CHAPITRE 3 - L'Empathe

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Un raclement de gorge me réveilla en sursaut. Mes yeux se plissèrent, la lumière m'éblouit un instant. Le sol, rugueux, était humide et froid. Je me situais dans une pièce... une cave. Une cave familière. Face à moi se trouvait une silhouette masculine, et celle-ci prenait doucement forme.

Mon cœur rata un bond.

Jacob.

Les lèvres pincées, il s'accroupit pour déposer à terre un plateau garni. Je baissai le menton ; il s'y trouvait une dizaine de steaks de bœuf crus.

Mon estomac émit d'emblée un gazouillis, il se tordait en vrac. À ce moment précis, j'étais capable de manger n'importe quoi, ô combien j'étais affamée ! J'engloutis à la hâte les tranches de viande en savourant chacune. Oui, elles étaient crues, mais peu importe ! Mes papilles se régalèrent, une véritable explosion de saveur ! Bon sang, pourquoi n'avais-je jamais expérimenté ça ?

Des bribes de ma mémoire survinrent. Mes traits se figèrent et brusquement, je me précipitai vers mon ami, remplie de désarroi.

– Jacob, je suis tellement désolée...

Je trébuchai, stoppée dans mon élan, et me surpris à percevoir un cliquetis. Ma cheville s'emprisonnait par une chaîne en argent attachée au mur. 

Jacob se raidit. Il tressaillait de tous ses membres.

– K-Kara, bredouilla-t-il. Si on t'a attaché, c'est pour notre sécurité... et la tienne...

J'écarquillai les yeux. Difficile de lui en vouloir, je regrettai terriblement les événements de la veille. J'aurais pu lui faire du mal, voire pire. Cette envie effroyable qui me traversait, qui me couvrait de honte et de remords. Ce besoin irrépressible de... l'écarter, comme une vulgaire poupée de chiffon. Ça ne pouvait pas être moi...

Jacob inspira une énorme bouffée d'air :

– Tu te souviens ?

– Non, mentis-je aussitôt.

Il se gratta l'arrière de la tête, puis posa sa main sur son menton. Un son attira mon attention, à l'intérieur de sa poitrine. Une percussion reconnaissable entre mille. Je me crispai, frappée de stupeur. Je l'entendais distinctement. 

Son cœur battait la chamade.

– Mon père est venu nous chercher pile au moment où... où tu es devenu un loup. Ça n'a pas été simple, mais nous avons réussi à t'endormir...

J'entrouvris la bouche, mais aucun son n'en sortit.

– Kara, crois-moi ! clama-t-il avec ardeur. Nous nous sommes juré de ne jamais faire ça avec les Métas. Ou qui que ce soit ! Mais c'était comme si tu voulais... me tuer.

Je demeurais bouche bée. Impossible.

– Comment tu sais que je suis une Méta ? m'exclamai-je, abasourdie.

Il se figea.

– Kara. Je suis... un Empathe.

Un Empathe. Non. Non ! Je ne pouvais y croire.

Kara, ils sont dangereux, évoquait Sara il y a fort longtemps. Les Empathes... des manipulateurs d'esprits, des télépathes... Tout se bousculait en bazar dans ma tête.

Cette Famille, dans son unanimité, avait subi une sentence impitoyable. Reconnue comme la plus dangereuse de toute, compte tenu de leurs capacités redoutables, le Grand Conseil décrétait le bannissement à vie. De fait, les Empathes, exilés par la Guilde, vivaient parmi les humains et dissimulaient leur existence auprès de tous.

GUILDE : HéritageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant