Animal

Chapitre 19

Huit me sauta dessus comme une bête l'aurait fait, si vite que je ne pus m'enfuir. Elle bavait littéralement de rage et essayait de me mordre alors que je luttais pour l'en empêcher.

"Tu es maintenant la seule source de viande qu'elle ait à sa disposition", expliqua la Directrice avant de couper le microphone en riant.

Je me débattais encore. Elle était complètement sur moi et m'attaquait sauvagement. Je voyais entre ses yeux rouges perçants qui voulaient me dévorer des flash-backs de ce que la Directrice m'avait dit.

À la fin, que vous aimiez ou non ce monstre, ce sera votre vie ou la sienne... Un monstre. J'avais en effet un monstre devant moi, mais je ne voulais pas oublier que sous tout cela c'était ma Huit.

Il n'y a pas de scénario où vous survivez tous les deux. Lorsqu'elle vous foncera dessus pour vous tuer... Huit voulait-elle vraiment me faire du mal? Est-ce qu'elle n'aurait jamais voulu me faire du mal?

...nous verrons bien si votre amour vous laissera mourir pour elle ou si votre instinct de survie plantera ce couteau dans le cœur de celle que vous pensez aimer... Je serrai le couteau qui était encore dans ma main, sachant pertinemment que je pouvais l'utiliser à tous moments.

Entre deux efforts difficiles pour repousser Huit, j'aperçus son visage. Ses canines étaient plus grandes et tranchantes, comme celles d'un animal, et elle claquait des dents de faim ou peut-être de rage. Elle bavait, comme un prédateur qui avait envie de manger, qui avait besoin de manger. Son front était encore plein de sang qui coulait du haut de sa tête jusqu'à son menton. Je ne reconnaissais pas ses yeux, ils étaient tellement remplis de haine, ils n'avaient rien de profond comme je les connaissais... Ses pupilles étaient toutes dilatées. Elle avait tout l'air d'une bête qui allait tuer sa proie, et j'étais cette proie.

Je la poussai difficilement hors de moi, essayant de reculer le long du mur mais elle revint sur moi en un bond. Sa mâchoire fonça sur mon visage et j'esquivai de justesse son croc puissant qui claqua violemment à quelques centimètres de mon oreille. J'avais peur, je ne vais pas vous le cacher. Je cherchais désespérément des signes de ma Huit en vain. Peu à peu, je me faisais à l'horrible idée que ce n'était qu'une bête sauvage, que c'était sa vie ou la mienne. Cette pensée me dégoûtait tellement.

Je continuai de serrer le couteau dans ma main, prêt à le planter à n'importe quel instant. Huit continuait de m'attaquer. Elle me griffait à plusieurs reprises, déterminer à me tuer.

J'avais peur d'elle, elle était tellement énervée, tellement sauvage, et pourtant je voulais encore croire que c'était elle. Sa beauté n'avait pas changé. J'avais beau tenir ce couteau, faire comme si ce n'était qu'une bête, cela me ramenait à Huit. Je ne pouvais pas la tuer, je ne pouvais même pas la blesser un peu. J'étais connu pour être fort, pour être juste, pour être rationnel, mais comme tout homme je n'avais qu'une seule faiblesse et c'était cette femme, même sous une apparence quelque peu animalière, face à elle j'étais faible.

Je la regardai droit dans les yeux, cherchant désespérément des signes d'elle à travers cette bête. Je finis par simplement poser le couteau au sol, résigné à ne pas lui faire de mal, et je fermai les yeux alors qu'elle continuait de me griffer. Mourir pour elle... c'était les mots que la Directrice avait choisis pour exprimer le fait de se laisser faire dans un dilemme où il s'agit de tuer celle que l'on aime ou être tuer par celle que l'on aime. Eh bien, je vous le dis maintenant, j'avais choisi la deuxième option et je choisirais toujours cette option. Je suis un homme faible qui laisserait celle qu'il aime le tuer si elle le souhaite. Je ne broncherais même pas un peu.

Petit à petit, je cessais de lutter face à Huit. Mes yeux toujours fermés, le temps passait si doucement que j'eus le temps de respirer un coup son parfum. C'était ma Huit. Malgré ses yeux rouges, ses canines acérées, ses griffes, c'était elle et je l'aimais.