Épisode 26 - La filiation de Rigonde

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Martin venait de quitter la chambre en cassant presque la porte sur son passage. Ophélie, Éloïse et Vladimir se tournèrent vers Joseph surpris par l'accès de colère inhabituel de son fils. Le regard de Joseph traîna un moment dans le vide.

— Que lui arrive-t-il ? balbutia faiblement Valentina qui venait de sursauter sous la violence du coup porté par le jeune homme.

Vladimir s'était aussitôt relevé tout en se tenant à distance d'elle. Tout le monde dans la chambre sentit que le vampire s'était subitement tendu.

Il se tenait dans une attitude raide, ses traits s'étaient durcis et son visage s'était refermé. Il regardait la jeune femme avec une froideur et une circonspection palpables.

Lorsque celle-ci balaya la chambre de son regard, elle s'arrêta sur lui. Elle le fixa avec sévérité. Ses sourcils se froncèrent. Et après quelques secondes à se dévisager l'un l'autre, elle le quitta du regard pour revenir sur Joseph.

— Il vient d'apprendre une mauvaise nouvelle, répliqua Joseph de manière évasive.

— Et lui, que fait-il dans ma chambre ? bouda-t-elle en désignant Vladimir du menton sans même lui accorder un regard.

Ignorant sa dernière remarque, Joseph reprit la parole à propos de la réaction de Martin.

— Je ne vous ai pas tout dit à propos de ma femme. Elle n'est pas morte à proprement parler. Elle a été... transformée... en vampire par les héritiers.

Joseph se racla la gorge, enleva ses lunettes, tira un mouchoir en tissu de la poche de son pantalon en velours côtelé et tapota discrètement la commissure de ses yeux. Puis il remit ses lunettes sur son nez.

— Je suis désolée, répondit-elle en baissant les yeux sur le bord soyeux de la couverture qu'elle faisait glisser entre ses doigts.

— Tu... Vous ne pouviez pas le savoir...

— Je crois que nous pouvons nous tutoyer.

Joseph eut un sourire sans joie.

Martin ne s'en est pas remis. Nous en voulons terriblement aux frères Tréguier et je m'en veux également. C'est pour m'atteindre qu'ils l'ont...

Un sanglot réprimé dans sa gorge l'empêcha de poursuivre.

— Est-ce que cela signifie qu'il t'arrive de la croiser ?

Il garda la tête baissée pendant un instant, la releva un peu vers Valentina et fit un signe de la tête en soufflant.

— Ce doit être immensément dur ! dit-elle.

— Ça l'est, mais avec du recul, je n'aurais pas agi autrement. Il y a trop de conséquences en jeu.

— Tu veux dire que tu as eu le choix, répliqua Valentina horrifiée.

— Oui... Ils se servent de personnes que tu aimes pour exercer des pressions sur toi et obtenir ce qu'ils souhaitent. C'est un procédé banal, mais abject et redoutable. J'en ai fait l'amère expérience.

— Pourquoi ont-ils fait ça ?

— Comme je te l'ai dit, je suis un chercheur et je me suis beaucoup penché sur l'histoire des inquisitrices dans la civilisation vampire. Ils voulaient que je travaille à leurs services et j'ai refusé. Tu connais malheureusement la suite.

— Qui sont ces frères Tréguier ? demanda Valentina avec une avide curiosité.

— Ce sont les fils bâtards du roi Clotaire II, fils de la sinistre reine Frédégonde et de son époux le roi mérovingien Chilpéric 1er du royaume de Neustrie, qui était un territoire situé au nord-ouest de la France actuelle. Ils ont vécu pendant la deuxième moitié du cinquième siècle après l'an zéro.

Valentina et les vampiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant