pratiquait des expériences, mélangeant toutes sortes  d'éléments et liquides aux couleurs et textures douteuses auxquels elle  mélangeait du sang frais qu'elle prélevait directement sur les  infortunés martyrs. Elle consignait les recettes dans un grimoire aux  pages irrégulières et jaunies.

Son écriture était à peine  lisible. Elle le rangeait derrière dans une boîte rangée derrière des  pierres qu'elle déplaçait à chaque fois. Elle l'observa faire et refaire  son breuvage, et à le tester sur ses prisonniers les plus véloces qui  mourraient tous dans d'atroces souffrances.

Parmi les victimes de  ses expériences, elle aperçut Hector en train d'absorber de force  l'écœurant mélange puis se tordre de douleur sous le regard impassible  de la terrible reine.

Alors qu'elle venait de quitter la tour,  elle aperçut une silhouette tapie dans l'ombre. Il s'agissait d'une  jeune femme apprêtée et coiffée d'une crépinette qui profita d'être  seule pour libérer le pauvre Hector agonisant.

Valentina et les vampiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant