Les 10 travaux d'Alcide

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Alcide et moi dormions, nos souffles synchronisés, nos membres entremêlés dans le lit que nous partagions. La nuit était chaude en ce début d'automne. À travers la fenêtre, ouverte pour laisser passer l'air, filtrait la lumière argentée de la lune.

Déjà un an que nous étions mariés...

Nos nuits étaient souvent agitées. Oui. Non. Enfin ce n'est pas seulement ce que vous pensez !

Alcide avait tendance à faire des cauchemars. Presque toutes les nuits. Cela était épuisant pour lui, et pour moi aussi accessoirement.

Cette nuit-là fut l'une des pires. Alcide se mit à s'agiter. Il prononçait des paroles incohérentes. Son corps devint bouillant. Tellement qu'inconsciemment, toujours prisonnière des bras de Morphée, je m'écartais de lui pour chercher la fraicheur des draps.

Je fus réveillée quelques instants après, en sursaut, quand je sentis les mains de mon mari autour de mon cou. Je soulevais brusquement mes paupières pour m'apercevoir que celui que j'avais épousé se trouvait à califourchon sur moi, les mains serrées autour de ma gorge, les yeux ouverts, mais vides de toute expression.

J'étais paralysée par la peur. Tétanisée. Comme si moi même je me réveillais d'un cauchemar. Sauf que là, j'étais en train de le vivre. L'air se fit plus difficile à saisir. Je suffoquais lentement. Mon coeur battait à tout rompre dans ma poitrine. Tout dans mon corps hurlait danger. Ma Quand j'eus enfin conscience de se qui se passait, je fus de nouveau capable de bouger mes bras. L'instinct de survie reprenait le dessus. Je tentais par tous les moyens de ramener Alcide à la lucidité. Je le frappais, le griffais... Ma force était pourtant nulle comparée à la sienne.

Je ne sais comment ni pourquoi, mon homme revint à lui. Je le vis dans son regard. Les émotions étaient réapparues. Je pouvais y lire de la terreur quand il réalisa ce qu'il était en train de faire. Immédiatement il relâcha son emprise. Il s'empressa de sortir du lit et de se poster devant la fenêtre. C'était devenu une habitude chez lui. Chaque fois que ça n'allait pas, il prenait son poste à la fenêtre. Appuyé contre le cadre, il respirait comme s'il avait manqué de se noyer. Ma respiration à moi n'était pas mieux, mais pour une tout autre raison, vous vous en doutez bien.

C'était la première fois que les cauchemars d'Alcide se matérialisaient ainsi. Souvent, la nuit se limitait à de l'agitation et des cris. Ça, je pouvais gérer. Quand il était calmé, s'il en avait la force, il m'expliquait ce qui s'était passé. Mon mari avait l'âme torturée. Sa plus grande crainte était de se laisser emporter par la folie qui le martyrisait la nuit. Chaque fois, le même rêve. Il rêvait qu'il avait devant lui Erginos qui venait de faire tuer son père. C'est lui qui hantait ses nuits, encore et encore.

Après m'être remise de mes propres émotions, je décidais de me lever pour rejoindre mon époux resté appuyé sur le bord de la fenêtre à contempler la nuit. Sa respiration n'était plus erratique comme quelques minutes auparavant. Ne sachant trop quoi lui dire je fis ce qui me sembla le plus juste. Doucement, j'enroulais mes bras autour de sa taille et me plaquait contre son dos. Tout son corps était tendu. J'en fis abstraction et tentais de respirer le plus posément possible pour l'apaiser.

La respiration de l'homme dans mes bras se cala sur la mienne. Ses muscles se relâchèrent peu à peu. Quand je fus certaine qu'il était calmé, je me détachais de son corps massif, sans rompre totalement le contact. Il se tourna vers moi et plongea son regard dans le mien. Je pouvais y lire toutes les excuses du monde,

— Al... murmurais-je en posant ma main sur sa poitrine. Ça va mieux ?

Un rire sans joie parcourra son corps.

— C'est plutôt à moi de te poser la question. Je... Még, je ne ... Ce n'était pas mon but de ..., balbutia-t-il.

— Je sais. Je sais tout ça Al... Tu veux en parler ?

MégOù les histoires vivent. Découvrez maintenant