Chapitre 30

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TW :  présence de violence physique (agression).

Margot


Je la sens encore. Toujours. Cette présence.

J'ai pris l'habitude de me dire que je psychotais pour rien, puisque dès que je me retourne je ne vois jamais rien de suspect. Mais là, c'est différent. Les frissons qui parcourent mon corps sont plus intenses que jamais, même le froid ambiant ne peut justifier cette sensation glaçante. Et le bruit de tout à l'heure ne m'aide pas à redescendre en pression.

La date d'aujourd'hui n'arrange en rien mon état d'esprit : Vendredi 13. Sans rire, je ne suis pas superstitieuse en temps normal mais là, dans cette ambiance sombre et froide, c'est pas la même limonade. Chaque ombre, chaque son que je perçois, aussi infime soit-il, alimente mon sentiment de paranoïa.

J'accélère le pas, comme toujours.

Les poils, sur ma nuque couverte, semblent se dresser, me mettant en alerte.

Je me retourne d'un coup sec.

Et c'est là que je la vois.

La silhouette noire, dissimulée derrière le mur en brique, à quelques mètres de moi.

Sans réfléchir, je cours. Aussi vite que mes tremblements me le permettent, aussi loin que mes jambes me guident. Instinctivement, je pense à Samuel. Je sors précipitamment mon téléphone de ma poche, mais dans la peur et les secousses, il me glisse des mains et tombe au sol avec fracas. Un juron m'échappe, mais je n'ose pas m'arrêter. Une boule de détresse m'enserre la gorge.

Mes pas résonnent dans un silence oppressant. Le moindre bruit alentour me ferait presque bondir. Je lutte pour retenir les larmes qui menacent de couler, sentant cette brûlure derrière mes yeux.

Depuis tout ce temps j'avais raison, je ne suis pas parano. Ses pas lourds foulent le sol avec détermination, je n'entends que ça derrière moi.

Bordel, mais qui est-ce ?

Mon cœur va exploser.

Il se rapproche, je le sens. La panique montant crescendo, je presse le pas.

Plus vite, il faut que j'aille plus vite.

Je dois le semer et rentrer chez moi.

J'ai envie de rire de ma connerie. Depuis le temps, il doit bien savoir où je vis.

Peu importe.

Il ne faut pas que je reste dans une ligne droite. Je dois tourner.

Je me précipite dans la rue sur ma gauche au dernier moment. Il fait noir, mais je vois l'éclairage au bout. Je fonce. Mes pieds martèlent le sol de petits pas rapides. Mes chaussettes sont trempées. C'est vrai, il y a eu un orage hier, Victoire en a pleuré.

Victoire, ma fille. Plus vite. Je dois encore accélérer. Mes poumons me brûlent, ça devient compliqué.

À droite.

Il est là, à quelques pas, je l'entends.

Je suis essoufflée. Mes jambes vont me lâcher, je le sens. Le sport n'a jamais été mon fort.

Encore à droite.

Et là, je me tétanise. L'obscurité m'engloutit. Je ne vois pas d'éclairage au bout de cette rue.

Je ris, nerveusement, alors que les larmes brouillent ma vue.

Une ruelle. Quel cliché pourri.

— Alors, la petite souris pensait pouvoir se glisser hors de ma vue ?

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