Chapitre 30 : vomi

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          Lucien tournait en rond comme un lion en cage sur le parking du supermarché. Il était de plus en plus nauséeux. À coup sûr, il avait chopé le virus d'Edith. C'était vraiment le pire moment pour tomber malade.

Des dizaines de Souffles semblaient attirés par l'agitation de la foule morose réunie devant le magasin, pressée autour du directeur qui distribuait les informations qu'il savait à qui va. Les petites créatures se glissaient partout comme si elles cherchaient quelque chose. Personne ne semblait leur prêter la moindre attention.

La police passait tous les employés au peigne fin. Le choc avait été rude pour tout le monde. Comment une fille aussi jeune et banale pouvait-elle mourir aussi violemment ? « Il y a des psychopathes partout », disait-on. « On n'est jamais à l'abri. »

Lucien respirait profondément l'air frais. Les voitures brillaient au soleil. Il faisait plutôt beau pour une journée d'hiver.

Soudain, trois policiers avancèrent vers le jeune Fax. Le plus grand et large, sûrement leur chef, était encadré par deux de ses collègues aux visages impassibles. Leurs badges, où figurait « PRP », reflétaient à chacun de leurs pas le soleil infatigable.

« Monsieur ? Nous devons vous poser des questions. »

Ils allaient s'apercevoir de sa fausse identité ! Mais non, il avait encore six mois : sa carte d'identité était toujours valide ! Non ! Ils allaient l'arrêter ! Il était cuit ! Ses maux de ventre exacerbaient sa nervosité et sa raison : il pensait tout de suite au pire.

Lucien, la voix chevrotante, répondit :

« Je... Je... Oui, bien sûr. »

« Il est sous le choc », commenta un des trois policiers qui s'étaient plantés devant lui.

« Ça ne durera pas longtemps, ne vous inquiétez pas, monsieur », rassura celui qui semblait être leur supérieur.

Lucien acquiesça, terrorisé. Il n'avait qu'une envie : vomir toutes ses tripes. Ses boyaux se tordaient dans tous les sens sans jamais daigner lui laisser un moment de répit.

« Votre carte d'identité, s'il vous plaît », reprit le policier en chef.

Le jeune homme sortit son portefeuille de sa poche de pantalon et tendit sa petite carte verte vers les forces de l'ordre. Il déglutit alors qu'ils vérifiaient attentivement ses papiers. Ses entrailles remontaient étrangement dans sa gorge. Non ! Il ne vomirait pas maintenant !

« Elle périme bientôt, votre carte », lança le chef.

« Je sais, j'allais... j'allais m'en occuper dans les jours qui... qui viennent. »

« Très bien. » Il le scruta pour vérifier sa bonne foi, puis semblant satisfait, le policier continua. « Monsieur Saguier, votre employeur nous a informé que vous aviez vu Juliette Colinga la veille de son décès. »

« Je... En... En effet, dans un bar... Oh, je suis désolé, mais... excusez-moi, je... je me sens pas très bien... »

Lucien n'eut pas le temps de s'expliquer davantage : un haut-le-cœur lui retourna l'estomac. Une superbe gerbe de vomi jailli hors de son gosier comme la lave d'un volcan en éruption.

Hélas ! Le pantalon d'un des policiers était foutu. Trop secoué pour s'excuser, Lucien laissa le pauvre homme se décaler en jurant.

Soudainement très fatigué, le jeune homme s'appuya contre le capot d'une voiture en se tenant le ventre. Il maudissait Edith. Où était-elle ? Lui, au moins, il l'avait aidé quand elle était au plus mal ! Une main tapota gentiment son dos. Lucien leva son visage tordu par la douleur vers l'heureuse créature qui daignait avoir un tant soit peu de compassion.

Le Souffle de Nos RefletsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant