20 | Daisy

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꧁ Un peu de chaleur dans mon cœur ꧂



«Ils sont tous pareils. Ils me regardent comme une bête de foire, comme si mon sort était scellé, comme si les rôles ne pourraient jamais s'inverser. »

Novembre,
Londres,
Daisy.


Il fait nuit et j'ai froid.

La situation ne pourrait pas être pire, n'est-ce pas ?

C'est la première fois que je fais le mur. J'avoue que c'est plutôt angoissant et l'insécurité d'être une femme dans ce monde ne m'aide en rien.

J'ai toujours été une enfant sage, ou plutôt réservé. Loin de moi l'idée de me rebeller contre mes parents, non pas parce que je ne le voulais pas, mais surtout parce que leur absence constante ne m'en a jamais donné l'occasion.

J'ai déjà pensé à m'enfuir de la maison, mais je savais que ce serait vain. Papa était encore en voyage d'affaires, et maman, déjà absente.

Quand on y réfléchit, fuir quelque chose qui nous échappe déjà est inutile. Ainsi, je suis resté cloîtré chez moi.

D'ailleurs, ma situation actuelle me paraît plutôt ridicule ; personne ne m'a empêché de partir, pas même le concierge de l'immeuble qui dormait sur le comptoir.

Mes pas s'accélèrent alors que je m'éloigne précipitamment de mon immeuble pour appeler un taxi. La course commence dans trois heures, comme me l'a dit Clay...

Clay.

Ce nom résonne comme une note de dégoût à mes oreilles. Pourtant, malgré toute la haine que je peux ressentir pour lui, je ne peux réprimer un sentiment de compassion. Je l'ai aimé. Tellement aimé que j'en ai la nausée ; et même si mon estomac est encore vide, je n'ai pas besoin de cela pour sentir la bile remonter dans mon œsophage.

C'est tellement douloureux de vivre en sachant qu'on a une épée de Damoclès au-dessus de la tête, de redouter chaque réveil, jusqu'à espérer ne pas revoir le jour juste une fois.

Je ne veux pas mourir pour l'éternité, putain. Je veux m'endormir et me réveiller sous un soleil radieux, loin de tout ce qui me tourmente.

J'ai peur que cela ne s'arrête jamais, que je ne puisse pas me reconstruire. Peut-être que papa a raison, je devrais étudier à Harvard l'année prochaine. Au moins là-bas, je serais loin de ce qui me fait du mal et de ce cauchemar dans lequel je me noie.

Mais ce qui est fait est fait. Dans mon sac à main, il suffit de plonger la main pour découvrir de petites pilules blanches qui, ce soir, me permettront de garder mon secret encore un peu.

J'ignore pendant combien de temps je pourrai tenir dans ces circonstances, combien de temps Clay continuera à me faire chanter pour cette stupide drogue, ou encore combien de temps je pourrai supporter cette tension insupportable.

Ce que je ressens, c'est un état de nervosité inconnu, imprégné d'adrénaline et de terreur. On dirait que j'ai franchi un cap. Avant, j'ignorais jusqu'où je serais prête à aller pour que ces photos prises à mon insu ne soient jamais divulgué. Maintenant, je crois avoir la réponse : j'irai loin s'il le faut. J'irai trop loin.

La nuit est dense, presque étouffante.

Mon taxi m'a déposé non loin du terrain vague, refusant de s'approcher davantage de ce lieu qu'il semble redouter.

NUMBER 006Où les histoires vivent. Découvrez maintenant