LILY
C'est avec les mains tremblantes, que je termine d'emballer les cadeaux pour les filles.
Noël s'est déroulé comme je l'avais prédit, seule. Je n'en veux à personne, au contraire, après tout, on ne devrait pas faire des sacrifices pour rester avec moi. J'ai su m'occuper, comme une grande fille, même si cela dure depuis ma « tendre » enfance.
J'ai failli brûler tout l'appartement en laissant mes cinnamons rolls chauffer trop longtemps dans le four, le réseau ne fonctionnait pas très bien, mais je suis tout de même parvenue à lancer mon film préféré. Puis j'ai mangé tout un pot de glace, sûrement un format familial, puis j'ai pleuré.
Les larmes ont roulé si vite, car j'avais honte de me tenir dans cet appartement délabré, assise dans le canapé de mon tyran, d'avoir mis mes mains là où étaient les siennes. Puis me remémorer qu'il était en train de pourrir en prison, car il a participé au meurtre de Mathilde Smith.
Smith. Un nom de famille qui fait honte. Mes pleurs ont doublé quand j'ai revu ma sœur venir me parler dans de si beaux vêtements qui coûtent un an de salaire par pièce. Cette garce, belle, loin de tous les traumatismes que j'ai endurés, car je n'étais pas la fille que mon père voulait garder. Loin de la torture psychologique, loin des coups et de la misère.
Et si ça avait été moins, à sa place ? Et si c'était Mathilde qui m'avait gardé ? Où serais-je désormais ? Comment je me sentirais ?
Aimé, sûrement.
Je me demande comment se déroule un Noël avec une famille qui s'aime et qui s'entend. Comment fonctionne une fête précieuse dans la famille de Nicole, Adrien ou Karl. Une fête avec un père qui aime ses enfants plus que tout, comme Andreas. Une fête dans un cadre idyllique, comme Lana. Une fête surchargée de souvenirs et de douceur, comme Lara.
Imaginer restera une illusion, je ne pourrais jamais le vivre, car je ne suis pas faite pour ce schéma-là. L'amour.
Les jours suivants, dans un New York heureux et de moins en moins enneigés, j'ai passé le reste de mes journées à soit étudier le peu que j'ai pu retenir pour les examens à venir ou au hangar pour m'assurer que chaque détail soit parfait pour accueillir les prochaines femmes qui mettront un pied ici. Je vois le Hate Club comme un enfant que je vais avoir du mal à partager, mais si c'est pour le bien commun, je présume que c'est le bon choix à faire.
Il y a des moments où je doute, où je regrette de m'être lancé dans un projet qui ne va peut-être pas fonctionner et avoir fait perdre du temps aux filles. Peut-être que tout ça ne servira à rien, et que tout le monde s'en moque. C'est le but du jeu et de l'inconnu, remettre tout en question à s'en faire souffrir.
La veille du nouvel an, j'ai reçu une lettre. Une lettre qui fait froid dans le dos. Des mots mal écrits, dans une feuille abîmée et de l'encre qui a bavé. Une lettre qui provient de prison, de la pire plume de mon père.
Elle est là, face à moi, quand je serre le dernier nœud rouge du dernier paquet. La seule raison qui me faisait repousser ce moment. Lire des mots qui m'agressent par le ton et les mots soigneusement choisis.
Je ne m'attends pas à « Bonne fête ma fille, désolé pour tout ce que je t'ai fait subir. Je regrette, je t'aime plus que tout. »
Tandis que je place les paquets dans un sac, de mon ongle, j'attire la lettre près de moi, écoeurée de toucher où ses doigts gras se sont inscrits. Je tire le papier mal plié, l'ouvre sur la table en bois de la petite cuisine qui donne vue sur le vis-à-vis et me met à lire :
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H*te Club
RomanceLily Smith a toujours été la jeune fille à défendre les injustices et élever la voix. L'idée de son club pour dénoncer le patriarcat de la société et de son université, va rapidement se faire des ennemis. Surtout un. Adrien Hopkins, le plus populair...