Tout n'est qu'illusion. Inspire. Reprends-toi Valentina. expire. Ne pas douter. Inspire.
Elle saisit brusquement son pendentif d'inquisitrice qui pendait autour de son cou. Elle pressa la pierre entre la pulpe de ses doigts. Elle la sentait palpiter. Elle ferma ses paupières. Tout n'est qu'illusions. Elle les ouvrit, priant intérieurement pour que les frères Tréguier aient disparu et que ce cauchemar se soit évanoui. Quelle horreur ! Vladimir et Hector gisaient inconscients à ses pieds. Effondrée, Ophélie pleurait sans larmes.
— Qu'est-ce qui se passe ? Ophélie !
Cette dernière était si dévastée qu'elle ne répondait pas. L'inquisitrice se pressa auprès de Vladimir avec l'intention de le ranimer. C'est à cet instant que Joseph fit son apparition. Catastrophé, il porta ses mains à sa tête.
— Que s'est-il passé ? Qu'as-tu fait ?
Valentina le fixait, pétrifiée. Il se reprit aussi sec.
— C'est pas le moment d'en discuter. On doit quitter l'entrepôt sur le champ. La cache est compromise, déclara-t-il.
— Mais comment ? répliqua Valentina.
— Tu peux les ranimer. Concentre-toi. Ophélie ! On a besoin de toi ! Ce n'est pas le moment de les pleurer. Ils ne sont pas morts... Enfin, je crois... Où est Éloïse ? On a besoin d'elle. Bon sang ! Quel bazar !
Il prit son portable. Ophélie n'osa pas même lever les yeux vers l'érudit pour lui répondre.
— Elle nous a trahis. Elle est avec eux, confia-t-elle d'une voix écorchée.
Sous le choc de cette révélation, l'érudit échappa son vieux téléphone qui faillit s'écraser sur le sol. Valentina avait eu le réflexe de le rattraper. Elle le lui tendit sans rien dire. Il tapota le numéro en regardant tour à tour la vampire et l'inquisitrice.
— Tristan, on a besoin d'être exfiltrés. Effet immédiat... Ok.
Il fonça vers une cellule latérale, ouvrit la porte et en tira un brancard qui grinça en roulant.
— Aidez-moi à les mettre dessus.
Telles deux automates, Ophélie et Valentina s'exécutèrent. Elles hissèrent les deux corps sur la civière.
— L'ascenseur ! ordonna-t-il en pointant un recoin que Valentina n'avait pas remarqué.
Elle s'y précipita et appuya sur le bouton.
— Ophélie ! Attrape ! l'enjoignit-il en lui lançant une mitraillette dans les bras.
La vampire l'empoigna et enfila la bandoulière pour libérer ses mains. Dans le même temps, Joseph poussait le brancard vers les portes métalliques qui s'entrebâillaient déjà. Alors qu'ils entraient, des bruits de pas précipités résonnèrent à l'entrée du couloir. L'une des roues du brancards s'était bloquée dans l'interstice et Joseph poussait de toutes ses forces pour que ce fichu brancard rentre avant que les autres ne les rattrapent et qu'ils soient perdus. À l'angle du recoin, un groupe de vampires fit son apparition. Gauvin et Tugdual se trouvaient en tête. Derrière eux, Éloïse et une vampire qui avait l'air plus jeune que les autres. Lison, pensa immédiatement Valentina, comprenant l'allégeance de la semeuse de doutes aux deux héritiers. Cette dernière était d'une beauté renversante. Une aura incandescente émanait d'elle. Ses prunelles la dardaient avec ardeur. Valentina tourna la tête et constata qu'Ophélie était déjà en position, prête à tirer. Ses yeux épinglaient Éloïse et elle tira une salve de coups pour les tenir à distance le temps que les portes de l'ascenseur se referment.
La puissance des déflagrations fut telle, que Valentina porta aussitôt ses paumes à ses oreilles. Elle remarqua que Joseph portait un casque. Mais la brutalité des détonations n'était rien comparée à la découverte du visage familier qui se dessina au milieu de leurs assaillants vampires. Son cœur s'arrêta. Ne pas paniquer. Inspire. Ce n'est pas vrai ! Expire. Pas elle ! Inspire. L'ascenseur sonna et s'ouvrit. L'air les fouetta en plein visage. Ses vêtements et ses cheveux volèrent en tous sens. Des phares braqués en pleine face, un hélicoptère les attendait. Partout autour, la nuit était d'encre. Accompagné de plusieurs vampires aux visages rendus flous par les larmes qui embuaient ses yeux, Tristan fondit sur elle. Il lui parlait, mais elle n'entendait pas. Choquée et désorientée, elle titubait. Elle le laissa prendre les choses en main. Les compagnons du vampire venus les secourir l'aidèrent à monter dans l'appareil. Ils hissèrent Vladimir puis Hector à bord.
À peine étaient-ils montés à leur tour qu'une série de claquements rapides retentit. Ophélie les arrosait. Elle avait touché Éloïse à la cuisse. La scène était irréelle. Alors que l'hélicoptère décollait, Valentina eut la confirmation qu'elle craignait. Ils avaient transformé sa mère. Elle regarda Joseph et se rendit compte que ses yeux étaient figés sur l'une des vampires et elle comprit. Sa femme était là. Ils avaient tous perdu quelqu'un. En écho à leur douleur, une pluie drue s'abattit sur eux alors qu'ils s'éloignaient de la scène.
Ils se turent tout le long du trajet. Valentina ne parvenait plus à retenir ses larmes qui s'échouaient sur son débardeur déjà trempé par la sueur. La gorge serrée, elle contemplait les corps inanimés de Vladimir et Hector.
— Aujourd'hui, j'ai perdu mon père, ma mère, j'ai plongé mes amis au seuil de la mort et Ophélie a perdu Éloïse. La vie d'inquisitrice s'annonce bien plus difficile encore que ce que je pensais, songea-t-elle.
Elle n'osait pas croiser les regards de ses camarades. Elle préféra se laisser glisser dans la nuit de ses paupières. De toute façon, elle n'entendait rien et cela lui convenait. Que pouvait-il bien y avoir à dire après un tel désastre ? Elle sentit la main d'Ophélie se poser sur la sienne. Elle ouvrit ses yeux et ressentit la compassion de la vampire. Elle posa sa tête sur son épaule et elles restèrent ainsi pendant la vingtaine de minutes restantes. Le ronronnement assourdissant de l'hélicoptère refaisait doucement surface. Son ouïe se rétablissait. Ils atterrirent au sommet d'un building. Aussitôt, qu'elle descendit, une horde d'individus encapuchonnés l'accueillit. On lui jeta une cape sur la tête. Joseph revêtit le même habit que les autres et la regarda derrière ses petites lunettes rondes avec un petit air d'encouragement. Ophélie lui prit une dernière fois la main et elles furent ensuite séparées. Valentina se sentit oppressée. Deux personnes dont Martin, l'empoignèrent et la transportèrent dans un vaste ascenseur qui descendit dans une sorte de sous-sol sombre et humide. Un minibus aux vitres fumées les attendaient. Sans qu'elle n'ait le temps de réagir, elle se retrouva embarquée dans le véhicule au milieu de Martin, d'un autre homme qui devait avoir une cinquantaine d'année et dont le visage était recouvert d'une immense balafre.
— Inquisitrice, bienvenue dans la confrérie des érudits. Nous vous conduisons en lieu sûr, prononça une femme au visage sévère. Mettez ces lunettes. Tant que vous ne maîtrisez pas vos pouvoirs, vous devrez les porter.
Valentina prit les larges lunettes noires que la femme froide et désagréable lui tendait. Elle était trop fatiguée pour résister. Elle les hissa sur son nez et se tourna vers la fenêtre. Inutile de batailler. Elle disait juste. Elle portait la responsabilité du sort de Vladimir et Hector et culpabilisait terriblement. Elle inspira profondément et ferma ses paupières. Elle se sentait épuisée.
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Merci d'avoir lu ^^
B.
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Valentina et les vampires
VampireLa vie de Valentina est bouleversée le jour où elle découvre l'existence d'un mystérieux carnet. Enlevée par un homme aux pouvoirs de séduction fascinants, elle découvre l'existence d'un monde parallèle qui menace l'ordre humain : celui des vampires...