19

72 8 0
                                    






















Le réveil dans la cabane de Peter fut doux, malgré les courbatures persistantes de mes aventures récentes. Le soleil filtrait à travers les fenêtres, inondant la pièce de sa lumière chaleureuse. Un soupir de soulagement s'échappa de mes lèvres alors que je m'étirais, me remémorant les événements qui avaient conduit à notre victoire contre l'Ombre du Chaos.

Le souvenir de mon baisé échangé avec Peter me revint en tête, et faillit me faire défaillir. Mon cœur battit fort dans ma poitrine quand j'y repensais. Un doux sourire flétri sur mes lèvres. Dire qu'à nos débuts, Peter était un véritable tyran avec moi, un vrai diablotin.

Les souvenirs des débuts houleux se mirent à fuser, me rappelant la fois où il m'avait enfermé dans une cage à plusieurs mètres de hauteur, celle où il avait faillit tué le pauvre Nolan pour me faire céder à un chantage ou encore quand il avait organisé cette énorme chasse au trésor où j'aurait pu avoir un bien triste destin. Nous partions de loin, et pourtant voilà que le destin semblait s'être jouer de nous, en nous liant par un lien inattendue et unique, intarissable même. Sans celui-ci, Peter n'aurait pu échapper à la malédiction, et l'ile aurait péri avec ses habitants.

Regardant le paysage qui s'étendait à travers la fenêtre, je me mis à réfléchir sur mes propres agissements et émotions depuis mon arrivée sur cette ile jusqu'à aujourd'hui. Du plus loin que je m'en souvienne, j'avais toujours été réticente concernant les histoires qu'on comptait aux enfants, la science avait été mon refuge dès mon plus jeune âge. Et pourtant, le destin semblait m'avoir joué des tours quand on constatait l'endroit où je me trouvais. Désormais, la réalité que j'avais cru connaitre me semblait bien plus illusoire que celle dans laquelle j'errais aujourd'hui.

J'avais toujours eu peur de l'abandon, de cette illusion du conte parfait jusqu'à ce qu'on nous reprenne finalement tout ce qu'on nous avons donné. Une peur qui ne m'avait jamais quitté totalement. Mes insécurités m'avait poussé à détester Pan pour ce qu'il était. Le Pays Imaginaire était l'illusion que je ne pouvais m'accorder par peur de l'abandon. Par peur du réveil, du retour à la brutale réalité. Mais, ici, j'avais finalement trouvé la place que je m'évertuais à chercher depuis tant d'années.


J'étais destinée à être une fille perdue.


Après quelques instants à savourer le calme retrouvé, je me levai et me préparai. Enfiler une tenue laissée là par Peter m'apporta un sentiment de familiarité et de réconfort. Quittant la cabane, je me dirigeai vers le camp des garçons perdus, étonnée par l'effervescence qui régnait déjà autour de moi. Les garçons s'affairaient à diverses tâches, chacun contribuant à la reconstruction de notre île bien-aimée. Certains coupaient du bois, d'autres ramenaient des fleurs. Je fus un peu déroutée par toute cette animation, moi qui peinait déjà à reprendre mes esprits de la dernière bataille.

En chemin, je croisai un garçon et lui demandai où je pourrais trouver Peter et ses fidèles compagnons. Il m'indiqua le grand Arbre Perdu, et je le remerciai avant de poursuivre ma route. Le grand Arbre avait toujours été imposant, il était devenu désormais coutume de le voir, alors la taille et l'espace qu'il occupait ne me surprenais plus. Ceux-ci m'apportait même quelque chose de sécurisant, de familier.

Lorsque je pénétrais enfin dans l'endroit désigné, je fus accueillie par le joyeux brouhaha des conversations qui résonnaient à l'intérieur de l'Arbre. L'air s'emplit de rires et joutes verbales sarcastiques entre les six amis réunis autour de la table en bois qui trônait au sein de la grande salle. Un petit sourire naquit sur mes lèvres, réchauffant mon cœur malmené des derniers mois.

Le tableau que j'observais minutieusement valait tout l'or du monde. Peter était assis en bout de table, président fièrement, entouré de part et d'autre par Cardan, James, Aban, Almach et Thalion. Leurs rires et leurs taquineries remplissaient l'air, témoignant de leur bonheur d'être à nouveau réunis. Je restai un instant à les observer de loin, laissant leurs voix familières apaiser mon esprit tourmenté.

Un sentiment de déjà vu me saisi, redoublant mon sourire. Oui, j'avait déjà vécu cette scène quelques semaines plutôt, ce qui s'était soldé de jolies joutes sarcastiques envers les bras droits de Peter. A l'époque, je les méprisait profondément — ce qui était réciproque, bien évidement. Aujourd'hui, bien des choses avaient changé.

Thalion et Almach mangeaient avec dévotion comme si durant ces derniers mois ils n'avaient gouter à une telle nourriture. Aban piocha à droite et à gauche des morceaux de si et là de chacun des mets servis sur la table. Cardan comme à son accoutumée semblait consumer par son aura chacun des plats qu'il prenait dans ses mains. Peter et James étaient ceux qui étaient les plus maniérés des six. Me rappelant alors qu'ils avaient des origines aristocrates, je me concentrais davantage sur leurs mouvements. Se tenant droit, ils ne mangeaient pas la plupart des plats avec leurs doigts mais avec des couverts. Je rigolais intérieurement face à ses pensées qui avaient peu évoluées par rapport à la dernière fois. Certaines choses ne changeraient définitivement jamais, et c'était tout aussi bien.

Soudain, Almach lança d'un ton railleur, coupant court à mon espionnage.

— Alors Darling, tu comptes rester plantée là à nous observer encore longtemps ou tu vas nous faire le plaisir de nous honorer de ta présence ?

Il reprit la même formulation que la dernière fois que nous nous étions retrouvé dans cette situation. Ceci eu le don de faire rire la petite assemblée qui se retourna dans ma direction. Je m'avança alors d'un pas léger vers eux, le sourire aux lèvres, heureuse de retrouver les personnes chères à mon cœur. Les regardant tour à tour, je m'assurais que tous allait bien. Leurs visages autrefois assombris par des traits d'inquiétude étaient aujourd'hui plein de sérénité. Ceci me mit du baume au cœur.



Oui, bien des choses avaient changé depuis notre première rencontre.


— Cette fois-ci je ne vous souhaiterai pas de vous étouffer avec votre nourriture... quoique !

Ma réplique déclencha un nouveau flot de rires, et je me sentis enveloppée par la chaleur de leur affection.

— Que c'est bon de te revoir, Abi' ! Déclara Thalion, son sourire rayonnant de bonheur.

— Et cette fois-ci je promets de ne pas vouloir mesurer ta langue ! Ajouta Aban, avec un clin d'œil complice.

Peter grogna d'un air menaçant, mais je pouvais lire l'amusement dansé dans ses yeux.

—En effet, Aban, ne tente pas le diable, intervint Cardan avec un sourire en coin.

Je ris avec eux, me sentant enfin chez moi parmi mes amis. Mais ma curiosité fut piquée lorsque je remarquai leur attitude espiègle et conspiratrice.

— Au fait, qu'est-ce que signifie cette réunion ? Et pourquoi le camp semble-t-il préparer quelque chose ? Demandai-je, me rappelant l'effervescence de celui-ci, un peu plus tôt observé.

Aussitôt, les six garçons se regardèrent les yeux brillants de malice, et munit d'un sourire en coin.

— Qu'est ce que vous me cachez bande de petits cachottiers ? Renchéris je, amusée et curieuse.

— Nous ? Non jamais on oserait te cacher quelque chose, c'est vraiment mal nous connaitre, oh chère Abi' ! Répondit Aban.

Un petit rire s'échappa de ma bouche tandis que je ne démordais pas pour obtenir une réponse.

— Allez dites moi !

Les garçons échangèrent des regards complices, puis James prit enfin la parole.

— Il semblerait que la couronne de feuille d'or est trouvée tête à son gout.

James reprenait alors les mots que Peter avait prononcé lors de la cérémonie organisée quelques semaines plutôt en l'honneur de la nouvelle fille perdue — en mon honneur. Mon cœur rata de nombreux battements quand j'en compris le sens.

peter pan & le retour au pays des songes [peter pan x oc]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant