Chapitre 31

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POV Eline

      Mes yeux vont de Natai à la porte qu'il vient de claquer. La situation est hors de contrôle ou plutôt, il est hors de contrôle. Je ne l'ai jamais vu comme ça. Chaque muscle de son corps tremble, tendu par une rage sourde, colère et douleur sont les seules choses que me reflète son regard à ce moment-là. Voir son père assis dans son salon ne devait pas être agréable pour lui mais je ne démords pas qu'il doit lui faire face un jour ou l'autre. Natai a une chance que je n'ai pas et le voir en proie à une haine, une détresse si intense me brise. Son père est en vie, il a une chance de pouvoir s'expliquer, une chance de pouvoir renouer avec lui, étape par étape, mais il fuit. Il laisse son traumatisme le guider alors que je sais, qu'au fond de lui, il souhaite aussi cette confrontation, le problème, c'est qu'il ne s'estimera jamais prêt à cela.

— Natai, tu...

— Pourquoi tu l'as fait entrer ? Vocifère-t-il.

La réponse reste bloquée dans ma gorge, sa colère me paralyse, sa fureur est dirigée vers moi maintenant que nous sommes seuls. Elle est la même que le jour où il s'est laissé emporter dans le bureau du poste de police. J'ai l'impression qu'il est capable du pire quand il est dans cet état. Comment lui expliquer mon intention en sachant qu'il va se braquer, et ce, peu importe les arguments que je pourrais lui sortir. Même avec les meilleures intentions du monde, je suis la coupable à l'heure actuelle.

— Il voulait te parler.

— Moi pas.

— Natai, tu dois écouter ce qu'il a à dire, il...

— Ce ne sont pas tes affaires ! Ce n'est pas ta famille alors cesse de chercher à te servir de la mienne pour remplacer la tienne !

Ses mots me frappent, m'assassinent. La véhémence qui l'habite à cet instant le rend détestable, blessant. Je n'ai jamais cherché à faire ça, c'est injuste de me sortir une connerie pareille. Les battements de mon cœur me rendent presque sourde, mes yeux brûlent, menaçant de brouiller ma vision. J'essaye de me raisonner, ce n'est pas lui qui parle mais sa colère , malgré tout, ses paroles sont gravées au fer rouge et me brûlent au plus profond de mon être.

— Tu es injuste là.

— Putain, c'est mon père, ma famille, mes problèmes ! La tienne est six pieds sous terre alors ne m'emmerde pas avec ta lubie de famille parfaite.

Ça part tout seul, je n'ai même pas le temps de réaliser ce que je viens de faire que ma main heurte violemment sa joue, ma respiration est incontrôlable alors que mon visage se couvre de larmes. Aucun de nous ne parle, on reste comme ça, à se regarder dans un silence de plomb avant que Natai ne quitte la maison. J'ai du mal à encaisser ce qu'il vient de se passer, le bonheur que je vivais jusqu'à maintenant se brise tel un miroir qu'on a jeté au sol. Les disputes de couple, ça arrive et c'est tout à fait normal d'être en désaccord de temps à autre mais ici ; c'est différent, violent. Beaucoup trop pour moi.

Les heures s'écoulent sans que je ne bouge et la porte face à moi reste fermée, malgré la nuit qui tombe, Natai ne rentre pas et j'angoisse. Finalement, mes doutes profitent de ce moment de faiblesse pour me torturer encore plus. Et s'il était allé chez Léa ? Après tout, elle le drague ouvertement et il n'a rien fait pour imposer une distance entre lui et elle. Cette éventualité me tue, me consume. Je suis au bord d'un précipice et j'y tombe sans être capable de lutter contre la chute. Je passe ma nuit sur le canapé, à l'affût d'un retour qui ne se fera pas, ni ce soir ni le lendemain. Pour la première fois depuis des semaines, je me rends au travail seule.

Samia sort du vestiaire au même moment et je manque de la percuter. Mon sommeil à été merdique, je n'ai pas cessé de pleurer, j'ai appelé Natai des centaines de fois sans résultat. Je bredouille des excuses à peine audibles à ma collègue et je la contourne et elle me suit.

L'orchidée TourmentéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant