Chapitre 1

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Deux ans. Cela va faire deux ans qu'Izuku n'entend plus les sons parvenir à ses petites oreilles. Il se surprend souvent à comparer sa vie à un film en noir et blanc du XVIIe siècle, sans le moindre son, des images se succédants tour à tour durant une infinitée de secondes, qui donnent naissance aux heures, puis aux jours, mois pour finir années. Izuku a cette impression dérangeante que le monde évolue, le temps avance, mais lui non, il reste sur place. Pire, il recule. Il cours après ces précieux grains de sable qui s'écoulent trop rapidement dans le sablier depuis trop longtemps, il en a assez de ce petit manège. Le monde est allé trop vite pour lui. Il est resté dans l'époque sourde et muette, tandis que les autres avancent vers les couleurs et les paroles. Il veut les rejoindre, mais il est condamné à ne plus les entendre. A ne plus pouvoir les suivre. Personne ne l'attend.

Alors il court, il s'essouffle, il suffoque trop vite. Il fatigue déjà. Son ouïe, scellé, lui donne quand même l'illusion d'entendre la voix de son ami d'enfance, son rival, son malfaiteur, son modèle, qui se retourne l'espace d'une seconde. Il imagine déjà Katsuki qui pose un regard déçu sur son vieil ami. Il imagine les lèvres de ce dernier se mouvoir.

- On fatigue déjà, le nerd ?

En deux ans, il a eu le temps d'apprendre à supporter les regards tous déçus par son manque de réaction et son manque de participation. A ses murmures qui se demandent, sans toutefois oser lui poser la question, s'il va bien. Il a été habitué à cette peur qui lui tord le ventre lorqu'il rentre chez lui, le week-end. Aux coups qui pleuvent lorsque son père le croise. A la vue du sang qui sort de sa bouche en même temps que sa bile, lorsqu'il se dirige aux toilettes, à cause de sa gorge trop irritée. Il a réussit à faire abstraction de tout ça.

Mais il n'a pas réussi à les oublier. Ses voix. Elles sont devenues de plus en plus intenses. Violentes. Insupportables. Il ne trouve plus le sommeil. Il a toujours les sourcils froncés, formant un petit pli au milieu de son front. Il a réussi à tout oublier, sauf ça. Il en pleure de douleur, les soirs les plus durs, serrant le vide contre sa poitrine et s'aggripant à son tee-shirt devenu trop lâche avec le temps. Mais il fait tout ça en silence. Parce que sinon, son père ne ferait qu'accroitre la douleur. Autant physiquement que psychologiquement. 

Car oui, son père a un alter épouvantable, qui a été la cause de la mort de sa mère. 

(N/A : oui, je sais, Hisashi a pour alter de cracher du feu, mais afin de pouvoir faire une histoire intéressante et beaucoup plus palpitante, j'ai pris la liberté de lui donner un alter beaucoup plus dévastateur sur le psychologique d'Izuku, mentionné dans l'avant propos. Si vous l'avez pas lu, parce que fleeeeeeeeeeeeeeeeeme, bas allez le lire pour une meilleure compréhension de l'histoire ! J'espère que cela ne vous pertubera pas trop !)

Il se souvient encore, de ce soir-là, où il avait retrouvé une femme, étalée de tout son long dans le salon, sur le dos, avec cet inconnu qui surplombait son corps inerte du haut de ses 1m95. Il a reconnu l'homme tout de suite, bien qu'il ne l'avait jamais rencontré. Il se souvient encore de détails futiles, comme le four qui sonnait pour signifier la fin du repas du soir, son devoir de maths posé sur la table basse du salon, puis les boucles d'oreilles de ladite femme, qui se sont retrouvées souillées de son sang. Ce liquide carmin sortait de ses oreilles, de son nez et de ses yeux. Il se mélangeait à ses larmes. Puis, d'un coup, l'évidence lui a sauté au yeux : la femme par terre n'était autre que sa mère. Il la croyait immortelle, mais la vérité rattrape toujours le mensonge. Izuku refuse d'y croire. Il ne veut pas. Ce n'est pas elle, c'est forcément une autre personne. C'est vrai, il a toujours pensé qu'il mourrait avant elle. Il l'a voyait toujours dans ses plans d'avenirs, dans les moments importants comme dans les moments futiles. Mais son dernier soupir, son dernier mot, murmuré comme un péché qu'on n'oserait pas rapporter, lui indiquait que ce n'était pas une erreur.

Malentendant mal entenduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant