Exécution secrète

Chapitre 14 : L'intuition

Amélia est interrompue pendant son film du soir par la sonnette de chez elle. Elle se lève et regarde par le judas. Joseph est devant la porte, l'air penaud. Elle lui ouvre.

— Salut ! dit-il en essayant de retrouver son visage habituel.

— Salut Joseph, quelque chose ne va pas?

— Tu ne me répondais pas depuis la dernière fois alors... Je viens voir si tout va bien.

— Oui, excuse-moi, j'ai été pas mal occupée ce week-end. Tu veux entrer?

Elle s'écarte et il entre dans le salon, rassuré qu'elle lui adresse la parole. Suite à la révélation d'Alison, j'ai été obligé d'agir, de lui faire comprendre qu'il allait perdre Amélia avec ses idioties. Le pauvre a dû passer deux nuits cauchemardesques pour enfin se bouger.

— La dernière fois aussi, après la patinoire, tu étais froide...

— Écoute, je sens que vous me cachez des trucs, tous, et ça ne me plaît pas.

Il s'installe sur le canapé et regarde Amélia qui a les bras croisés sur la poitrine.

— T'as raison, tu ne sais pas tout...

— Pourquoi? Je viens toutes les semaines et je suis prête à agir. J'ai envie de faire partie de votre révolution.

— Ce n'est pas une...

— T'as très bien compris, le coupe-t-elle. Je veux aider.

Il lui fait signe d'approcher et elle s'assied à côté de lui. Il pose une main sur sa joue et embrasse tendrement ses lèvres. Elle ne comprend pas son geste mais le laisse faire, pensant qu'Alison lui a peut-être menti.

— C'est plus grave que tu peux l'imaginer, finit-il par avouer. Il n'y a pas que l'émission, il y a aussi des disparitions. On s'attaque à ça parce que c'est notre meilleur angle, mais il y a vraiment quelque chose qui cloche à Calandre. Je le savais déjà avant de venir, des bruits courent dans les autres villes de l'île. Je ne pense pas que nos actions resteront discrètes très longtemps si on veut qu'elles soient concrètes. Je ne veux pas que tu sois impliquée là-dedans et que tu prennes des risques.

Il prend ses mains et les serre dans les siennes. Elle laisse tomber son dos contre le canapé et fixe le mur un long moment, agacée qu'il la surprotège constamment.

— Et si je suis prête à prendre des risques?

— Tu ne mesures pas à quel point c'est dangereux. Même si tu ne meurs pas, tu perdrais tout ici.

— Je m'en fiche.

— Tu dis ça parce que tu ne sais pas ce que c'est de vivre dehors.

Elle laisse échapper un long soupir et Joseph la tire contre lui. Elle pose la tête contre son torse et ferme les yeux.

— En dehors de Calandre, c'est la merde, explique-t-il. Déjà, dans les villes autour, c'est compliqué, mais j'ai des contacts dans des camps du nord de l'île et la situation est de plus en plus catastrophique pour eux. Si jamais on doit partir... C'est là qu'on ira, et ce sera dur à vivre.

— Plus dur que rester ici et se sentir inutile?

— Je pense, oui.

Elle se redresse et il colle son front contre celui d'Amélia. Elle se laisse happer par ses pupilles profondes et capitule quand il l'embrasse. Elle participera quoi qu'il en pense. Elle ne veut pas laisser le groupe prendre des risques sans elle. Elle passe les mains sous son t-shirt pour s'assurer qu'ils ne parlent plus des sujets qui fâchent et sent sa peau frissonner sous ses doigts. Un sentiment de toute-puissance l'envahit quand elle constate ce qu'elle provoque chez lui. Il est à elle, quoi qu'en dise Alison. Il caresse son dos et se laisse glisser sous elle quand elle le fait basculer sur le dos. Elle prend le temps de s'arrêter pour regarder son visage avant d'embrasser ses lèvres. Il passe une main dans ses cheveux et l'autre dans le bas de son dos pour la garder contre lui.