XLVIII - 48 (M)

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Marta Moroz

Je l'appelais M, c'était ce que j'éprouvais pour elle. Mon initial à moi était N, c'était ce qu'elle devait ressentir pour moi.

De toute façon, était-ce son vrai prénom ? J'en doutais. L'origine de son prénom provenait de l'Europe de l'Ouest plutôt que de l'Est. Pourtant, j'avais préféré ne pas tilter que Marta n'était pas un prénom russe. À présent, je ne pouvais plus ignorer ses comportements incriminants. Je devais les confronter et mettre de côté mes sentiments. Alors, je me remémorai tous nos souvenirs.

Pour commencer, elle était tout comme les autres très perspicace. Lors d'une de nos confrontations au bar, elle avait de suite cerné que mon verre de bière était en fait du jus de pomme. Elle était clairvoyante. Elle était "tombée" sur le message de Vera quand elle avait surgi derrière moi et celui d'Anastasia lorsque j'avais posé mon téléphone au patinage. Elle était discrète. Elle avait assisté à mon amadouement et à mon accolade avec Vassili au lever du soleil sans que je la remarque de suite alors qu'elle n'était qu'à quelques mètres de moi. Elle m'observait si bien qu'elle avait fini par connaître mes mimiques quand je ne lui disais pas toute la vérité. Elle avait des yeux partout. Lorsque ce n'étaient pas les siens sur moi, c'étaient ceux de ses complices. En réalité, j'avais des doutes sur le fait que Dimitri se serve de sa base de données pour rendre service à M en échange de cours de musique. Mes craintes s'étaient confirmées lorsqu'il l'avait informée du come-back de Vassili, alors qu'il n'avait pas encore remis les pieds à la fac. C'était louche que Dimitri soit déjà au courant, aussi étrange que ses entrevues avec M à l'aube. Tout ça pour dire que je n'étais sûrement pas l'exception et qu'il avait dû me surveiller également. À vrai dire, je l'avais compris inconsciemment, mais ça ne m'avait pas percuté. En fait, c'était tellement coutume dans mon travail d'être traquée par des criminels qui voulaient se venger que je n'avais pas pris conscience qu'un citoyen lambda n'était pas censé le faire s'il n'avait rien à me reprocher. Qu'est-ce qu'il avait trouvé ? Et est-ce que c'était le seul ? Peut-être que Francesca aussi cherchait à en apprendre sur moi, ça expliquerait pourquoi j'avais créé de l'affinité avec coïncidemment la sex-friend du M. Elle avait donc son petit réseau de contacts tels des vigiles et elle se permettait en plus de contrôler le mien. Elle ne voulait pas que je me rapproche de Piotr et de Vassili, ce qui pouvait plus au moins s'entendre, d'Anastasia qu'elle avait je ne sais comment vue me parler en cours de psycho et même de Nina qui était subitement partie en Écosse après notre bise à la caf. Cependant, ceux de qui il fallait le plus se méfier, c'étaient ses proches. Je savais qu'elle prenait de mes nouvelles auprès de J. Néanmoins, le plus curieux avec lui, c'était la discussion qu'ils avaient eue dans l'arrière-boutique de la boîte en russe. J avait apparemment manqué un rendez-vous, souhaitant abandonner, découragé par leur projet qui durait depuis trois ans. M, enthousiaste, avait donc tenté de le raisonner en rappelant qu'ils avaient un plan et que D et W ne lâcheraient pas. Sur le moment, je ne savais pas de quoi ils parlaient, ils ne l'avaient pas spécifié vu que c'était visiblement trop évident pour eux et J m'avait dit qu'il me raconterait, mais on n'en reparla plus. À présent, tout faisait sens.

Ce n'était pas pour autant moins douloureux à accepter. Elle était si impulsive, si intenable qu'elle avait besoin d'être stimulée. Elle avait fait son choix. Malheureusement, le mauvais. En plus, elle était entraînée. Elle savait se battre, j'avais pu en être témoin quand elle avait averti le supporter de foot au bar qui avait fauté en me touchant de la main, quand elle m'avait sauvée des nageoires de M. pingouin et quand elle avait fait comprendre à Vassili ce que ça faisait de se faire agresser. Elle était maline. Elle avait fait croire à un vol à l'arraché et s'en était tirée, autrement dit, elle semblait habituée à déraper du côté criminel. Elle avait aussi un corps... en plus d'être magnifique, rempli de cicatrices, dont celle à la paupière. Sa technique et sa pratique finirent par me faire penser qu'elle avait peut-être été une combattante qui avait dérapé. Elle l'était restée dans l'âme, du moins elle n'avait pas souhaité aller à l'hôpital après sa noyade ni après l'agression à Amsterdam, et le dépistage, qu'elle avait quand même fait, était anonyme. En vérité, elle ne voulait simplement pas prendre le risque de se faire retracer en se soignant. Pourtant, nos actions finissaient toujours par nous rattraper. Était-ce pour cette raison qu'elle faisait des terreurs nocturnes ? Le trafic d'humains devait en effet être horrible à voir, encore plus quand on en dépendait. Moi qui avais de la peine pour elle...

À tort et À découvertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant