Chapitre 6

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La tristesse des personnes réservées comme moi réside dans l'importance des mots et leur impact démesuré.

De la part de n'importe qui d'autre sur terre, cela n'aurait rien signifié pour moi, mais venant de lui...

Ai-je vraiment besoin de vous l'expliquer ? Vous le savez ! Venant de lui, c'est différent ! Tout ce qui vient de lui est différent. C'est normal, il est différent.

Je ne réponds pas. Je finis par sourire, hocher la tête et regarder ailleurs, le laissant papoter avec mes potes afin de reprendre mes esprits.

Il a toujours eu ce don pour se faire apprécier par les autres, venir ici comme une fleur qui empeste le poison, à rigoler avec mes amis pour gagner encore plus de points.

Je ne suis pas bien. J'ai envie de rentrer chez moi, là où rien ne se passe, là où rien n'est imprévisible, là où les miracles ne se produisent jamais et où les hommes bruns ténébreux n'ont aucun accès à mon être.

Je commence à avoir mal au ventre.

Si il te fait mal au ventre par sa simple présence, comment peux-tu imaginer le laisser tomber ? Comme dit un proverbe tunisien, le premier chemin vers le cœur d'un homme, c'est son ventre, c'est pareil pour nous, mesdames. Si tu as mal au ventre... ce n'est pas bon signe. C'est le premier symptôme de la maladie.

La maladie de l'amour.

Comment se comporter lorsqu'on attrape une maladie, brusquement comme ça, au beau milieu de la foule, et pourquoi suis-je l'unique personne à l'attraper ? Je me tiens à une distance de plus d'un mètre à peu près de lui et je suis quand même contaminée ! Il pourrait être dans le parking derrière, je ne le verrai même pas et je serai quand même malade juste par la simple idée qu'il soit dans le même périmètre que moi. Alors, eux, ces gens-là, ils lui parlent, le regardent, le touchent, et ils vont extrêmement bien.

En parlant de parking, j'ai toujours trouvé les parkings excitants. Les sous-sols aussi... sombres, silencieux... romantiques ? Eh bien, pas de jugement, chacun sa définition du romantisme.

Ma définition, c'est une dispute dans un parking la nuit et une réconciliation à l'arrière d'une voiture !

Il me regarde, je le sais, je le sens, mais je fais semblant de ne pas le remarquer. Je ne veux pas croiser ses yeux obscurs, aussi sombres que mes nuits d'insomnie. Le meilleur pote d'Ahmed (qui est à la base juste venu nous faire un coucou mais a fini par rester à notre table) devient intéressant d'un coup.

Rien que pour éviter tout contact visuel avec lui. Avec qui ? Comment on définit une personne qu'on n'arrive pas à définir ? Il n'est ni mon ami, il me plaît bien trop pour ça, ni mon amoureux (pas la peine de vous faire une explication, c'est clair), ni un inconnu, ni juste une simple connaissance, parce qu'il traverse mes pensées beaucoup trop pour être une simple connaissance. Donc, on l'appellera « le perturbateur de la vie d'une jeune femme forte et indépendante », ou simplement par son fichu prénom.

Au fond de moi, une envie presque irrépressible de prendre sa main et de lui donner un câlin me démange, pour lui dire qu'il m'a manqué aussi, et que je suis vraiment lassée de ce jeu. Lassée de mentir à mes amis, mais surtout à moi-même. Ces petits jeux étaient tellement amusants au début, mais maintenant je me suis perdue, c'est un fait.

Cependant, mon ego refuse catégoriquement cette démarche. C'est inacceptable, inadmissible, cela va à l'encontre de ma fierté. Une fierté que je traîne avec moi depuis plus de vingt ans, comme un trophée. Mais franchement, avez-vous déjà complimenté quelqu'un en lui disant : "Oh, tu as tellement de fierté, c'est tellement bien" ? Non, car avoir de la fierté n'est en aucun cas un compliment. Ce n'est pas un trait de personnalité positif, ni une qualité aussi noble que la gentillesse ou la bienveillance.

Il est parti, rejoignant ses amis à une table en face de nous. J'aurais voulu qu'il reste, même si je l'aurais quand même ignoré.

Je commence à regarder chaque personne en sa compagnie... Je connais pratiquement tout le monde, sauf une blonde très, très belle. À vrai dire, elle est presque mon opposé : grande, mince, très féminine, ne danse pas mais se contente de hocher la tête au rythme de la musique et de faire semblant de connaître les paroles des chansons.

Kenza, tu te sens bien ? Tu veux qu'on rentre ? demanda Beya, posant une main compatissante sur mon épaule.

- Non, ça va, Je ne vais pas gâcher ma soirée à cause de lui," répondis-je, secouant légèrement la tête pour dissiper mes craintes.

Beya hocha la tête avec un léger sourire. "Ok, si tu es sûre. Mais n'hésite pas à me le dire si tu changes d'avis, d'accord ?"

- Il est venu accompagné...

Beya acquiesça. "Oui, son visage me dit quelque chose, mais je ne suis pas certaine de l'avoir déjà rencontrée.

Je souris légèrement.

- Elle est jolie, tu ne trouves pas ?

Beya répondit avec un sourire chaleureux. "En tout cas, pas plus belle que toi. Tu le sais. Allez, oublie-le. Concentrons-nous sur notre soirée et passons un bon moment ensemble.

Il est là, à ses côtés, sans un mot, je les observe discrètement. Je me demande alors quels sont leurs projets pour la soirée, la nuit, l'été, ou même l'année à venir.

Comment se sont-ils rencontrés ?

Qu'ont-ils partagé ensemble jusqu'à présent ?

Connaît-elle ses préférences musicales, son signe astrologique, ses aspirations, ses rêves ?


Est-ce qu'elle connaît le nom de son grand-père et pourquoi il lui est si cher ?

Lui a t'il déjà prononcé toutes les phrases que j'ai rêvé d'entendre de sa part ?

Est-ce qu'il a sa photo dans sa galerie ?

Je l'envie, à elle et toutes les autres. Même si à la fin de la soirée, son cœur sera brisé, elle saura au moins quel goût il a.

Why would you ever kiss me ?
I'm not even half, as pretty
You gave her your sweater
It's just polyester, but you like her better
Wish I were Heather

Une nuit étoiléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant