Amnésie

Chapitre 36

Voyant qu'un autre auror approchait Drago avec une expression hostile, Harry s'éloigna de Hermione sans hésiter — conscient qu'elle le lui reprocherait plus tard — et intervint une fois de plus, agacé.

Cette fois, il connaissait l'homme et il le salua sèchement.

– Williamson. Quel est le problème ?

Son collègue le toisa avant de hocher sèchement la tête.

— Potter. Tu as une sale tête. On embarque celui-là aussi ?

Harry se tendit, et il fronça les sourcils.

— Drago est avec moi. Bon sang, qu'est-ce qui ne va pas chez vous ? Vous avez le coupable ligoté et prêt à embarquer et ça ne vous suffit pas ?

Vexé, Williamson plissa les yeux.

— Étant donné que les Malefoy sont connus pour être des Mangemorts, on devrait peut-être t'envoyer à Sainte Mangouste, histoire de vérifier que tu ne sois pas...

Harry voulut se jeter sur lui et le frapper, mais Drago le retint d'une poigne de fer en agrippant son bras, tandis que Hermione se précipitait et renvoyait tout le monde avec fermeté, assurant qu'elle se chargeait du reste. Étonnement, aucun Auror ne protesta et ils quittèrent les lieux rapidement.

Harry se tourna vers Drago et il tressaillit face à son regard plein de colère. Il murmura, défait.

— Drago... je peux tout t'expliquer, je t'assure que...

Drago plissa les yeux en le fixant et grimaça avant de siffler, son ton empli de venin.

— Pas un mot de plus, Potter, ou tes potes devront vraiment m'envoyer à Azkaban, parce que je ne m'arrêterai pas à un seul coup.

Harry ferma brièvement les yeux, un gémissement désolé lui échappant, et Drago reprit.

— Finalement, tu retournes chez toi. N'essaie même pas de revenir par ici, tu n'es plus le bienvenu, Potter. Toutes tes petites ruses ne t'aideront pas, plus maintenant. J'espère que tu as obtenu ce que tu voulais.

Harry souffla, sans cacher son désespoir.

— Je dois parler à Théo...

Drago grogna furieusement et lui agrippa le tee-shirt, lui montrant les dents.

— Enfoiré ! Ne t'approche pas de Théo. Je l'avais prévenu que tu allais lui briser le cœur, mais tu n'as pas pu rester à distance, n'est-ce pas ?

Hermione intervint et s'interposa, écartant Drago, les sourcils froncés.

— Ça suffit, pas la peine de se battre. Harry, il est temps de rentrer. Malefoy, merci de l'avoir aidé.

Harry secoua la tête.

— Je ne peux pas... Je dois juste...

Drago plissa les yeux, avant de siffler.

— Tu. N'es. Plus. Le. Bienvenu.

Harry vacilla et ne résista plus quand Hermione l'entraîna à sa suite, sans quitter des yeux Drago, n'entendant même pas le sermon de Hermione.

Il fut traîné à la suite de son amie jusqu'au chemin de traverse, puis elle les fit transplaner et il cligna des yeux en se retrouvant chez ses amis.

Il regarda autour de lui, un peu hébété, et il se passa les mains sur le visage, alors qu'il prenait conscience que tout s'était finalement écroulé autour de lui, de la pire des façons.

Hermione commença à le sermonner, mais il l'interrompit brutalement, indifférent à sa colère, avec l'impression d'avoir un goût de cendres dans la bouche.

— Je suis épuisé. J'ai besoin de dormir. Quand dois-je retourner au travail ?

Durant quelques secondes, Hermione resta muette de stupeur, ouvrant et fermant la bouche. Puis elle pinça les lèvres et croisa les bras sur sa poitrine.

— Harry !

Cependant, il l'interrompit, ignorant son exclamation scandalisée, trop épuisé pour se soucier de ménager la susceptibilité de la jeune femme. Il savait qu'il lui devait beaucoup et qu'il se montrait cruel, mais il avait l'impression que son cœur était en miettes et il n'était pas certain d'y survivre.

— Plus tard, Hermione.

La jeune femme leva les yeux au ciel, sans cacher son agacement, puis elle répondit froidement.

— Puisque tu voulais tant des vacances, ton planning a été libéré pour les trois semaines à venir. Kingsley m'a demandé de te dire que tu n'étais pas le bienvenu au Ministère d'ici là.

Indifférent, Harry hocha la tête et répondit d'une voix atone.

— D'accord. Très bien.

Hermione haussa un sourcil surpris en le détaillant avec soin, mais avant qu'elle ne puisque l'interroger, il tourna le dos et quitta la maison de ses amis sans un mot de plus.

Harry transplana directement dans son appartement vide et impersonnel et il regarda autour de lui, avant de fermer les yeux en déglutissant. Il secoua la tête, avant de jurer.

Avec l'impression d'être une marionnette, il se rendit à pas lents dans la salle de bains, en traînant les pieds, et il se déshabilla avant d'entrer sous la douche.

Il tourna les robinets à fond, grimaçant légèrement à la piqûre de l'eau brûlante, et resta sous l'eau jusqu'à ce qu'elle devienne glaciale, le front posé sur la faïence blanche.

Finalement, il sortit, frissonnant, et il se sécha sommairement, avant d'enfiler un caleçon. Sans se soucier de l'heure, il alla jusqu'au matelas et il se laissa tomber dessus avec un soupir résigné. Il tira la couette sur lui et s'en enroula, avant de fermer les yeux, certain qu'il ne parviendrait pas à se reposer correctement.

S'il avait dormi sans peine lorsqu'il était dans la petite maison de l'Allée des Embrumes, dans le lit de Théo, près de lui, maintenant qu'il était rentré chez lui, le sommeil le fuyait — comme avant.

Il resta allongé, le regard dans le vide, ses yeux le brûlant alors qu'il retenait ses larmes, se sentant plus seul que jamais.

Harry ne savait pas combien de temps s'était écoulé lorsqu'il entendit frapper à sa porte, mais il ignora le martèlement insistant. Il ne voulait voir personne, il avait besoin de digérer ce qui venait de se produire.

Il avait besoin de se reprendre, de calmer ses émotions, pour pouvoir réfléchir à un moyen d'arranger les choses. Il refusait d'envisager la possibilité d'avoir perdu Théo pour de bon, de ne plus jamais le voir... Il n'envisageait pas de reprendre sa vie comme si toute cette histoire n'était qu'une parenthèse sans importance.

Le jeune homme somnola de temps à autre, restant dans son cocon de chaleur formé par la couette autour de lui, ignorant la faim, préférant s'apitoyer sur son propre sort.

C'était un luxe qu'il n'avait jamais eu, avant. Il avait toujours dû cacher lorsqu'il allait mal, parce que c'était la guerre et qu'il avait des responsabilités — beaucoup trop pour son jeune âge. Alors il décida qu'il pouvait bien se comporter comme un enfant quelques jours, et pleurer ce qu'il avait perdu.

De temps à autre, il entendait frapper à la porte, mais il ignora ses visiteurs, refusant de voir qui que ce soit. Il suspectait que c'était Hermione, inquiète pour lui, mais il n'arrivait même pas à se sentir coupable de la tenir à l'écart.

Il savait qu'il devrait faire face à un moment ou à un autre à ses amis et à ses collègues, qu'il devrait donner des explications également. Il aurait à s'excuser auprès d'eux pour la façon dont il s'était comporté et pour son entêtement.

Tout ça, plus tard. Quand il aurait repris pied, quand son cœur cesserait de lui faire mal comme s'il était à vif.

Quand il réussirait à retrouver un fragment d'espoir qui l'aiderait à se lever et à reprendre sa vie, avec pour unique objectif de retrouver Théo.