Chapitre 15

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   Les premières lueurs du jour filtrèrent à travers les rideaux diaphanes de l'auberge, caressant doucement le visage d'Hiromi et l'arrachant à ses rêveries nocturnes. Elle savait que l'aube appelait à l'action, car un périple de longue haleine l'attendait. Alors qu'elle s'étirait, elle sentit un poids sur ses jambes et se rappela, stupéfaite, que Kaito avait passé la nuit ainsi, les circonstances ayant contraint son ami à dormir dans une position peu enviable à cause d'une chambre occupée.

   Elle posa un regard empreint d'affection sur Kaito, son visage paisible dans le sommeil. Ne souhaitant pas le réveiller brusquement, elle entreprit de libérer ses jambes avec précaution, mais le moindre mouvement suffit à éveiller le jeune homme. Ses yeux rougeoyants rencontrèrent ceux d'Hiromi, une lueur de tranquillité y brillant doucement.

- Bonjour, Hiromi. Bien dormi ? murmura-t-il, encore ensommeillé.

- C'est plutôt à moi de te poser cette question. Tu as dormi dans une position peu confortable, rétorqua-t-elle avec une pointe de malice.

   Kaito, feignant une réflexion profonde tout en s'étirant à son tour, répondit avec un sourire :

- Quelques douleurs au dos, mais rien comparé à l'entraînement que nous avons subi !

   Le rire complice qui les unissait s'éteignit doucement alors qu'ils se préparaient pour la mission à venir. C'est alors qu'Hana fit irruption dans la chambre.

- Hiromi, tu es déjà... Elle s'arrêta net, son regard se posant sur Kaito qui finissait de s'habiller.

- Qu'est-ce qu'il fait là ? interrogea-t-elle avec surprise.

- Il est arrivé avant toi, c'est tout, répondit Hiromi, un peu gênée, en se grattant l'arrière de la tête.

   Malgré le scepticisme d'Hana, elle décida de ne pas s'attarder sur le sujet et reprit :

- Nous sommes tous prêts. On n'attend plus que vous.

   Avec un sourire moqueur, Kaito la taquina sur son apparence matinale. Hana se précipita devant le miroir et constata que ses cheveux bleutés étaient en bataille.

- Oh non, ils auraient pu me prévenir que mes cheveux étaient dans cet état ! s'exclama-t-elle, quittant la pièce en trombe.

   Restés seuls, Hiromi et Kaito rirent de bon cœur avant de finir de se préparer. Ils retrouvèrent bientôt leurs compagnons, Hana reprochant à Kazuki de ne pas l'avoir mise en garde sur sa coiffure désordonnée.

   Après avoir salué les piliers restants, la troupe se mit en route vers le village. Le voyage promettait d'être long, environ cinq à six heures de marche, un défi pour leur endurance.

   La matinée s'étira en une longue traversée, l'épuisement commençant à se faire sentir chez les apprentis, tandis que Riku et Daichi, les piliers, demeuraient imperturbables. Lorsque l'estomac de Kazuki se mit à gronder, tous les regards se tournèrent vers lui, son visage s'empourprant de gêne. Riku et Daichi consentirent à une pause pour restaurer les estomacs affamés.

   Ils s'arrêtèrent devant une échoppe de nouilles aux allures typiquement japonaises, ornée de lanternes qui ajoutaient un charme traditionnel à la façade. À l'intérieur, une femme âgée les accueillit chaleureusement et leur servit promptement un repas revigorant.

   Reprenant leur périple, ils atteignirent leur destination en milieu d'après-midi, les hashiras toujours aussi frais et dispos.

- Nous resterons groupés jusqu'à la nuit, et en attendant, restons discrets, ordonna Daichi, le pilier du cauchemar.

   Hana tenta de négocier : 

- Daichi, s'il te plaît, on pourrait au moins explorer un peu le village ?

   Ses yeux violets imploraient une concession, mais le regard inflexible de Daichi lui fit comprendre que la décision était prise. Même Riku, d'ordinaire si placide, n'avait pas eu son mot à dire.

- Nous pouvons nous promener dans le village sans nous disperser, proposa Hiromi, cherchant un compromis.

Kazuki se plaignit : 

- On a déjà marché toute la journée !

   Les soupirs de Hiromi et Kaito résonnèrent en écho. Ils n'avaient d'autre choix que d'attendre l'obscurité.

*

   À mesure que le ciel s'assombrissait, les six pourfendeurs, l'esprit en alerte, se mirent en quête de signes suspects. Les maisons aux toits de chaume et aux murs sombres bordaient la ruelle qu'ils empruntaient, la foule s'éclaircissant autour d'eux.

   Riku rappela aux jeunes de rester concentrés, surtout s'ils étaient confrontés à une lune inférieure.

   Lorsqu'ils atteignirent une partie reculée du village, où les demeures délabrées se faisaient plus nombreuses, Daichi s'arrêta brusquement, aucun signe de vie à l'horizon.

- Le démon est probablement ici, nous signala-t-il. Riku et lui s'éclipsèrent, laissant les novices prendre les devants, comme Hiromi l'avait demandé.

   Convaincue de leur capacité à faire face à l'adversité, Hiromi jeta un regard à ses camarades : Kaito affichait une nonchalance studieuse, tandis qu'Hana et Kazuki tenaient nerveusement leurs katanas.

   Soudain, une silhouette se dessina dans l'obscurité. De taille moyenne, elle s'approcha sans bruit. Les jeunes guerriers dégainèrent, fixant l'ombre qui se précisait.

   C'était un jeune démon aux cheveux blancs hérissés et aux yeux oranges cernés d'argent. Vêtu simplement, il avait l'air d'un enfant perdu sans chaussures.

   Sans s'attarder sur son apparence, Hiromi lut dans son regard qu'il était la huitième lune, une lune inférieure. Ignorant son pouvoir sanguinaire, la prudence était de mise.

- Vous n'êtes pas d'ici, déclara le démon avec un ton moqueur. À votre allure, je suppose que vous êtes des pourfendeurs venus pour m'abattre.

   Les jeunes restèrent de marbre devant sa provocation. Lorsqu'il parla, le démon usa de gestes théâtraux, notamment avec ses mains.

- Alors, qu'attendez-vous pour m'exécuter ? lança-t-il avec défi.

   Surpris par cette provocation directe, Kaito fut le premier à se ruer sur l'ennemi. Brandissant son katana avec le souffle de l'enfer, il trancha net le cou du démon qui n'avait pas bougé.

- Bravo, Kaito ! Tu l'as terrassé en un clin d'œil ! s'exclama Hana, sautillant de joie à la vue de leur prétendue victoire.

   Alors que Kazuki se joignait aux acclamations, Hiromi resta silencieuse. Cela semblait trop facile pour être vrai. En observant à nouveau le démon, elle vit que sa tête était toujours attachée, un sourire narquois aux lèvres.

- Kaito, attention ! s'écria-t-elle alors que le démon se rapprochait dangereusement de lui.

   Il esquiva de justesse et remercia Hiromi, mais son soulagement fut de courte durée. Le démon frappa dans le vide, et soudain, les vêtements de Kaito se déchirèrent, révélant une entaille sanglante.

- Si seulement vous pouviez observer l'expression qu'affiche vos visages ! ricana le démon. Je manipule les probabilités ! Ton cher camarade n'avais aucune chance de me toucher, alors que moi, j'avais toutes les chances de le blesser !

   Hiromi et les autres regardèrent, choqués, alors que le démon continuait à rire de leur déroute. Ils devaient trouver un moyen de le vaincre, mais comment lutter contre un ennemi qui déjoue les lois du hasard ?

Doma x reader (Hiromi)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant