L'orchidée Tourmentée

Chapitre 4

POV Eline

    Je fixe mon écran, cette page vide que je n'arrive pas à remplir. Cela fait des mois et ça me frustre. J'ai l'impression que cette période merdique pompe toute la créativité dont je disposais pour mes écrits. Je tape une phrase, que j'efface ensuite pour mettre un mot que je supprime encore une fois. Un soupir d'agacement s'échappe de mes lèvres, il n'y a rien de plus frustrant que le syndrome de la page blanche. Je quitte mon bureau pour aller dans ma cuisine me faire un thé avec une part de quatre-quarts au chocolat. Rien de mieux qu'un petit grignotage pour combler la frustration. Si je m'écoutais, je mangerais sûrement toute la journée, tant mes émotions sont un bordel constant, surtout en ce moment. Pour essayer de stimuler mon cerveau, je décide de changer de poste de travail, j'essaie d'écrire mon roman, assise au sol, mon ordinateur sur la table basse. Tentative bien vaine, car je passe une bonne demi-heure à manger sans rien taper.

Voyant que ce n'est pas aujourd'hui que mon blocage me laissera tranquille, je prends mon portable pour voir un peu les dernières nouvelles concernant le Covid. Rien de bien rassurant quant à la possibilité de mettre fin à ce confinement. Je me souviens alors de cet homme qui m'avait contactée, je n'avais toujours pas donné suite à son message. Je relis celui-ci plusieurs fois.

Ma dernière relation m'a vraiment fait mal. Théo n'est pas quelqu'un de méchant, enfin, je le croyais jusqu'au jour où il m'a largué par message avec des mots durs et violents. Je craignais d'être à nouveau abandonnée de la sorte. Nathan m'a dit un jour, qu'il fallait avancer même si on a peur, car si on se bloque soi-même, on risque de passer à côté de quelque chose qui aurait pu être très beau à vivre. Il n'a peut-être pas tort. Après avoir hésité encore de longues minutes, je me décide à répondre au message, m'excusant de l'attente et complimente sa phrase d'accroche. Je troque mon manuscrit contre une bonne série Netflix et il ne faut pas longtemps avant qu'une notification ne m'informe que j'ai reçu une réponse de ce fameux Loan Hermant. Le stress vient s'abattre sur mon estomac. Je ne pensais pas recevoir une réponse aujourd'hui, même si j'aurais dû m'y attendre avec ce confinement qui nous laisse comme seule compagnie, le reflet de nous-même sur l'écran de nos téléphones. Ce qu'il y a de bien avec le virtuel, c'est qu'on n'a pas la personne en face et heureusement pour moi.

Loan Hermant : ce n'est rien, j'ai cru comprendre, grâce à ton profil que tu travailles dans un magasin alimentaire. J'imagine que tu continues de bosser ? Pas trop dur ?

Moi : effectivement, je travaille et on va dire que ça peut aller, même si je préférerais être ailleurs et toi ? T'es confiné ?

S'ensuit une conversation, sympathique, sans prise de tête. Loan est comptable, donc il travaille de chez lui, il habite à Poitiers. Tout comme moi, il a une passion pour la nourriture, le cinéma et la musique. Il me confie qu'il joue de la guitare dès qu'il a un peu de temps. Nous faisons ainsi connaissance durant une bonne partie de la matinée et le doute qui s'était alors installé en moi, dû au fait de l'avoir contacté, s'évapore peu à peu. Parler avec une personne qui ne fait pas partie de mon cercle d'amis habituel est vraiment plaisant et on se trouve plusieurs points communs. Mon portable m'affiche subitement le numéro de mon lieu de travail, chose étrange, je ne suis pas censée être en poste aujourd'hui.

C'est Natai. Il n'a pas besoin de dire quoi que ce soit, je sais que quelque chose ne va pas. Lorsqu'il s'est annoncé sa voix, était fébrile, il a de la peine et il est inquiet. Tout mon corps se redresse pour me mettre sur mes jambes, me préparant à apprendre la pire des nouvelles.

— Qu'est-ce qui se passe ?

Un long silence plane à la suite de ma question. L'angoisse se fraye un chemin de mon estomac, remontant dangereusement vers ma gorge alors que j'attends la réponse de mon ami.