Chapitre 44 - Un piège grossier

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Vladimir et Valentina se fixaient silencieusement.

— Tu doutes... se risqua-t-il.

Elle commença à vouloir articuler quelque chose, mais les mots ne parvinrent pas à franchir ses lèvres.

— Je te comprends... Je ne sais pas quoi dire. Tu dois avoir raison... Tu ne connais pas nos adversaires et ce dont ils sont capables.

Une lueur aiguë s'alluma dans les prunelles de l'inquisitrice. Puis elle baissa les yeux. Elle se sentait perdue et seule. Ses parents lui manquaient. Son cœur se comprima de désespoir en pensant à eux, à ce que les vampires leur faisaient peut-être subir.

— Ils vont mourir n'est-ce pas ?

— Tu m'as déjà posé cette question et je te répondrai tout aussi franchement. j'ai bien peur qu'ils ne survivent pas... Aux yeux des héritiers, tes parents ne sont que de vulgaires appâts. Les êtres humains ont rarement de l'importance pour les vampires, et pour eux ils ne représentent que de vulgaires sacs de sang...

Des larmes se mirent à rouler le long de ses joues. Vladimir en prit conscience au moment où elles s'écrasèrent lourdement sur la housse de couette.

— Je ferai tout ce que je peux pour les sauver... sanglota-t-elle, hors d'haleine.

— C'est exactement ce qu'ils attendent de toi. Ils manipulent tes émotions. Je ne dis pas qu'elles ne sont pas légitimes pour une humaine. Mais une inquisitrice n'a pas le droit de laisser prise à  ces sentiments. Tu représentes l'ultime espoir de la race humaine. Sans inquisitrice, le monde vampire n'a pas de limite.

— Je ne pourrai jamais les abandonner. C'est trop dur, lui opposa-t-elle, la voix étranglée dans sa gorge.

Vladimir ne répondit pas tout de suite.

— Ce que je veux te dire, c'est que d'expérience, aucune inquisitrice n'a retrouvé ses proches indemnes.

— Arrête... Je ne suis pas prête à en entendre davantage.

Il s'arrêta de parler et la regarda longuement.

— Je te laisse dormir... Il fait encore nuit. Tu dois te reposer.

— ... ne pars pas... j'ai peur.

— Hector t'a préparé quelque chose. Tu pourras dormir sans rêve. Tu seras hors d'atteinte. Je reste le temps que tu t'endormes, mais je t'assure que tu ne crains rien...

— Je ne veux pas rester seule... s'il te plaît... Ta présence me rassure...

Il la regarda, un air mystérieux se dessinant sur son visage. Il accepta.

— Merci.

Le vampire se leva, cherchant une chaise du regard.

— Reste près de moi...

— ... Tu es sûre ?

Valentina se mordit la lèvre inférieure en grimaçant. Puis elle fit un mouvement affirmatif gêné de la tête. il déglutit.

— Je t'avoue que je suis un peu surpris...

— S'il te plaît. J'ai vraiment... J'arriverai pas à m'endormir toute seule...

Face à la mine dubitative de Vladimir, les yeux de Valentina bleuirent. Un accent triste traversa les prunelles cendrées du vampire.

— Tu actives ton pouvoir sur moi, sourit-il amèrement. Tu n'en as pas besoin. Je t'ai dit que je restais.

— Je le fais pas exprès...

Indéchiffrable, le regard du vampire se perdit dans les reflets iridescents des yeux de l'inquisitrice. Il s'allongea à distance d'elle, s'adossant à deux épais coussins. L'inquisitrice avala la boisson et ne tarda pas à se rendormir sous la vigilance du vampire. Il l'observa longuement, attentif au rythme de sa poitrine qui se soulevait et s'abaissait paisiblement. Il se laissait hypnotiser par la régularité des pulsations de son sang. Les prochains jours allaient être éprouvants. Il fallait absolument qu'elle prenne des forces. Après qu'elle se soit endormie, il ne tarda pas à quitter la chambre. Il descendit, interrompant la conversation entre Éloïse, Ophélie et Hector.

— Vous arrêtez de parler... je vous gêne ? ironisa-t-il.

— On n'était pas sûr que ce soit toi... réagit Hector.

— Joseph arrivera demain matin. Il a été pris en filature aujourd'hui. Il suit le protocole pour s'assurer d'être débarrassé de ses poursuivants. Quant à Tristan, il affirme que le manoir n'est toujours pas repéré. Je t'avoue que personnellement, j'en doute...

Le portable d'Ophélie n'arrêtait pas de vibrer. Elle le prit en main et blêmit en le consultant.

— C'est Tristan. Le père de Valentina a été retrouvé. Il veut voir sa fille... Il réclame de lui parler seul à seul. Je l'appelle...

Elle activa le retour d'appel sur son téléphone.

— Tristan, je mets le haut-parleur. Nous sommes tous là...

— Comme je le disais à Ophé, le père de l'inquisitrice a été retrouvé près du palais des héritiers. Il est confus et n'arrête pas de dire qu'il s'est échappé, qu'il lui reste peu de temps et qu'il doit parler seul à seul avec sa fille. Il est paniqué. Qu'est-ce qu'on fait ?

Ils se regardèrent, se sondant les uns les autres.

— Belle contrattaque, réagit Vladimir, l'air préoccupé. Si on refuse, Valentina le saura et nous en voudra. On perdra sa confiance... Et si on accepte, ils auront un moyen de pression sur elle.

— En somme, on est coincés. C'est bien joué... C'est tout à fait leur signature. Ils sont toujours aussi tordus, poursuivît Éloïse.

— C'est un piège, soupira Hector en s'avançant lentement les mains dans le dos vers la large fenêtre donnant sur la mer. Ils jouent avec nous... ajouta-t-il sombrement. Le tout est maintenant de deviner ce qu'ils mijotent...

— Valentina n'est vraiment pas prête à se confronter à eux... s'inquiéta Ophélie.

— Je le sais. Je te rappelle qu'il n'est pas question de l'exposer, ce serait criminel... Ce qui devrait nous inquiéter, c'est qu'ils savent que nous ne prendrons pas de risque. C'est pour ça qu'ils envoient son père. Ils cherchent à la contraindre à venir et à se manifester. Ils l'envoient parce qu'ils sont sûrs d'eux, intervint Vladimir.

— Ils cherchent à saper la relation de confiance que nous avons établie avec elle, soupira Hector, avec une pointe de fatalisme. Il n'y a rien d'inattendu. Valentina est intelligente. Elle ne tombera pas dans un piège aussi grossier.

Valentina entendait tout. Adossée à la porte, elle écoutait la conversation. Décidément, elle appréciait de plus en plus Hector.

— Par le passé, les inquisitrices nous ont montré qu'elles pouvaient se laisser abuser. Regarde ce qu'est devenu Sophia, lui opposa Vladimir.

— Elle n'est pas comme les autres. Je choisis de lui faire confiance. Elle ne cesse de nous surprendre. L'erreur serait d'agir dans son dos. Vous savez ce qu'il en a coûté à la cause par le passé, reprit Hector froidement en se tournant vers lui.

— Tu veux la pousser dans leur piège ? s'indigna Éloïse. Tu la crois vraiment capable de résister à leur perfidie ?

— Je veux qu'elle fasse partie de l'équipe, trancha-t-il avant de quitter le salon.

Le silence s'installa dans le salon.

— Tu peux descendre Valentina, fit Vladimir en serrant ses mâchoires.

Vêtue de sa nuisette, les cheveux ébouriffés, Valentina s'avança dans les escaliers. Elle fixait Éloïse avec une telle colère que cette dernière baissa les yeux. Ophélie et Vladimir se regardèrent surpris.

— Je vous ordonne de m'amener mon père immédiatement.

Elle les dardait l'un après l'autre, son regard luminescent les faisant reculer un à un.

— Valentina... commença Éloïse penaude.

— Appelle-moi Inquisitrice ! Vous la vouliez, elle est sous vos yeux. Je vous ordonne d'acheminer mon père jusqu'à moi sans attendre.

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À samedi prochain...

B. 🖤

Valentina et les vampiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant