𝒸𝒽𝒶𝓅𝒾𝓉𝓇𝑒 𝓋𝒾𝓃𝑔𝓉

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"— J'attends quelqu'un.
— Qui ?
— Je m'en souviens plus."

— A Ghost Story, David Lowery, 2017






𝒩𝑜𝓇𝒶𝒽

𝕵e pensais naïvement que rentrer chez moi m'offrirait un semblant de sécurité. Une illusion en partenaire avec ma mémoire visuelle. Si j'étais de retour ici, alors j'étais de retour dans mon ancienne vie, et tout ce dont je venais d'être témoin ne s'était pas réalisé.

C'était loin d'être le cas.

Tout était vide. Moi, et cet appartement. Je ne ressentais rien, ou trop. J'étais affreusement exténuée. Je désirais simplement dormir et ne jamais me réveiller... du moins, pour un temps.

Ne pas avoir aéré le studio pendant deux jours laissait une trace odorante difficile à supporter. Il faisait chaud, la crème sur ma peau se mêlait à un début de sueur. Et pourtant, je cohabitais avec un air émétique causé par l'humidité.

Je traînai mon sac derrière moi, le tenant par la hanse. En le balançant sur ma commode, je vis un petit post-it d'un vieux jaune collé sur la fermeture éclair.

Je n'avais pas vu Dax le mettre dessus. Mais je m'étais assoupie pendant le trajet, alors ça ne m'étonnait pas.

Gravé au stylo plume noir, l'encre qui bavait quelque peu affichait les mots suivants :

𝓳𝓮 𝓽'𝓪𝓲 𝓶𝓲𝓼 𝓭𝓮𝓼 𝓼𝓸𝓶𝓷𝓲𝓯𝓮𝓻𝓮𝓼 𝓮𝓽 𝓭𝓮𝓼 𝓬𝓪𝓻𝓪𝓶𝓮𝓵𝓼.
𝓵𝓮𝓼 𝓼𝓸𝓶𝓷𝓲𝓯𝓮𝓻𝓮𝓼, 𝓬'𝓮𝓼𝓽 𝓪𝓿𝓮𝓬 𝓶𝓸𝓭𝓮𝓻𝓪𝓽𝓲𝓸𝓷... 𝓪 𝓵'𝓲𝓷𝓿𝓮𝓻𝓼𝓮 𝓭𝓮𝓼 𝓬𝓪𝓻𝓪𝓶𝓮𝓵𝓼.

Donc il ne me parlait pas, mais il m'écrivait.

Je m'écroulai sur le matelas. Mon dos me tirailla. Merde, ce truc n'était pas confortable du tout. Je regrettais le canapé d'Asia. 

Et malgré la fatigue, je ne parvins pas à fermer l'œil. Les sueurs froides collaient le drap à ma peau. Je revoyais, j'entendais, je revivais. Tout.

Le soleil du désert qui tapait sur le crâne, les effluves de plomb, les sons stridents de coup de feu. Le sang, les larmes. Je m'entendais supplier Asia à nouveau. Je me voyais mourir.

Je me voyais partir.

Et j'étais encore là.

Je ne supportais plus cette chaleur alors que j'étais habituée à être amoureuse du soleil. En étoile sur mon matelas, je geins. Des rideaux fins de transpiration s'écoulaient dans ma nuque, à l'arrière de mes genoux et sur mes tempes.

— J'ai chaud putain, râlai-je à bout de nerfs, à deux doigts de pleurer à nouveau.

Et par-dessus tout, j'avais un mal de crâne dominant.

Je tâtonnai le sol à mes côtés jusqu'à trouver la boîte de somnifères et en avaler un.

Les effets finirent par m'emporter dans un véritable sommeil réparateur dont j'avais grandement besoin.

***

Des coups à la porte m'arrachèrent à mon sommeil artificiel.

L'astre repeignait sans pudeur mon appartement de sa robe éclatante. Le somnifère avait fonctionné.

𝐀𝐁𝐘𝐒𝐒𝐄𝐒Où les histoires vivent. Découvrez maintenant