03 | 𝐿𝑎𝑦𝑛𝑒

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꧁  ɴᴜɪᴛ ᴅ'ᴀᴜᴛᴏᴍɴᴇ  ꧂






« Je fais seulement mon boulot et tire profit de leur accoutumance. »




Octobre ,
Londres, Hackney,
00h00
Layne



Dans l'obscurité glaciale de la nuit, je me tiens là, solitaire, dans les ruelles oubliées de Hackney.

Ici, la noirceur règne en maître, ponctuée seulement par la lueur vacillante des lampadaires défaillants. Je haï l'atmosphère que cette rue apporte, mais pas que ,  je déteste cet endroit, chaque pierre ébréchée, chaque rire amer de ces SDF qui résonne dans l'air vicié.

Mais à force de la côtoyer chaque soir, je ne peux démentir le fait qu'elle m'est familière, presque réconfortante.

Pourtant son apparence, elle, en fait fuir plus d'un. Personne de censé ne songerait une seule seconde à s'aventurer là, surtout à cette heure-ci. Les murs délabrés sont couverts de graffitis, témoins muets des activités illicites qui s'y déroulent. Une odeur âcre d'urine imprègne l'air stagnant, mêlée à des effluves de détritus abandonnés où les rongeurs et les insectes y logent. Lorsque la nuit tombe et que le soleil se couche, le silence est rompu parfois par des éclats de voix étouffés ou par des bruits sourds provenant d'éclats de balle perdus.

Et chaque fois que mes pas se logent dans cette putain de ruelle, je n'oublie jamais pourquoi je fais ce travail ; et même si je déteste chaque instant de cette existence, chaque mensonge que je dois raconter pour survivre, chaque regard vide qui me juge dans l'obscurité, je ne l'oublie pas.

Pas elle.

Et dans ce jeu de hasard truqué, je suis coincé dans un rôle que je n'ai pas choisi, une marionnette entre les mains cruelles du destin.

Mais ce jeu est bel et bien celui qui me fait vivre à présent.

Je sort de mes pensées et extirpe mon téléphone portable de la poche de mon sweat-shirt, puis vérifie pour la cinquième fois le lieu du rendez-vous. Il est vingt-trois heures et cet enflure est en retard de cinq minutes.

Qu'est-ce qu'il fou, putain !

Mon sang bouillonne dans mes veines et cette appréhension inonde mon corps. Le paquet de poudre blanche dans ma poche ; je ne cesse de le triturer, même en étant parfaitement conscient de la valeur de cet or blanc.

Ce n'est pas la première fois que je vends, non, bien au contraire. Seulement, habituellement, je ne prends pas autant de risques. C'est Zack qui s'en occupe, pendant que moi, je m'occupe de blanchir l'argent et dissimuler nos profits illicites.

Je crois qu'il m'en veut encore pour sa bagnole. Bien que ça fasse deux semaines aujourd'hui, j'ai bien peur que mon acolyte me déteste pour un bon bout de temps.

Je sais que j'ai déconné ; il m'avait prévenu de ne pas faire de course ce soir-là. Mais lorsque cet enculé de Serguëi m'a provoqué et défié à la course, je n'ai pas su me contrôler et ai accepté. À vrai dire, je n'attendais que ça : lui donner une bonne leçon.

Mais finalement, c'est moi qui ai perdu le contrôle de la voiture, lorsque j'ai aperçu cette fille sur ce banc. Je ne sais pas pourquoi j'ai quitté la route des yeux à un instant si décisif. Il ne faillait pas quitter la route, simplement prendre plus largement le virage. Une seconde d'inattention qui m'a couté plus de 100 000 balles. Et quand je me suis planté dans ce mur, mon cœur s'est arrêté de battre. Non pas car je venais de perdre la course ou car je venais de bousiller la voiture de mon meilleur pote, mais car je me suis vu mourir dans ce tas de ferraille. Et putain, comme je me suis senti vivant.

NUMBER 006Où les histoires vivent. Découvrez maintenant