Chapitre 4 - May

226 33 5
                                    

May

Qu'est-ce qui cloche chez eux ? Est-ce que j'ai fait quelque chose qui les a froissés ?

Bon d'accord, James aurait bien pu se blesser dans l'escalier, mais il m'a aussi broyé les doigts, et ne s'est même pas excusé. Ça m'apprendra à rêvasser de ce que pourrait être ma vie à Boston en attendant Alex qui s'est pointé deux heures plus tard. Finalement, est-ce que tout ne serait pas de sa faute à lui ?

Justement, il fait irruption dans la cuisine, un sourire aux lèvres, et dépose un baiser sur ma joue avant d'ouvrir le frigo.

— Est-ce que tu m'as menti quand tu m'as dit que je ne dérangerais personne en venant m'installer ici ? lui demandé-je en guise de bonjour.

Il sifflote, puis se saisit d'une pomme dans laquelle il croque en me dévisageant.

— Ché pas, pourquoi ?

— J'ai l'impression d'être un chewing-gum sous la basket de Bull. Dès qu'il me voit, on dirait qu'il rêve de me mettre dehors à coup de pied. D'ailleurs, pourquoi vous l'appelez comme ça ? Ce n'est pas son prénom, si ?

— Non, c'est son nom de scène.

— Ouais... et James ? Il m'évite ? Je me suis excusée pour son téléphone, je ne pensais pas...

— Laisse tomber May, tu te prends trop la tête. Bull est comme ça avec tout le monde, et James doit être surbooké en ce moment, je ne le vois pas non plus. Mais qu'est-ce que tu fais ?

Je baisse les yeux sur la pâte sableuse entre mes doigts que je malaxe depuis bien trop longtemps, et avec trop de force. Le beurre commence à fondre, et mes biscuits prennent une consistance de plus en plus visqueuse.

— Des cookies. En guise d'offrande.

Je tente le tout pour le tout. Prier les Dieux de la pâtisserie et faire appel au pouvoir du sucre pour les amadouer. J'ai multiplié les sourires à Bull depuis mon arrivée, mais il paraît complètement imperméable à ma bonne humeur, alors je change d'approche.

— Mais Finn est sympa lui, non ? essaie mon frère pour me remonter le moral.

— Oui, mais je ne l'ai pas vu beaucoup. Quand il est ici, il dort, et dès qu'il se réveille il retourne au bar.

— Va le voir au Clover alors, ça te changera les idées.

Je verse les pépites de chocolat à la pâte en grommelant. Alex a raison, j'accorde trop d'importance à ce que ses colocs pensent de moi. J'ai tellement rêvé ma vie à Boston que le moindre accro me perturbe. Sans oublier que demain sera mon premier jour chez Medtech, et j'ai un nœud dans l'estomac rien que d'y songer. Tout mon avenir se joue ici, et maintenant. Et ça a franchement mal démarré.

— Courage petit sœur, m'interrompt-il en posant ses mains sur mes épaules. Je sais que c'est beaucoup de changement, tout ça, mais ça va aller. C'est fini la galère, on est tous les deux, on veille l'un sur l'autre, comme avant... D'accord ?

Je hoche mollement la tête, et il me serre dans ses bras.

— Je file, je dois être au tribunal à neuf heures. On mange ensemble ce soir ?

Je me force à lui adresser un sourire et reprends ma mixture alors qu'il quitte la maison. J'enfourne les biscuits, puis attrape un bol et me verse des Golden Grahams que j'arrose de lait en essayant de me rassurer en planifiant ma journée afin de ne pas trop penser au début de mon stage.

Je suis plutôt de nature anxieuse. Et une part de moi est plus que ravie d'avoir déménagé de Philly, mais l'autre est bouleversée d'avoir perdu tous ses repères. Le four sonne alors que finit mon repas et je les répartis sur une grille pour les laisser refroidir.

South EndOù les histoires vivent. Découvrez maintenant