Chapitre 2

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Margot

   J'observe une dernière fois mon reflet dans mon téléphone avant de monter les marches du perron de chez mes parents. Après une grande inspiration, je me dirige vers la porte d'entrée.

Mes parents ont choisi cette demeure quand ils ont découvert ma grossesse. Une maison spacieuse, chaleureuse, conçue pour accueillir leurs futurs petits trésors. Oui, ils espéraient plusieurs petits-enfants. Elle offre une chambre de plus que notre ancien chez-nous, et même une salle de jeux. Quant au jardin, il paraît presque deux fois plus vaste que la maison elle-même.

Ma mère m'accueille avec un regard teinté de tristesse. Mes parents chérissaient Paul, le considérant comme leur propre fils. Quelques jours après sa mort, ma mère a décidé de mettre fin à sa carrière de responsable dans une agence immobilière pour se consacrer entièrement à notre famille. Elle est une mère et grand-mère extraordinaire. Mon père, de son côté, m'a aidée à trouver un travail grâce à un ami qui tient un grand restaurant italien. Malgré mes faibles études, je n'ai pas pu refuser cette opportunité. Il était temps pour moi de reprendre une vie « normale ».

Quant à mon supérieur, Lorenzo, fils du patron qui a presque mon âge, c'est l'archétype du gros con. Sa proximité est une source constante de dégoût et de colère. Son harcèlement insidieux, ses tentatives grossières de séduction sont autant de tortures quotidiennes. Malgré mes refus répétés, il m'a menacée de me faire perdre mon emploi, une situation que je ne peux pas me permettre. Ce travail est vital pour subvenir aux besoins de ma fille et payer mes factures. En plus, il se trouve juste à côté de mon domicile. Et surtout, je ne veux pas décevoir mes parents, qui ont été présents et d'un soutien infaillible depuis la tragédie. Je ne souhaite pas non plus semer la discorde entre nos deux familles qui s'entendent si bien depuis des années. Alors, j'encaisse, tant que cela ne va pas plus loin.

J'ai tenté de résister mais c'est plus fort que moi. Pour la deuxième fois de la journée je fonds en larme mais cette fois-ci, c'est dans les bras réconfortants de ma mère.

Être auprès des personnes qui me sont le plus cher fait tomber mes défenses sans que je ne puisse contrôler quoi que ce soit. Je sens une seconde paire de bras nous encercler : mon père. Il dépose un baiser sur le haut de mon crâne et me chuchote un « ça va aller ma fille, n'oublie pas que tu n'es pas seule ». Rien que cette phrase déclenche maintenant un torrent de larmes.

Je les aime tellement.

— Allez les filles, soyez fortes et souriez, c'est quand même l'anniversaire de notre petit ange aujourd'hui !

— Oui c'est vrai, je renifle, où est Vic ?

— Ton père lui a encore mis La Reine des neiges...

Mon père hausse les épaules.

— Bah quoi ? Elle voulait absolument le regarder.

— Elle ne sait même pas encore parler, comment peux-tu le savoir ? rouspète ma mère.

— Rooh ça va, Carole, tu ne vas pas commencer !

Je lâche un petit rire en essuyant mes larmes. Sont-ils vraiment en train de se disputer pour un Disney ? Ils me regardent d'abord surpris puis sourient avec moi.

Je vois tellement d'amour dans leur regard que j'en ressens des picotements dans la poitrine. J'ai cette chance d'avoir des parents aimants et prêts à tout pour le bonheur de leur famille.

À ma sortie de la maternité, j'ai trouvé refuge chez mon père et ma mère pendant quelques mois.

Remettre un pied dans notre maison était impossible ; voir toutes les affaires de mon fiancé dans notre chambre, contempler nos photos accrochées aux murs, traverser chaque pièce saturée de son odeur... Non, je ne pouvais pas y retourner. C'était impensable et beaucoup trop tôt.

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