𝒸𝒽𝒶𝓅𝒾𝓉𝓇𝑒 𝓋𝒾𝓃𝑔𝓉-𝒹𝑒𝓊𝓍

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"Malgré tout ce que mon corps avait subi jusqu'ici, une part de moi-même ne pouvait s'empêcher de croire en une potentielle justice."

La loi de Talis, LaConteusesDesEnfers, 2019







𝒩𝑜𝓇𝒶𝒽

𝖀ne assiette autrefois fumante commençait à refroidir au bout du matelas, posée sur les draps. Mes genoux repliés contre ma poitrine et le dos contre la tête de lit, Ismaïl m'en avait apporté une qui avait l'air délicieuse, mais je n'avais pas osé lui dire que la viande me donnait la nausée.

Je n'osais pas non plus poser un orteil hors de la chambre. Et peut-être que je n'en avais pas envie. J'avais entendu les hommes d'ici parler au travers des murs de ce qu'il s'était passé à mon appartement, les raisons pour lesquelles cet homme était recherché et pourquoi il me voulait.

Je revivais inlassablement la même boucle de l'abus.

Si j'avais quitté les griffes de mon parrain, c'était pour me réfugier dans celles acérées de Sergio. Et hier, j'étais passée à deux doigts de changer à nouveau de bourreau.

Par-dessus tout, ce que je me demandais, c'était si Asia Ray faisait partie de ce groupe aussi. Allait-elle un jour abuser de moi, étant donné qu'elle en avait le droit ? Ou bien se démarquerait-elle de tous ces enfoirés qui avaient croisé ma route avant elle ?

Avec ces questions en tête, l'idée de me balader dans ce palais de luxe, au milieu de ce monde qui pouvait me détruire à tout moment, ne me séduisait pas tellement.

Je n'étais pas chez moi.

Ma seule maison était dans les bras d'Adeline, nulle part ailleurs.

Et elle n'était pas avec moi pour le moment.

Un faible parfum ferreux s'étendit sur ma langue. Je venais de me ronger l'ongle du pouce jusqu'au sang. En constatant la petite mais immonde blessure au bout de mon doigt, je grimaçai. La chair s'offrait à ma vue.

Je me levai pour chercher un pansement afin de ne pas tacher les draps, mais deux coups résonnèrent contre la porte et me freinèrent dans ma marche.

— Quoi ?

Une immense carrure assombrit l'encadrement.

Dax jeta un coup d'œil vers l'assiette encore pleine. Il fit un pas en arrière pour repartir mais ses yeux s'attardèrent sur mon pouce abîmé. Je cachai ma main derrière mon dos.

— C'est rien.

Il n'en crut pas un mot, de toute évidence, car il rejoignit ma salle de bain et revint avec un pansement. Dans sa main tendue à plat vers moi, il déposa un caramel aux côtés de la bandelette pour ma blessure. Je fixai l'emballage transparent et crème qui laissait entrevoir la pastille beige dessous.

— Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu donnes des caramels ?

— C'est quand il nous sent anxieux. C'est sa façon de nous rassurer, intervint Ismaïl qui venait d'entrer par la porte demeurée ouverte.

Mes joues prirent une teinte carmin quand il repéra son repas intact.

Il ne sembla néanmoins pas offensé.

Tu me feras une liste des repas que tu aimes.

— Je suis désolée, ça a l'air très bon...

𝐀𝐁𝐘𝐒𝐒𝐄𝐒Où les histoires vivent. Découvrez maintenant