Nos cœurs désarmés | T.1 & T.2

21. Il n'y a pas que l'eau qui mouille

PIETRO

 Prendre un bar en otage ne m'a jamais semblé si amusant qu'en ce moment. Bon, en réalité, pour eux non, mais seul mon bonheur compte aujourd'hui. J'ai beau avoir un ego surdimensionné, me marier parce que madame la decidé ne changera pas la donne. Ce n'est pas en faisant pression sur moi que je céderai. Elle a voulu se barrer, ok, mais maintenant elle pourra courir pour espérer avoir une once d'affection venant de ma part.

— Bon, qui veux jouer ? je lance à travers la salle silencieuse.

Il m'a suffi d'un flingue et de quelques menaces pour m'approprier cet endroit et le transformer en... air de jeux ?

Personne ne bouge, donc je jette mon dévolu sur un homme à la barbe mal taillée.

— Toi, dis-je en pointant du doigt. Va devant la cible, j'ai envie de corser la partie.

Il tremble et me fait franchement pitié. Après un instant qui me semble être une éternité, il se lève enfin et rejoint le mur. Abaissant fortement ses paupières, il commence à pleurer à chaque larme de son corps.

— Je déteste les pleurnichards, je marmonne en choisissant une fléchette.

Je m'apprête à la lancer quand je me rappelle que si je le tue, la police risque d'avoir un motif de m'emprisonner au moins cette nuit, donc je grimace et m'assied sur une chaise haute. Très peu pour moi d'être enfermé.

— Monsieur, laissez-nous, je vous en suplis nous ne sommes que des innocents, bredouille le serveur.

— Personne n'est intouchable, nous avons tous quelque chose à nous reprocher. Maintenant, arrête de me parler et sert-moi un autre verre avant que je me décide de te faire danser à l'aide de mon flingue, comme dans les films de Cow boy.

Quel plaie, il fait ce que je lui dis, j'aurais adoré m'entraîner au tir. Je vide mon verre cul sec puis me relève direction le jukebox, j'y insère une pièce et choisis une ancienne musique assez entraînante. Le son fourmille dans mes oreilles, une pure douceur, je laisse mon corps exprimer sa joie. Dansant sans me soucier du monde qui tourne autour de moi. Le carillon de l'entrée s'active quand la porte principale s'ouvre en un fracas.

Sans même me retourner, je sais que ça va barder pour moi. Une infime seconde avant que je ne jette un regard vers la personne qui s'approche, je reçois un coup sur la tête qui m'envoie directement dans les abîmes de l'inconscience.

***

Récupérant mes sens petit à petit, une odeur de sel et de poisson m'agresse les narines. Mon rythme cardiaque augmentant face au stress d'ignorer où je suis, je me mords la langue sans le vouloir, ce qui m'envoie une décharge électrique jusqu'au cerveau. J'ouvre difficilement les paupières, puis après un instant, ma vision devient nette.

Putain, je fou quoi face à la mer.

Non, attends, je suis dans la mer.

J'ai littéralement le cul dans l'eau, assis et attaché au vu de mes mains bloquées dans le dos. Il fait nuit et seule la lumière de la pleine lune m'indique que je suis mal barré et trempé jusqu'aux os.

Qui est le salopard qui m'a fait prendre une baignade de minuit tout habillé ?

Des bruits de pas s'approchent de moi, je tente de me libérer les poignets grâce à l'eau qui cache mes mouvements.

— Tu veux déjà t'en aller ? Je croyais que tu voulais t'amuser, résonne la voix d'Angela par dessus le flot des vagues.

— Je vais te le faire payer, libère-moi.