21. Louis

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Pour la première fois depuis que j'ai fait la connaissance de Lenny, je m'aperçois que son
cerveau est capable de prendre une initiative intelligente.
Mon cerveau à moi exécute une gymnastique mentale pour justifier ce que je m'apprête à faire :
sur la terre ferme, la jambe d'Avigaël la gêne, mais dans l'eau, elle est comme nous. En attendant, elle a vraiment tout fait foirer en téléphonant à Damon. Je dois reprendre le contrôle de la situation et ne plus avoir de regrets. Ce qui veut dire...
Qu'elle doit se mouiller. Et selon la formule préférée de Damon : Tout de suite.
– Viens là.
J'enlève rapidement mon débardeur.
Elle recule, ses pieds nus s'enfoncent dans le sable.
– Jure-moi de ne pas me jeter dans le lac.
Elle se tourne rapidement vers l'eau avant de me refaire face.
– Il y a plein de poissons là-dedans.
– Ils ne te feront pas de mal.
– Je ne sais pas nager, s'empresse-t-elle d'ajouter en reculant encore d'un pas.
– Mauvaise idée, Louis, intervient Niall en venant se poster près d'elle.
Je lui décoche un regard condescendant.
– Je connais Avigaël depuis toujours. Ne te laisse pas berner. C'est une excellente nageuse.
Je croyais qu'elle avait décidé de jouer la carte de l'honnêteté.
Un éclaboussement ramène notre attention sur Lenny et Ariana, maintenant trempée jusqu'aux os.
Je profite de cette distraction pour m'emparer d'Avigaël Je la soulève dans mes bras et je la porte jusqu'à la rive.
– Je suis tout habillée ! hurle-t-elle en gigotant dans tous les sens. Lâche-moi. Sérieusement, Louis. C'est moi qui ai déconné. Alors... tu ferais mieux de garder tes distances !
Je me retiens de rire. Jamais je ne me serais attendu qu'elle dise ça.
– Tu as déconné, hein ? Et moi qui pensais depuis le début que c'était moi !
J'avance un peu dans l'eau. Ses bras noués autour de mon cou me serrent comme un étau.
– Bon, la plaisanterie a assez duré, Louis. Repose-moi.
Sa tête est blottie contre mon épaule. Ses cheveux me tombent sur la figure. Si je n'étais pas aussi en colère contre elle, je serais tenté d'apprécier cette façon dont elle se cramponne à moi.
– Ne me jette pas à l'eau. Promets-le-moi.
J'avance encore. Mes pieds s'enfoncent dans le sable tout doux au fond du lac. L'eau m'arrive
maintenant aux genoux. Je dépasse Lenny et Ariana qui sont en train de s'éclabousser. Avigaël et moi sommes à deux doigts de nous retrouver dans le même état.

– Je ne vais pas te lâcher, promis, dis-je à Avi' en contournant un petit coude sur la rive pour qu'on soit plus tranquilles. Plus personne ne peut nous voir maintenant.
Elle desserre les bras et penche la tête en arrière pour me regarder dans les yeux.
– Sûr ? dit-elle en poussant un soupir de soulagement.
– Oui. Réprimant mon amusement, j'ajoute : Mais retiens ton souffle, sinon tu vas boire la tasse.
Avant qu'elle ait le temps de me demander pourquoi, je nous plonge tous les deux dans l'eau.
Dès que nous faisons surface, dégoulinants, elle tente de se libérer mais je la tiens serrée contre moi. J'ai beau lui en vouloir, je n'ai pas envie qu'elle se noie sous l'effet d'un choc thermique, ou à cause du poids de son pantalon détrempé.
Elle émerge en postillonnant, mais pas à cause de l'eau du lac. Elle écume de rage.
– Comment as-tu pu me faire ça ?
– Ce n'était pas très difficile, je lui réponds en l'étreignant pendant qu'elle continue à se
débattre dans mes bras.
Elle m'envoie une gerbe d'eau dans la figure.
– Arrête.
Elle recommence. Je finis par la lâcher. Elle va se poster à une petite distance de moi et plonge
les deux mains dans l'eau. Elle est prête pour une bataille d'éclaboussements. Je suis sans pitié. C'est un jeu de gosses, et nous ne sommes plus des enfants.
Elle ne va pas tarder à comprendre ce que c'est de jouer dans la cour des grands.
Je patauge vers elle. Elle se remet à m'expédier des paquets d'eau. Je la laisse faire, sans lui rendre la pareille. Je suis trempé, mais j'ignore l'eau qui me gifle et me pique les yeux. Je continue à avancer jusqu'à lui attraper les poignets pour qu'elle cesse son manège.
Là, je lui bloque les mains derrière le dos et je l'attire tout contre moi. Je sens ses seins pressés contre ma poitrine. Quand elle lève les yeux vers moi, nos lèvres sont à quelques centimètres. Ses cheveux dégoulinent, des gouttelettes d'eau scintillent sur son visage, reflétant le soleil. Ses lèvres humides brillent.
Comment ai-je pu penser que cette fille était ordinaire ?
– Qu'est-ce que tu comptes faire maintenant que tu me tiens à ta merci ? demande-t-elle.
– Tu as tout faux, je lui chuchote à l'oreille. C'est toi qui m'as à ta merci.
– Oh ! s'exclame-t-elle en écarquillant les yeux.
Je relâche ma poigne tout en effleurant sa joue du bout des lèvres. La sensation de sa peau douce
contre ma bouche, alliée à celle de son corps plaqué contre le mien est en train de me rendre fou. Bon sang ! Je ne veux pas avoir envie d'elle. Ce serait tellement plus facile de la détester, de la chasser de mes pensées et de ma vie pour toujours. Mais les paroles de Julio résonnent dans ma tête. Pas de regrets.
Quand mes lèvres atteignent le coin de sa bouche, je lui lâche les bras pour lui enlacer la taille. Pendant ce temps-là, je fais glisser ma bouche sur la sienne. Elle soupire, sa respiration s'accélère tandis que nos lèvres humides se frottent tout doucement.
C'est érotique. D'un érotisme douloureux.
Pas question d'approfondir notre baiser. C'est à elle de le faire. Je vais lui en donner tellement envie qu'elle préférera mourir plutôt que ne pas sentir nos langues se mêler. Je tiens à ce qu'elle le désire encore plus fort que moi.

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