Chapitre 5 : La torture

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Le mot qui me vient est « Flambeau ». C'est comme si j'étais une torche humaine ! J'ai des moments d'absence tant la douleur est insupportable pour mon corps. Je n'arrive même pas à crier ma souffrance, je me sens mourir de l'intérieur. Puis vient le moment où mes dents s'entrechoquent à cause de mes grelottements dus au froid, qui glace le brasier qui était en moi. Quelques heures après mon corps se met à transpirer à tel point que je fais un cauchemar où je me noie dans toute l'eau qui s'en échappe.

Je préfère rester allongée par terre car lorsque j'ai trop chaud le sol me rafraîchit pendant quelques secondes. Et quand le froid me gagne je me recroqueville en espérant que le sommeil va prendre le dessus pour me plonger dans un profond coma.

Je ne fais plus la différence entre ce qui est réel et ce qu'il ne l'est pas et n'ai aucune idée du jour que nous sommes. Depuis combien de temps suis-je là à souffrir ? Est-ce deux jours ou tout simplement deux heures ? Le temps est plus long lorsque la douleur devient une torture physique, comme psychologique.

Je reste donc immobile la joue collée contre le sol frais. Je me fiche bien de sa couleur jaunâtre et même de son odeur de moisi.

Un grincement de porte me fait sortir de ma transe, j'ouvre les yeux avec peine pour voir qui me rend visite, mais la seule lumière qui éclaire la pièce me provoque une affreuse migraine qui me brûle l'intérieur du crâne. Je veux bouger un doigt, mais la douleur me fait pousser un petit cri, c'est comme si tous mes os étaient brisés. J'ai l'impression que mon corps tout entier se transforme en une pantoufle de verre et qu'il est ensuite en train de se briser en mille morceaux.

J'entends mon lit grincé et sa voix dure et mélancolique.

-Ce n'est que le début.

Je savais que c'était lui, de toute façon il est le seul à être venu me voir.

-Je veux que ça cesse, murmurai-je la bouche sèche.

-Alors, tu dois te nourrir de mon sang.

Non. Je ne lui ferais pas ce plaisir, je ne céderais pas.

Malgré la douleur je me tourne dans tous les sens cherchant la position la plus confortable même si le béton n'est pas ce qu'il y a de mieux. Puis les frissons reviennent, je me remets à grelotter. J'ai la sensation qu'il fait moins dix degrés dans la pièce. J'essaye de ne pas lui montrer, pourtant il arrive à le ressentir je ne sais comment, car il me jette une couverture sur le dos.

Je m'endors quelques minutes et je rouvre les yeux tout en hurlant mon supplice. Mon corps brûle de l'intérieur, chaque partie de muscle, de tissu sont trempés dans l'acide. Je me lève me tapant dans les murs tant la douleur est atroce car l'acide me ronge aussi les os.

Des mains froides et fermes me retiennent soudainement avant que je ne fonce une fois de plus dans le mur. Je me débats comme une furie alors qu'il essaye de me convaincre.

-Tu dois te nourrir, sinon la douleur empira.

-Lâche-moi, hurlais-je, je ne veux pas de ton foutu sang de monstre.

Voyant qu'il ne me lâche pas je le mords comme une bête enragée. Je n'ai pas pensée une seul seconde que je me retrouverai avec son sang dans la bouche, que je crache directement par terre.

Ma tête me parait lourde et ma vision se déforme jusqu'à devenir toute noire.

Je me réveille dans mon lit, je tourne la tête et le vois assis par terre, contre le mur. Le regard dur et mélancolique.

-Tu dors depuis trois jours environ, dit-il en fixant la tache de sang que le sol a avalé.

Debout !, me crie une voix dans ma tête, mais tout tangue autour de moi. Mon corps part en avant, alors que j'essaye de me retenir à n'importe quoi. Il lui suffit d'une seconde seulement pour me tenir par les hanches et se mordre le bras tout en me le présentant comme un buffet. Je fais non de la tête déterminée, il me lâche si soudainement que je m'étale par terre dus à mes jambes que je ne contrôle plus. Aussitôt l'odeur du sang me monte au nez, sauf qu'au lieu de m'attirer elle me répugne.

Une affreuse douleur surgit de mon estomac, j'arrive à me trainer jusqu'au bidet crasseux. Je vomis tout ce que j'ai pu avoir dans l'estomac, c'est-à-dire rien, mise à part du sang. C'est comme si l'on me faisait un lavage d'estomac, ma gorge est en feu, mais du sang ne cesse de sortir. Quand enfin tout s'arrête. Je me retourne prise d'une bouffée de chaleur et me sens encore plus mal qu'avant, j'ai très peu de force pour tenir ma tête. Je comprends à ses yeux froncés que je n'aurais pas dû vomir tout ce sang. Je le questionne tout bas.

-Qu'est-ce qui se passe ? Ça ne fait pas partie de la transformation ?

-Non, tu es en train de mourir, dit-il le visage inquiet.

-Quoi ? Je veux me lever, mais mes jambes ne m'obéissent toujours pas. Je suis presque heureuse, je lui fais répéter pour être sûre de ce que j'ai entendu.

-Ton corps refuse la transformation, sa mâchoire carrée se crispe et sa bouche fine se resserre. Il se bat avec le sang que je t'ai donné il s'immunise alors que ton corps est à moitié transformé. Tu es comme à moitié morte.

-Comment est-ce possible ?

-Tu ne veux pas te nourrir, de plus tu refuses de devenir un vampire. Ton corps repousse ta transformation comme si c'était un virus, il combat le changement qui modifie ton ADN. Je ne sais même pas comment tu fais pour être encore debout.

-Est-ce que j'ai l'air d'être debout ? Dis-je, alors que je me sens une fois de plus partir vers les ténèbres.

Je me réveille avec la sensation de flotter dans les airs. Suis-je morte ? Est-ce mon âme qui plane au-dessus de mon corps ? Mes esprits reviennent peu à peu lorsque je sens mon bras me démanger. Je tente de l'apaiser avec ma main mais des chaines me maintiennent, liées aux barreaux de mon lit, j'ai beau tirer dessus elles ne cèdent pas. Je tourne la tête et rencontre le regard rouge d'Aaron assis sur une chaise avec le bras perfusé. Son sang remonte dans une petite machine puis ressort par l'autre côté pour venir jusqu'à moi. Comment a-t-il osé me faire ça ? Il répond à ma question qu'il a sans doute vue dans mon regard.

-Si boire du sang te dégoûte, j'ai trouvé une autre solution, dit-il convaincu d'avoir marqué un point.

-Je ne veux pas me transformer, éclatai-je de rage. Mes émotions sont de plus en plus instables, pensai-je. Je veux que tu me laisse mourir, je veux redevenir humaine ! Jamais je ne deviendrais ton double, espèce de taré ! Tous mes membres tremble tellement la fureur prend le contrôle de mon corps.

-Ta vie humaine tu l'as perdue le jour où je t'ai vidé de ton sang. Le retour en arrière est impossible, dit-il en montant d'un cran pour me prévenir qu'il ne serai pas bon de l'énerver.

-Alors, je t'en supplie laisse-moi mourir, l'éternité ne m'intéresse pas. Je commence sérieusement à désespérer, tout être normal réagirait à toutes mes insultes en perdant son sang-froid, alors que lui paraît intouchable.

-Je me suis attaché à toi, prononce-t-il sur un ton dur, je ne peux pas te laisser mourir.

Je secoue les bras dans tous les sens, bien déterminée à ne pas me laisser embobiner par ses belles paroles.

- Enlève-moi cette aiguille, bon sang ! Je ne suis pas un animal de compagnie, alors ne compte pas sur moi pour te faciliter la tâche.

La machine finit par chavirer entrainant dans sa chute l'aiguille plantée dans mon bras qui au passage m'arrache de la peau.

Il se lève pour tenter de me calmer, mais une rage qui m'effraye, s'éveille en moi, je lui hurle dessus déversant toute ma haine accumulée depuis que je suis coincée ici.

-Ne t'approche pas ! Lui incitai-je avec le regard plongé dans sa direction. Il reste immobile, le visage plein de stupeur, puis recule d'un seul coup comme bousculé par une rafale de vent. Je lis sur son visage qu'il ne contrôle pas son corps. Il s'entremêle les pieds et tombe sur les fesses sans aucun réflexe pour se rattraper, comme si quelqu'un le contrôlais.

Son visage complètement ébahi ne m'annonce rien de bon.

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Mon doubleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant