Bianca : Une soirée mouvementée (partie 2)

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Pour ma part, ma soirée se passait bien jusqu'à ce que mon frère finisse à l'hôpital.
Tout avait bien commencé pourtant. J'avais retrouvé mon amie Rachel tandis que je gardais un œil sur Nico jusqu'à ce qu'il aille prendre l'air. Rassurée, je discutais avec Rachel. Ce soir, elle avait troqué ses habituels tee-shirts tachés de peinture contre une jolie robe verte, toute simple. Ses taches de rousseur et ses yeux verts vifs et brillants ressortaient à la lumière et elle avait décidé de lâcher ses cheveux roux qu'elle attache toujours quand elle peint, c'est à dire pratiquement tout le temps. Nous sommes toutes les deux créatives, excentriques et un peu trop dans la fiction, et c'est ces similitudes qui nous assure notre amitié depuis 3 ans. Avec Rachel, il n'y a pas de prises de tête, et nous ne nous agaçons ou ne nous lassons jamais l'une de l'autre, grâce à notre désintérêt des garçons et des relations amoureuses. Nous pouvons parler d'art et de tableaux pendant des heures, et se taper d'énormes fous rires. Je crois qu'avec elle, j'ai trouvé l'âme sœur platonique, et surtout l'amitié, la vraie.
Elle et moi discutions tranquillement quand Percy Jackson passa devant nous à toute vitesse, puis revient vers nous. Ses yeux vert océan pétillaient.
- Salut Bianca et Rachel. Vous auriez pas vu mon bro Jason ?
- Ah non désolées...
- Qui est-ce que tu traumatismes encore cervelle d'algue ? lança une nouvelle voix, féminine cette fois.
Une jeune femme blonde aux yeux gris brillant d'intelligence et à l'air un peu effrayant se fraya un chemin entre nous. Je savais qu'il s'agissait d'Annabeth Chase, la petite amie de Percy alias la fille la plus intelligente du lycée. En plus d'avoir un cerveau surperformant, elle avait un vrai charisme. Elle pouvait faire peur au premier abord, mais même si je ne la connaissais pas très bien, je savais qu'elle était très gentille. Percy passe son bras autour des épaules d'Annabeth et grimaça quand elle lui donna un coup de poing dans l'épaule (gentiment).
- Va plutôt embêter Léo. Il se prend pour, je cite "tío Léo, el Rey de la fiesta".
- Oui chef !
Percy s'enfourna dans la bouche une généreuse poignée de chips bleues (c'est là depuis quand ça ?) avant d'obéir à sa petite amie.
Laquelle leva les yeux au ciel et se tourna vers nous.
- Désolée pour lui. Il est moins insupportable d'habitude. Il est surexcité à cause de son anniversaire. Et ce n'est pas Léo et Jason qui vont le calmer...
Elle en parlait comme d'un enfant turbulent qu'elle était obligée de surveiller, mais je voyais l'affection dans son regard et je sentais sa voix s'adoucir et prendre un accent tendre quand le sujet se ramenait à son petit-ami. Je les trouvais mignons, tout les deux.
- Vous avez l'air super amoureux, j'affirmais avec un grand sourire complice.
Elle rougit instantanément puis me rendit mon sourire franchement.
- Ouais c'est sur. Contente de vous voir ici les filles.
Nous poussâmes la conversation un peu plus loin et découvrîmes qu'Annabeth était un férue d'architecture. Elle voulait l'étudier plus tard, et surtout construire de nouveaux bâtiments, modernes et esthétiques à la fois. Je lui tirais mon chapeau pour ce projet.
- On va bien s'entendre toutes les trois, affirma t-elle, les yeux brillants.
Puis elle partit rejoindre son petit-ami qui la demandait et semblait ne pas pouvoir vivre sans elle.
- Ils sont marrants, tout les deux, dis-je à Rachel.
Elle rit.
- C'est clair ! Il ne peut littéralement pas se passer d'elle. C'est le genre de couple qui, à la retraite, s'aime encore comme au premier jour. J'aimerais bien vivre ça...
Nous nous regardâmes fixement, puis éclatâmes de rire. Nous savions que nous nous suffisions l'une à l'autre.
Soudain, j'aperçus une fille que je ne connaissais pas courir vers moi. Elle s'arrêta devant moi et me regarda droit dans les yeux. Elle portait un jean noir brillant et un tee-shirt violet avec des inscriptions en doré que je n'ai pas eu le temps de lire. Ses longs cheveux bruns étaient coiffés en tresse et on aurait dit que ses traits avaient été tracés à la serpe, ce qui lui donnait un visage dur. Elle était grande et dégageait une autorité naturelle. Sa présence semblait quelque peu altière, et je me doutais qu'elle devait intimider les gens. Mais c'est avec douceur qu'elle s'adressa à moi.
- Je m'appelle Reyna. Et ton frère est dans les pommes.
Je la regardai avec de grands yeux écarquillés, le temps de digérer l'information. De ma bouche sortirent des sons incompréhensibles.
- Bah bah... Que... Quoi ?!
Reyna sembla perdre patience. Elle soupira et me saisit par le poignet pour m'amener sur les lieux de l'action.
Mon frère était allongé par terre. Il avait le teint rouge de quelqu'un qui avait trop bu et une bosse imposante sur le côté de la tête. Un grand brun l'examinait, l'air de ne pas trop savoir quoi faire. Il se tourna vers moi.
- Je suis désolé, je n'ai rien pu faire... Je n'ai pas pu l'empêcher de boire autant...
Là, sur le moment, je me serais bien passé de ses excuses. Je l'écartais de mon chemin d'un revers de la main, et courut auprès de mon frère.
- Il faut le tirer de là, qu'il n'y ait plus de risques qu'il se fasse piétiner, intervint Reyna.
Je la remerciai intérieurement. J'étais paniquée, et je me sentais coupable de ne pas avoir été là, et je ne savais pas quelle était la marche à suivre dans ce cas-là.
La jeune femme souleva Nico en le portant sur ses épaules, et je la suivit hors de la maison. Une fois dehors, nous nous posâmes la même question.
- Qu'est ce qu'on fait maintenant ?
Je commencerais à désespérer. Mon frère allait-il se réveiller un jour ? Est ce qu'il était mort ? Je ne pouvais pas le perdre, hors de question !
Heureusement, Will Solace sauva la situation. Il accourut vers nous, ses boucles blondes au vent. Son collier sur lequel était enfilées plusieurs perles de couleur se balancait à son cou. Il sembla immédiatement voir le coeur du problème. Reyna posa Nico pour l'allonger par terre. Will se pencha vers lui, et l'examina un petit moment. Je savais que si Nico avait été conscient, il aurait protesté. Il détestait qu'on le touche. Mais il ne l'était pas, et ça rendait la tâche de Will plus facile. Je lui faisais confiance, car il me semblait bienveillant et je savais qu'il étudiait pour devenir médecin. Après un atroce moment d'attente et de doute, Will se releva et se prépara à déclarer son verdict.
- C'est rien de bien méchant. Mais il fait l'emmener à l'hôpital, il a quand même une petite commotion cérébrale. Je pense qu'après une bonne nuit de sommeil et quelques jours au calme, il sera de nouveau sur pied.
Je poussais un soupir de soulagement. J'allais bientôt pourvoir retrouver mon frère.
Will se mit soudain en position accroupie. Reyna et moi le regardâmes sans comprendre.
- Hisse-le sur mon dos ! Je l'amène à l'hôpital.
Je protestai instinctivement :
- Non, on t'a suffisamment embêté avec cette histoire. Je vais me débrouiller, c'est mon devoir de grande sœur.
Il m'adressa un sourire lumineux et pendant une seconde j'ai eu l'impression que le Soleil se penchait vers moi. Que tout irai bien, pour toujours.
- Ça me fait plaisir. En plus, je connais le chemin de l'hôpital par cœur, je vais souvent voir mon père travailler. Je préfère vous savoir tout sains et saufs que de rester une seconde de plus avec Octave qui veut exterminer la communauté LGBT... (Il grimaça.)
J'eclatai de rire. Will et Reyna en firent autant, et nous plaçâmes mon petit frère sur son dos. Est ce que j'imaginais les joues de Will se colorer quand Nico se blottit contre lui ? Je n'en avais aucune idée.
Oh Nico, je pensai en voyant son visage se crisper de douleur pendant le transfert, qu'est ce qui t'as pris ?
Puis nous prîmes tout les quatre le chemin de l'hôpital.

Et c'est donc comme ça que je me suis retrouvée au chevet de mon petit frère, à l'hôpital en compagnie de Reyna Avila-Ramirez-Arellano et de William Andrew Solace. Je regarde Nico qui dort, en me demandant comment il va réagir quand il se réveillera. Le connaissant, il regarder partout autour de lui en tournant la tête dans tout les sens, l'air perdu, en se disant "qu'est ce que je fous ici ???". Cette image me fait pouffer intérieurement. Puis je me tourne vers les deux autres.
- Je suis désolée pour ce soir, et de vous avoir entraînés dans les embrouilles de mon frère...
Reyna me fixe avec un air neutre en haussant les épaules, et Will sourit avec un geste amical de la main, l'air de dire "c'est rien", ce qui équivaut chez eux à un "no problem" non-verbal. Reyna reçoit un appel, et s'éclispe pendant quelques minutes. Quand elle revient, elle nous explique que sa soeur Hylla lui demande de retourner à la fête. Nous lui disons au revoir, et je suis un peu déçue. Je l'aime bien, elle est très différente de l'apparence qu'elle renvoie. Mais je me reprends mentalement pour mon égoïsme. Nous avons gâché sa soirée avec notre histoire spéciale "Di Angelo". Je reste donc seule avec Will. Nous nous asseyons chacun sur une chaise, de chaque côté du lit de Nico. Je décide de briser le silence qui s'installe.
- Alors... Depuis quand tu veux devenir médecin ?
Il semble pris au dépourvu que je lui pose une question, puis se prend le menton et fronce les sourcils, l'air plongé dans une profonde réflexion. Je réalise alors qu'il doit être quelqu'un de populaire et très sociable, vu l'attention entière qu'il accorde aux autres. Il doit avoir des tonnes d'amis. Je ne comprends pas pourquoi il nous aide, nous.
- Depuis toujours, je pense. C'est une sorte de vocation chez moi. Mon père est médecin, ma tante est infirmière... (Il hausse les épaules.) Tu vois un peu notre famille. Et j'aime aussi l'idée d'aider les gens, de leur apporter du réconfort. C'est mon truc.
Je souris. Il a vraiment l'air passionné. C'est inspirant. Puis je sens mes yeux se fermer d'eux même et je ne peux m'empêcher de bailler.
- Tu devrais rentrer chez toi, suggère Will, les sourcils de nouveau froncés.
- Non, non, il faut que je reste...
- Il faut surtout que tu te reposes, réplique t-il d'un ton sévère. Ne t'inquiètes pas, je vais veiller sur lui, ajoute t-il en faisant un signe de tête vers Nico.
Je me sens coupable, mais en même temps tellement fatiguée... J'ai eu si peur ! Je sais que j'ai besoin de prendre l'air, de rentrer à la maison et de me rouler en boule dans mon lit, dans ma bulle, éloignée de l'agitation, du bruit et du stress, pour me remettre de mes émotions fortes.
- Tu ferais vraiment ça ?
- Bien sûr ! C'est comme si je faisais le premier pas pour être médecin.
- Pourquoi tu es aussi gentil avec nous ?
Il rougit, et je me rends compte que je m'avance sur un terrain glissant, et surtout très personnel. Je décide de couper court à la discussion et lui souris.
- Merci, Will.
Il me retourne un sourire solaire et me fais un signe de la main pour me dire au revoir. Je sors de l'hôpital, dans l'air frais de la nuit. Je respire de nouveau. Le ciel est beau, constellé d'étoiles et d'une belle nuance de bleu si sombre qu'on dirait du noir. Je commence à marcher, et les pensées se bousculent dans ma tête. Je pense à Nico. Je me sens coupable, de l'avoir laissé seul, aussi bien à la fête qu'à l'instant. Mais je sais que Will prendra soin de lui. Puis une autre émotion prend le dessus : la colère. Qu'est ce qui lui a pris de me faire une peur pareille ? Et pourquoi il a fait l'abruti, à boire comme un trou alors qu'il est encore mineur ?! Je fulmine sur le chemin du retour. Ah, celui-là, quand il se réveillera, je vais lui en toucher deux mots.
J'arrive enfin devant ma maison, et je respire pour me calmer. Un bruit soudain se fait entendre, et je saute presque hors de mes bottes. Un SDF est adossé à un mur, près de chez moi. Emmitouflé dans une mince couverture pleine de trous, il frissonne. Une barbe noire lui mange le visage, et son regard semble torve. Mais ce n'est qu'une impression ; je sais que ce pauvre homme a besoin d'aide. Après tout, j'ai vécu la même chose, avant qu'Anna et Daniel nous sauvent, Nico et moi. Je prends donc mon courage à demain et me rapproche pour lui demander :
- Est ce que je peux faire quelque chose pour vous aider ?
Il me fixe un instant, puis se lève. Je m'écarte en le regardant rassembler ses maigres affaires et partir en marmonnant dans sa barbe.
Est-il fou ? Peut-être. Je le suis des yeux, lui et sa couverture, lui et ses murmures, tandis qu'il remonte la rue et disparaît enfin à l'angle d'un mur. Je décide de ne pas me questionner plus que ça sur ce qui vient de se passer, car la fatigue se fait ressentir de plus fortement à chaque seconde. Je déverrouille la porte. La maison est sombre et silencieuse. Mes parents sont couchés depuis longtemps. Je distingue sur l'horloge qu'il est deux heures du matin. Sans cérémonie, je gagne ma chambre a tâtons et m'effondre dans mon lit. Je mets les évènements de la journée de côté, et m'endors aussitôt, épuisée par cette soirée qui est déjà bien avancée.

Bianca in Deviltown Où les histoires vivent. Découvrez maintenant