Le sandwich fini, à peine eut-elle mis un pied dans le hall d'entrée de son travail qu'une armoire à glace la redirigea vers le bâtiment C des archives. Elle suivit docilement le vigile impassible.
Les bureaux étaient nettement plus modernes que ceux où Edith travaillait. Elle retint une moue indignée en dévisageant la file de portes blanches encastrées dans le couloir désert. L'armoire à glace la fit passer par plusieurs portiques de sécurité vitrés. Un vigile les suivait en retrait, prêt à bondir sur Edith au moindre faux pas. Tu parles d'une ambiance... La jeune femme ne broncha pas.
Edith fronça les sourcils. Elle se trouvait à l'évidence dans une partie confidentielle du bâtiment. Cela ne pouvait-être que la police secrète des reflets personnels. Sa gorge se serra, elle se mordit la lèvre. Manquerait plus que je sois embauchée comme espionne pour leur compte... J'ai rien à voir dans tout ça... Elle fourra le papier de sandwich dans une poubelle accrochée au mur blanc immaculé. La montagne de muscles à ses côtés glissa un regard vers elle, comme pour s'assurer qu'elle n'avait rien cassé. « C'est ici. » indiqua-t-il en désignant une porte identique aux autres dans le couloir.
Plusieurs hommes ainsi qu'une femme semblaient l'attendre. Pour faire bonne impression, Edith sourit à chacun d'eux. « Bonjour, pourquoi suis-je convoquée ? » fit-elle sans savoir où se mettre. On lui désigna une place. Elle s'assit entre un homme d'une quarantaine d'année et un autre plus âgé. Ses épaules étaient renfermées sur elle tandis que ses jambes étaient croisées pour donner un air sérieux et confiant qu'elle n'avait pas.
« Madame Boran, c'est bien cela ? » commença celui qui semblait mener la réunion.
« Tout à fait monsieur. »
« Jurez-vous de garder le silence sur ce qu'il se dira en ces lieux ? » demanda-t-il en débouchant et rebouchant machinalement le stylo qu'il tenait dans sa main droite.
Edith l'identifia immédiatement. Le directeur du département de la PRP se tenait devant elle en chair et en os. Il ne mordait pas, paraissait-il, mais il était réputé pour n'accorder qu'un seul essai. La jeune femme retint un tremblement. Tout se jouait maintenant.
« Allons droit au but, nous avons peu de temps. »
Edith hocha la tête en le scrutant.
« Vous êtes ici pour une raison, vous savez laquelle. Votre... qualité d'Eban pourrait nous être précieuse. Monsieur Fournier, si vous voulez bien expliquer à Madame de quoi il en retourne. »
Un homme d'une trentaine d'années planta son regard dans celui de « Madame ». Le détail qui retint l'attention d'Edith était les oreilles proéminentes de l'individu qui ressemblaient fortement à celles d'un éléphant. Elle retint un pincement de lèvre.
« Comme vous savez, votre anomalie, entendre les reflets des autres, est utile à la police. »
« J'ai déjà passé les tests il y a deux ans et je n'étais pas apte à me servir de... mon anomalie », répliqua Edith en fronçant les sourcils.
« Vous étiez parfaitement apte, madame. C'est votre condition physique qui vous a fait défaut. »
Edith se retint de répliquer.
« Reprenons. Notre agent Eban formé pour une mission de reconnaissance n'est pas actuellement disponible. Vous êtes la seule autre Eban de notre département, nous vous proposons de le remplacer le temps qu'il se rétablisse. »
Une mouche aurait pu voler dans la salle, Edith ne s'en serait même pas aperçue. L'atmosphère pesait sur elle comme un couvercle. Le regard perçant du directeur acheva de fermer le mutisme dans lequel elle était coincée. Elle tenta une échappatoire.
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Le Souffle de Nos Reflets
Ficção GeralLucien est du genre nerveux. La Police des Reflets Personnels est à ses trousses au moindre faux pas ! Un criminel ? Non. Une anomalie hautement recherchée ? Certainement ! Non loin de là, Edith, employée à la PRP, collectionne les gaffes. Pourtant...