Chapitre 33

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L'Allée des Embrumes n'obéissait ni aux lois du monde magique, ni aux lois du monde moldu.

Il ne l'avait pas compris immédiatement, il avait commis la même erreur que beaucoup de sorciers en pensant que c'était le chaos dans cet endroit infernal.

Il avait découvert une autre facette de cet endroit. Sous la crasse et la misère, il y avait des familles, des habitants qui se soutenaient et se débrouillaient pour vivre le mieux possible. Qu'ils soient sorciers, sang pur ou non, cracmols ou même créatures, ils avaient créé leur foyer.

Ils avaient fui quelque chose dans le monde magique, pour se retrouver à cet endroit et ils s'étaient construits une nouvelle vie.

Harry secoua la tête pour chasser ses pensées et avança dans le salon. Drago lui jeta un bref regard avant de hausser les épaules et de le laisser seul avec Théo.

Théo lui sourit et Harry se détendit légèrement, profitant encore un peu de l'illusion qu'il avait lui-même créé et se liant un peu plus au jeune homme qu'il risquait de perdre.

L'après-midi passa à une vitesse folle, et lorsque Drago approcha d'eux avec une fiole de potion, Harry soupira. Il reconnut immédiatement la potion épaisse et malodorante.

Théo se renfrogna et leva les yeux au ciel.

— Je devrais venir. Nous ne serions pas trop de trois pour surveiller nos arrières.

Drago grogna.

— Tu es déjà blessé, Théo. Et ne t'en fais pas, je vais veiller sur Harry. Je te l'ai déjà promis et tu sais que je tiens toujours mes promesses.

Harry sourit et se pencha pour embrasser légèrement Théo, se moquant de la présence de Drago. Puis, il assura, sans la moindre hésitation.

— Je lui fais confiance, tout ira bien. Et je...

Théo l'arrêta.

— Ne me fais pas de promesses, Harry.

Harry hésita, puis il hocha la tête à contrecœur.

— D'accord. Du moment que tu sais que c'est réel. Plus que tout.

Théo arracha quelques-uns de ses cheveux et les laissa tomber dans la fiole de polynectar que tenait Drago. Harry hésita puis il en but une partie avec une grimace et attendit les effets désagréables de la métamorphose. Il rangea soigneusement le reste de la potion dans sa poche pour pouvoir en boire régulièrement et garder l'apparence de Théo aussi longtemps que nécessaire.

Il eut l'impression que son corps changeait pendant des heures alors qu'il ne s'écoula que quelques secondes. Dès qu'il fut la copie conforme de Théo, il lui sourit et tendit la main vers lui, mais il n'osa pas le toucher. Il se détourna ensuite et suivit Drago, quittant la petite maison où il avait vécu ces derniers jours.

Il marqua une pause dans la ruelle pour regarder derrière lui et observer le bâtiment avec une expression nostalgique. La maison n'avait rien de beau. Elle était comme toutes celles de la rue, un peu biscornue, enchâssée entre deux autres bâtiments de guingois, les murs devenus gris après des années de poussière. L'un des volets pendait tristement sur ses gonds, et elle aurait besoin d'un bon nettoyage pour retrouver un fragment de son éclat d'antan.

Cependant, l'intérieur était chaleureux. Il y avait été heureux ces quelques jours, et il s'était senti enfin lui-même.

Il y avait trouvé Théo et si Harry ne craignait pas pour sa sécurité et celle de ses amis, il retournerait à l'intérieur en courant pour se blottir dans les bras de son Serpentard.

Avec un soupir, il détourna les yeux et rattrapa Drago, qui le regardait d'un air perplexe.

Harry marmonna, sans cacher la fêlure dans sa voix.

— J'aimerais rester avec vous. Vraiment. Ne pas retourner là-bas.

Drago resta silencieux, mais quand ils atteignirent le bout de la rue, il demanda, d'un ton prudent.

— Vraiment ? Tu abandonnerais ta petite vie parfaite dans le monde magique pour venir ici ?

Harry haussa les épaules.

— De mon point de vue, il y a plus ici que dans le monde magique. Je ne pense pas que j'avais une vie parfaite, sinon... je...

Harry s'interrompit, hésitant, refusant de mentir encore. Drago compléta pour lui, d'un ton détaché.

— Sinon tu n'aurais pas oublié ?

Harry soupira et il acquiesça vaguement, avec une grimace.

— Quelque chose comme ça.

Il suivit Drago dans le dédale de ruelles, regardant autour de lui avec attention, la main serrée sur le manche de sa baguette. Avec la nuit qui tombait, les rues étaient désertes, rendant l'ambiance un peu plus sinistre.

Drago sembla lire son étonnement dans son expression puisqu'il se fendit d'une explication.

— Le côté proche du chemin de Traverse doit encore être bondé à cette heure. La plupart des boutiques ouvrent la nuit pour les transactions un peu moins honnêtes qu'en journée. Il y a aussi les sorciers qui osent venir pour s'encanailler, espérant... un peu de frissons, je suppose. Par ici, le côté résidentiel, c'est plus calme. Il y a des enfants et les récents... évènements ont rendu les parents prudents. Vivre dans l'Allée signifie côtoyer le danger de près.

Harry hocha la tête pensivement, puis il demanda, le front plissé.

— Ces enfants, ils ne vont pas à Poudlard ?

Drago ricana, amer.

— Pas vraiment non. Les parents n'ont pas les moyens d'offrir les fournitures à leurs gosses et de toute façon, ils ne sont pas inscrits.

Harry s'arrêta brièvement et cligna des yeux, alors qu'un souvenir le frappait. Il venait d'avoir onze ans et Hagrid lui faisait découvrir le chemin de Traverse. Le demi-géant lui avait glissé dans la conversation — Harry ne se souvenait plus dans quel contexte — que ses parents l'avaient inscrit à Poudlard dès sa naissance.

Il secoua la tête et rattrapa Drago, puis il demanda finalement.

— S'ils ne sont pas inscrits à Poudlard qui fait leur éducation ?

Drago lui jeta un regard en biais, puis il renifla, avec un sourire moqueur. Cependant, il ne pouvait pas cacher la tristesse dans ses yeux gris.

— Une partie est cracmolle, donc la question ne se pose pas. Une partie possède du sang de créature. Harpie, loup-garou et autres. En dehors de ton pote Lupin, aucune autre créature n'a été admise à Poudlard. Le reste... les parents se débrouillent comme ils le peuvent pour leur apprendre le nécessaire pour leur survie. Ce n'est pas comme s'ils pouvaient prétendre à une brillante carrière dans le monde magique, n'est-ce pas ? Regarde, Théo n'a jamais rien fait de mal et les actes de son père le condamnent à une vie de misère.

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